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Carmina-Xu
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41

La moiteur de l’air surprit Alan en sortant du restaurant. L’écart de température entre l’extérieur et l’établissement était encore étouffant. Pourtant, il était vingt-trois heures passées. Profiter de la fraicheur qu’offrait les bâtiments du quartier de Grunerstrab était une fausse bonne idée. Il ne prit pas la peine de vérifier, mais il était prêt à parier qu’il faisait toujours plus de vingt-cinq degrés. Cela n’avait plus rien de surprenant pour une fin de mois de juillet en 2047 et le temps allait probablement tourner à l’orage d’ici quelques heures.

Il assura un bon appui sur sa canne tandis qu’Ayana lui attrapa le bras en s’amusant. Un grand sourire lui fendit le visage en la regardant. Sa belle fleur dont la robe tulipe blanche contrastait avec sa peau sombre lui offrait du baume au cœur. Elle avait vraiment réussi à transformer ce jour particulier en quelque chose de bien… Il contracta les muscles en riant à son tour pour la retenir après qu’elle fit un pas légèrement chancelant. « Ne pas finir cette bouteille serait du gâchis », avait-elle insisté. Pourtant elle savait que le vin pouvait être traite. Il suspectait plutôt qu’elle avait voulu l’empêcher de trop boire pour qu’il puisse garder son équilibre. Ayana s’accrocha fermement à lui en le tirant pour le forcer à baisser son visage au niveau du sien. Elle fronça des yeux en prenant un air soupçonneux dans sa question :

— Qu’est-ce qui te fait rire comme ça ?

— J’ai pas le droit d’être heureux pour mes trente-sept ans ? renvoya-t-il avec une honnêteté débridée.

Ça, il ne pouvait pas le nier. Le 23 juillet n’était plus synonyme de honte. Chaque année, fêter son anniversaire devenait de plus en plus acceptable et, de surcroit, agréable pour lui. Ayana lui avait offert un restaurant français particulièrement réputé même si son pays natal était loin d’avoir la cote en Allemagne. Bien sûr, il s’était moqué du code vestimentaire et avait commis l’affront de venir en jeans et t-shirt. À vrai dire, Ayana ne l’avait pas prévenu qu’il y en avait un. Cela dit, le gérant n’avait pas émis le moindre commentaire lorsqu’ils avaient présenté leur pièce d’identité pour la réservation. Recevoir deux Passeurs dans son établissement pouvait bien constituer un motif pour fermer les yeux à ce sujet. Quand il y pensait, cela n’avait rien de surprenant. Sa femme s’écarta pour se mettre en face de lui et s’étonna faussement :

— Ah ? Je croyais que c’était parce que tu as découvert que les serveurs ne parlaient pas un mot de français malgré leur jolie phrase !

— Non mais c’est vrai ! Tu fais pas semblant de parler français si ce que tu dis n’a pas de sens ! C’est comme si j’alignais les mots que je connais dans ta langue sans réfléchir !

— Au moins, le patron l’est vraiment !

— Mais il est Parisien, ronchonna-t-il faussement.

— Pourquoi faire la différence ? demanda-t-elle d’un air perplexe.

— Marseillais et Parisien, ça ne fait pas bon ménage… Enfin, j’imagine qu’on est plus vraiment français tous les deux vu qu’on vit à Berlin depuis plusieurs dizaines d’années. N’empêche, je lui aurais bien acheté sa cave, il possède les autorisations d’importation !

— Pourquoi ça ne m’étonne plus ?

Alan leva les yeux au ciel en riant encore une fois. Quoi ? C’était vrai ! Il arrivait plus à obtenir les accords sans forcer et quand il y parvenait, la qualité n’était plus au rendez-vous pour un prix gonflé ! Le restaurateur avait bien plus de chance étant donné que c’était ses affaires.

En regardant Ayana sortir son téléphone et s’attarder dessus, il tira de sa poche son étui à cigarette. Il avait bien le temps de fumer puisqu’elle était en train de réserver un taxi. En plus, ça le travaillait, mais il prenait son mal en patience depuis un moment. À peine après l’avoir allumée, il vit Ayana légèrement retrousser les narines avant qu’elle ne commente sans détour :

— Tu vas puer dans le taxi ! Tu aurais pu attendre !

— Quoi ? Tu préfères que je pue à l’appart’ ? s’offusqua-t-il faussement avec moquerie. T’es pas cool si tu me fais dormir sur le canapé juste pour ça ! C’est mon anniversaire en plus !

— Ça n’arrangerait pas nos affaires, glissa-t-elle comme si le sous-entendu n’était pas énorme. Rappelle-toi ce que tu m’as promis !

— Je sais, je sais… Regardes, je ne fume plus que cinq cigarettes alors que j’étais arrivé à un paquet par jour ! C’est mieux que d’arrêter net.

Son argument sembla assez solide pour qu’elle n’insiste pas. Ce n’était pas comme s’il ne faisait rien pour y parvenir. Alan reporta son attention à la rue. Elle n’était pas bondée, mais il y avait tout de même un peu de passage. En prenant plus d’appui sur sa canne, il aspira une nouvelle bouffée. Il remarqua aussi la circulation était faible et pourtant, il entendait une voiture arriver à pleine vitesse au loin. Un type allait débouler comme un chauffard sans l’ombre d’un doute… Ce n’était pas rare, même dans le quartier où ils habitaient. Il y avait des abrutis partout.

Alors qu’il regardait Ayana ranger son téléphone dans son sac, le vrombissement qu’il percevait devint si proche qu’il eut l’impression que son appareil saturait. Ce n’était pas une voiture, finit-il par comprendre en ajustant le niveau de sensibilité de sa prothèse. Qui pouvait bien rouler comme un taré en plein Berlin ? Le moteur qui hurlait se rapprochait de plus en plus. Autour de lui, il vit l’inquiétude naitre en même temps que les quelques personnes présentes préféraient s’écarter le plus du bord de la chaussée. C’était non sans lui rappeler des événements qui avaient secoué le pays quelques années plus tôt.

Soudainement, un violent crissement de pneus retentit. Alan resta un instant incompréhensif en découvrant un massif fourgon noir piler devant eux. Le temps sembla s’arrêter, mis en suspens jusqu’à ce que la porte latérale s’ouvre avec fracas. Il se figea alors que sa cigarette lui tomba des doigts. Il avait déjà vu ça de nombreuses fois à Marseille. Ses mots fusèrent d’une traite :

— Ayana, retourne dans le restau…

— Quoi ?

Des hommes cagoulés descendirent du véhicule en se dirigeant vers eux. Un vent de panique secoua Alan de tout son corps. Ils venaient pour eux ! Il se plaça immédiatement devant Ayana pour la protéger tandis que six individus se pressaient vers eux. En écartant assez les pieds pour obtenir un meilleur appui, il attrapa sa canne pour pouvoir utiliser sa poignée en titane à titre d’arme. Il n’allait avoir aucun remords à s’en servir et défendre Ayana ! Il hurla avec bien plus de force :

—  Retourne dans le restau, maintenant !

Les quelques hommes prirent position pour limiter le plus possible leur fuite. De toute évidence, ces gars-là savaient très bien ce qu’ils faisaient. Alan avait osé espérer que ce genre de chose ne leur arriverait jamais, mais c’était trop beau… Il ignorait s’il était celui qui en avait le plus conscience, mais les Passeurs constituaient des cibles de choix pour le Méridien. Autant dire que le regroupement criminel qui émergeait s’efforçait à salement faire entendre son avis contre les Dreamers. Alors qu’il leva son arme improvisée vers leurs agresseurs qui fonçait sur eux, il répéta encore une fois à Ayana qui paraissait tétanisé par la situation :

— Aya’ ! Retourne à l’intérieur !

— Al’…

— Fui ! Je veux pas te perdre ! Casse-toi là ! hurla-t-il avec désespoir.

Il balança de droite à gauche sa canne avant de frapper de toutes ses forces le premier qui arrivait dans son allonge. Alan déploya d’autant plus de force en comprenant que sa cible, ce n’était pas lui, mais Ayana. Le choc de la poignée contre le genou de son agresseur lui fit vibrer le bras tandis qu’il crut entendre un sale craquement. Il profita du recul et de son léger déséquilibre pour renvoyer son arme dans le nez d’un deuxième. Dans son dos, il discerna enfin les talons de sa femme claquer avec précipitation sur le pavé alors qu’elle appelait à l’aide. Ça le rassurait et s’il pouvait encore vraiment se battre, ce serait maintenant qu’il donnerait tout ! Son attention demeura focalisée sur les hommes restants. Lui, debout, personne ne passera ! En revanche, c’était sa peau qu’il devait sauver à présent !

Alan se mit à rire nerveusement en voyant les quatre autres foncer sur lui. L’un d’entre eux sembla marquer un arrêt en l’entendant, mais se reprit aussitôt. D’un côté, il préférait ça. Ils oubliaient sa femme. Il comptait bien en amocher le plus possible ! Même s’il ne savait pas comment il allait pouvoir s’en sortir… Au moins, il en avait déjà calmé deux. Il glissa à nouveau les pieds pour retrouver un appui stable, comme il l’avait si bien appris au judo. En se privant de sa canne, il renonçait à tout déplacement. Il pouvait faire trois mètres avant de tomber tout au plus. Néanmoins, avec l’agitation, il se montrait plutôt pessimiste. La moindre chute allait lui couter cher.

Il balança encore une fois sa masse improvisée pour l’envoyer dans la tête du plus proche. Malheureusement, son agresseur anticipa et attrapa sa canne pour violemment la tirer, puis la jeter plus loin. Alan fit un pas en avant, contraint de la lâcher pour ne pas suivre le mouvement et tomber. Ça ne le priva pas de sa pugnacité pour autant. Son poing s’écrasa dans la gorge de l’homme en guise de réponse alors qu’il se trouvait maintenant à portée. Celui-ci recula en s’étouffant et toussant. Des injures volèrent. Alan se mit à rire de plus belle. Des Espagnols…

Son pied sembla se poser sur une surface molle. Sa jambe vacilla en même temps qu’il sentit son corps entier pencher sur la droite. Non, non, non ! Inévitablement, sa stabilité se troubla et il chuta… Contre toute attente, des bras s’enroulèrent autour de ses épaules pour le retenir et le tirer de force vers le fourgon. C’était hors de question qu’il se laisse embarquer même s’il avait perdu son équilibre ! Au diable les vertiges ! Alan prit assez d’élan pour renvoyer d’un coup sa tête en arrière et percuter celui qui le tenait.

L’homme accusa le choc en tombant à la renverse, mais il ne le lâcha pas pour autant. Alors qu’il l’entrainait dans sa chute, Alan en vit un arriver tandis que sa vision perdait toute stabilité avec le coup qu’il venait de donner. Il tenta de repousser du pied un nouvel agresseur quand il remarqua qu’il tenait quelque chose dans les mains. Son talon s’écrasa sur son thorax en même temps qu’il sentit la pression d’un objet.

Une violente et terrible douleur naquit contre ses côtes avant de se répandre dans tout son corps avec fulgurance. Alan se tétanisa, seul un grognement gémissant sortit de sa gorge tout autant paralysée. Les secondes devinrent une éternité face à cette force qui irradiait sa chair. Elle s’arrêta tout aussi brutalement qu’elle avait commencé, mais il resta secouer par des spasmes. Malgré sa rigidité, les individus le soulevèrent sans peine. Ses membres ne répondaient plus et son esprit partait au fur et à mesure qu’il se faisait secouer jusqu’au fourgon. Son regard se voila alors qu’il comprenait qu’il était perdu. Pourquoi personne ne réagissait ? Pourquoi tout le monde ignorait ? Pourquoi… Une sorte de sac lui arriva sur la tête avant que tout s’éteigne.

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