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Carmina-Xu
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32

 Dans l’après-midi, alors qu’il fumait sur le balcon, son téléphone sonna. En vérifiant, il constata que c’était son application d’interphone. Il éclata de rire en voyant Hugo offrir un magnifique doigt d’honneur à la caméra. Il s’amusait toujours comme un gamin quand il venait. Il fit coulisser la porte de la baie vitrée pour passer la tête et autorisa :

— Système, déverrouille l’entrée !

Alan tira ses dernières bouffées avant d’écraser sa cigarette et de rentrer pour l’accueillir. Lorsqu’il retrouva Hugo dans le vestibule, il remarqua ses cernes prononcés. Sans l’ombre d’un doute, sa nuit avait été courte et agité. Il lui confirma en se lamentant :

— Je serais bien resté au lit ! C’est bien parce que c’est toi !

— Je t’en ai pas empêché ! Soyons francs, t’aurais vraiment dormi si tu étais encore chez toi ?

— Ah… Non, éclata-t-il de rire. De toute manière, tu es toujours ma priorité !

— Ah t’es mignon mon bretzel !

 Je sens que tu te fous de moi. Ça peut être que ça quand y’a « bretzel » dans la phrase.

— Tu comprends l’intention, c’est déjà ça ! Je dois te redonner des cours de français ?

— Espèce de trou du cul, marmonna-t-il en allemand. Tiens, Ayana n’est pas là ?

— Nan, elle est partie acheter un magasin avec une amie, indiqua-t-il en retournant au salon.

— Acheter un… Elle est pas sérieuse ?

— Bah, ça me surprend plus en vérité. C’est comme ça à chaque fois qu’elle va en ville avec Lucie. Elle ne prend pas juste une tenue ou deux, mais une vingtaine.

— Ah ouais, elle en est arrivée là…

— Et ça va être pire que d’habitude quand elle va rentrer. Je l’ai mise en retard, elle va encore plus faire chauffer sa carte pour rattraper le temps perdu !

— Ta femme à une drôle de manière de gérer sa frustration, soupira Hugo de plus en plus dépité.

— Pourtant, elle ne l’était pas en partant, commenta Alan avec un grand sourire.

— Je ne veux pas savoir ! rétorqua-t-il en éclatant de rire après quelques secondes de réflexion.

— Tu veux boire quelque chose ?

— Un irish cofee, ça me parait pas mal.

— Donc un café, rectifia Alan.

— rabat joie !

Alan ne se retint pas de rire à nouveau en se dirigeant vers la cuisine pour le servir. Lorsqu’ils s’installèrent avec leur boisson, Hugo s’enquit de ses intentions pour la journée :

— T’as des plans pour l’après-midi ou tu as juste prévu de glander comme on faisait à l’époque après les soirées beuveries ?

— J’admets qu’à la base, je voulais trainer vu l’immersion chiante de jeudi. Puis comme Ayana est partie en ville, je me suis dit que c’était l’occasion que je te parle de quelque chose.

— Si c’est pour ton enterrement de vie de garçon, ne m’en dis pas plus, j’ai déjà tout en tête !

— Tu sais que tu fais flipper quand tu sors des trucs comme ça ? C’est bien moins drôle que ça.

— Il y a un problème Alan ? demanda sérieusement Hugo.

— Oui et non, avoua-t-il. Je cherche des infos qui se trouvent hors de ma portée. J’imagine que tu pourrais m’aider vu que tu utilises parfois des sources moins officielles…

— Tu me fais de la peine de penser ça ! C’est pas mon genre.

— Bretzel, t’es pas crédible là… Je te connais trop bien, tu me feras pas gober un truc pareil.

— Bon ok. Par contre, j’ai du mal à concevoir que ce soit toi qui me demandes de l’aide pour obtenir des informations illégalement, releva-t-il avec suspicion.

— J’en ai marre de me faire mener en bateau par la HDC alors que je vois très bien que rien ne va. Ça fait deux ans que je me tape des dossiers de personnes ouvertement ou non opposés aux Dreamers !

— Je… Vais dire que je n’ai rien entendu, hein, proposa Hugo après un blanc.

— Si tu as très bien entendu ! insista-t-il. Je sais très bien que tu fais partie des sceptiques vis-à-vis des Dreamers, mais que tu ne dis rien par respect pour Ayana et moi. En revanche, même si je suis un Passeur, moi aussi j’estime que quelque chose ne va pas.

— Ce que je pense est un fait et je sais très bien faire la part des choses. Par contre, comment toi tu en es arrivé là alors que la HDC t’a permis de revenir de loin ?

— C’est depuis mon accident, expliqua-t-il. J’ignore pourquoi, mais je ne fais plus confiance à Simon et j’imagine que la raison se trouve dans ce bout de mémoire perdu. J’ai voulu consulter mon dossier interne après que Polen m’ait indiqué des détails que je ne connaissais pas sur ma variance… Comme par hasard, l’obtenir, alors qu’Ayana a récupéré le sien sans la moindre difficulté, a été une véritable galère. Bien évidemment, j’ai fini par comprendre qu’il était aussi falsifié quand j’ai enfin pu l’avoir. Je crois sérieusement que ce qui m’est arrivé n’était pas si accidentel que ça…

— Al’… Tu deviens parano. J’ai du mal à te reconnaitre par moment depuis ton accident.

— Peut-être, admit-il. Qui ne le deviendrait pas quand un foutu « projet Dreams » te hante jour et nuit sans même savoir de quoi il s’agit ? Que celui qui pourrait te répondre te ment ouvertement ? Et qu’il se sert de toi en prime pour évincer sévèrement des personnes problématiques ?

— Attends, tu ne serais pas en train d’insinuer que tu étais impliqué dans l’affaire Karlsson ?

— Je suis même celui qui a fourni les preuves les plus accablantes, grogna-t-il. Polen nous a tous les deux piégés pour qu’on réalise une immersion commune. La HDC n’est pas ce qu’elle parait.

Hugo s’accouda sur le plan de travail en devenant pensif et soucieux. Alan savait que si son ami ne voulait prendre aucun risque, il garderait le silence sur ce qu’il venait de dire. C’était un journaliste, chacun des mots qu’il avait prononcés pouvait se retourner contre lui s’il n’avait pas autant confiance en lui. Il commenta :

— Je ne comprends pas le principe des variances, mais j’ai toujours supposé que s’il y en a une qui mériterait d’être confidentielle, c’est celle d’Ayana… Il doit y’avoir un détail avec la tienne dont tu n’as pas conscience. Je pense sérieusement que depuis la création du parti des Dreamers que rien ne va, souffla-t-il en relevant les yeux sur Alan. Ils sont tous des scientifiques, biologistes, voire même d’anciens militaires pour certains. Ils ne sont pas des hommes et femmes d’affaires et encore moins des politiciens. Je n’ai jamais vu un parti aussi bien organisé alors qu’ils se sont lancés à l’international, qui plus est, au milieu de gouvernements hostile pour certains. C’est franchement flippant… Leurs idées et leurs projets paraissent si utopiques, mais affreusement plausibles et réalisables. Les tours en sont bien la preuve.

— J’en suis déjà arrivé au même constat, confirma Alan. En plus de ce que j’observe en interne, je suis persuadé que quelque chose ne va pas.

— Exact, rajouta Hugo. Il y a une chose que je ne comprends pas aussi, pourquoi les Dreamers font autant trembler le milieu politique, et ce, pour chaque pays où ils sont implantés ? Leurs opposants ont si peur d’eux, qu’ils tentent tout pour les décrédibiliser, voire attenter à leur vie pour certains, mais ça retourne toujours contre eux. Tout ne fait qu’attester les propos des Dreamers : le monde est corrompu.

— Autant dire que ton métier même est menacé par leur idéologie…

— Complètement. C’est d’ailleurs pour ça qu’il y a très peu de médias qui décrochent les accréditations pour les approcher. Je passe par des moyens détournés pour obtenir certaines de mes informations, mais d’autres font bien pire que moi… Ma question est : qu’est-ce que tu attends de moi ? Je préfère qu’on soit clair, on va sauter à pieds joints dans les emmerdes.

— Tu n’imagines pas tout le bordel que j’ai déjà accumulé en presque dix de métier… Je me promène dans la tête de mes « patients », qu’est-ce qui pourrait être pire que ça ? rétorqua Alan. Pour le moment, je cherche quelqu’un qui oserait s’attaquer au système informatique de la HDC. Je veux récupérer la véritable version de mon dossier car je sens qu’il me donnera de vraies réponses. Quitte à s’envoyer à l’échafaud, autant en faire le plus possible avant d’y arriver.

Hugo devint à nouveau pensif, mais ce poing écrasé sur sa joue, cette ride sur son front et ce regard perdu lui rappelait le bosseur qu’était son ami. Il réfléchissait pour trouver la meilleure option. Hugo se redressa en lui indiquant :

— Les hackers, ça ne court pas les rues et ceux qui accepteraient de s’attaquer à la HDC encore moins. Et même si j’en déniche un, attends-toi que ça te coute une fortune… Enfin, j’imagine que ça, c’est pas un problème.

— Effectivement et ça fait même deux ans que j’investis dans la crypto pour le jour où je pourrais en avoir besoin.

— Tu envisages ça depuis aussi longtemps ? remarqua-t-il avec dépit. Je connais peut-être quelqu’un qui pourrait répondre à tes critères, mais je crois qu’il n’est pas en Allemagne en ce moment. Je vais m’occuper de ça.

— Hugo, es-tu vraiment sûr de vouloir t’embarquer dans mes conneries ?

— T’es mon pote et bien plus à mes yeux. Ce n’est pas les premières ni les dernières qu’on fera. Je te suivrais jusqu’au bout ! Moi aussi je veux voir la face cachée de ceux qui deviennent de plus en plus influents. T’imagines la bombe médiatique que je pourrais lancer si vraiment nos suspicions sont avérées ?

— Tu perds pas le nord toi, ricana Alan. Dans le doute, il vaut mieux prévoir une manière de discuter du sujet sans se faire remarquer.

— Ouais… Je te propose un truc. On peut très bien interpréter les messages qu’on s’envoie vu qu’on se connait bien. Si l’on fait une faute de frappe dans les trois premiers mots, la suite de la conversation est à décoder. Puis on clôt le sujet en faisant pareil. On parle jamais explicitement comme ça. Je faisais ça avec quelqu’un à l’époque et ça marchait assez bien.

— Je vois… Au pire, si on arrive pas à se comprendre, on pourra toujours se retrouver de temps à autre.

— Oui aussi. Je me charge de trouver quelqu’un de fiable, mais ça me prendra du temps, avertit-il.

— C’est pas un problème, j’attends bien le bon moment depuis deux ans.

— C’est pas faux… Je t’ai déjà dit que ta patience était flippante ?

— Ouais, quelques fois, confirma-t-il en riant. Tu veux trainer en ville ?

— C’est parti !

Alan récupéra son téléphone pour commander aussitôt un VTC. Il n’avait pas besoin de faire des propositions, il savait à l’avance où ils allaient se rendre. Il y avait un bar à Gendarmenmarkt qu’ils adoraient tous les deux depuis de nombreuses années et où ils allaient pour se changer les idées. Avec tout ce qu’il venait de se dire et les décisions qui en avaient découlé, ils pouvaient bien prendre un temps d’insouciance.

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