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Carmina-Xu
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33

En fin de journée, Alan était affalé sur son canapé, ordinateur sur les jambes pour regarder les associations sportives dont Hugo lui avait parlé dans l’après-midi. Certaines pourraient lui plaire et être adaptées à ses contraintes. Il se renseignait, mais définitivement, c’était les arts martiaux qu’il voulait. Il commençait à sentir ce manque, il devait trouver quelque chose pour se défouler et évacuer. Cependant, c’était une bonne distraction pour attendre Ayana qui s’était terrée dans le dressing pour paramétrer la penderie avec tout ce qu’elle avait acheté… Autant dire qu’elle en avait encore pour un petit moment et qu’en plus, il allait passer un temps fou à retrouver ses profils parmi les siens demain.

Son téléphone se mit à sonner à côté de lui et lorsqu’il vérifia, il fronça les sourcils en prenant un air sceptique. C’était samedi, dix-huit heures trente, et un numéro français appelait sur sa ligne professionnelle ? Qui avait bien pu l’obtenir ? Ça ne pouvait pas être Pablo ni sa société pour une urgence. En plus, ce dernier se trouvait encore en haute mer et lui signalait toujours ses retours. Il prit l’appel après quelques sonneries et répondit directement en français, autant en avoir le cœur net :

— Allô ?

— Alan Ribes et Ayana Bathily, Bölschestraße 126, 12587 Berlin, Allemagne.

Alan se décomposa. C’était son adresse complète qu’on venait de lui donner. Pire, il reconnaissait cette voix même s’il ne l’avait pas entendu depuis près de quinze ans, cet accent chantant espagnol marqué par plusieurs décennies de tabagisme… Les mots fusèrent presque avec désespoir :

— Putain de merde…

— Je vois que j’ai capté ton attention et tu n’as pas intérêt à me raccrocher au nez mon cher fils.

— Alan, rectifia-t-il sèchement en se ressaisissant. Utilise pas des mots dont tu ne connais pas le sens Marika !

— Quel accueil pour une mère qui prendre des nouvelles de son enfant à l’étranger ?

— Te fous pas de ma gueule ! Tu me dévissais la tête à chaque fois que j’osais t’appeler comme ça ! Et puis quoi ? Quinze ans après ? Ce que je vois, c’est surtout des emmerdes arriver à des kilomètres avec toi !

— Alan ? appela Ayana derrière lui d’un air soucieux.

Il lui mima de rester silencieuse en lui accordant un signe du doigt. Il devait tirer une de ces têtes quand il découvrit son expression basculer vers l’inquiétude en plus de l’avoir entendu son ton. Qui ne serait pas mal en répondant à sa mère abusive ? Alan écarta son téléphone de son oreille avec l’intention de raccrocher. Elle avait eu le culot de le recontacter et lui, il ne se méfiait plus après tout ce temps ! Alors qu’il allait appuyer pour couper court à cette mauvaise blague qui pourrait lui faire perdre pied, il entendit :

— Tu te tiens à Ayana n’est-ce pas mon petit Ribes ?

Il resta en suspens dans son geste. Il avait bien compris ? Elle osait menacer sa femme ? En plus, entendre son nom prononcé ainsi le révulsait profondément. Il remit son téléphone à l’oreille, l’angoisse commençait à monter en lui. Marika continua :

— Sache que ton employeur devient réellement gênant. Ton père compte bien remédier au problème.

— Qu’est-ce que ça peut me foutre ? Je n’ai qu’à les alerter !

— Que tu es naïf. À ton avis, quel est le meilleur moyen pour frapper la HDC ? Toucher à leurs Passeurs. Quelle belle ironie que tu en fasses partie et qu’en plus que tu te trouves avec Bathily !

— T’es qu’une tarée Marika. Maintenant que tu nous as menacés, je n’ai plus qu’à porter plainte.

— Pour ça, il faudrait que « Marika Handez » existe encore. Je suis une fantôme depuis que tu as lâchement fui.

Alan devint muet. « Fantôme »… Ces personnes qui n’existent plus aux yeux du monde… Il savait à quel point elle pouvait manipuler les institutions en plus de son trafique. Malgré plusieurs signalements de la part de Pablo et des hôpitaux, les services sociaux n’étaient jamais intervenus. Sa demande d’émancipation avait échoué pour des raisons obscures… Elle pouvait mettre en l’air la vie qu’il avait obtenue loin d’elle. Peur. Il avait toujours autant peur d’elle, même s’il montrait les crocs. Comme si Marika avait entendu ses pensées, elle enfonça davantage le clou :

— Je compte bien rejoindre l’Allemagne. Tes origines vont finir par te rattraper petit Ribes… Quel dommage alors que tu as fait tant d’effort pour fuir ! Je me demande quelle tête va tirer ton père quand il découvrira la tienne, déjà qu’il a en horreur qu’un Passeur porte…

Alan raccrocha en ne voulant pas entendre la suite. Malgré la présence d’Ayana, son téléphone vola à travers le salon en jurant en français. Il se prit le visage à pleine main en basculant la tête contre le dossier. Putain de merde… Sa femme s’empressa aussitôt de s’installer à côté de lui en s’emparant de ses mains pendant qu’il s’évertuait à retrouver un semblant de sang-froid. Elle lui demanda avec inquiétude :

— Al, qu’est-ce qu’il se passe ? Je ne t’ai jamais vu exploser comme ça ! Entendre « Marika » ne me présage rien de bon…

— Normal, puisque c’était elle que j’avais… J’ai pas pu raccrocher… Je… J’ai.. J’ai besoin de fumer, finit-il par dire correctement.

— Je pense que tu vas aussi devoir m’expliquer plus en détail… Tu ne peux plus laisser cette histoire sous le tapis.

— Je sais, se plaignit-il.

Ayana attrapa sa canne derrière elle et lui tendit lorsqu’il se glissa au bord de l’assise du canapé. Il se sortit d’avance une cigarette et son briquet avant de rejoindre le balcon. Il s’accouda à la rambarde après l’avoir allumée et se gratta nerveusement le crâne. Pourquoi maintenant ? Il prit son courage à deux mains et après avoir soufflé sa fumée, il résuma :

— L’appel venait de France sur ma ligne professionnelle. Ça fait si longtemps que je ne me suis pas vraiment méfié alors que j’avais deviné que ça ne pouvait pas être Pablo ou sa société. Par acquit de conscience, j’ai quand même décroché. Marika… Elle sait exactement où nous habitons et m’a fait deux menaces, celle de briser la vie que j’ai reconstruite ici et la seconde pour la HDC. Le pire c’est qu’elle en est capable.

— On n’a qu’à porter plainte pour obtenir une protection supplémentaire et avertir la HDC…

— Ça ne servira à rien, elle l’a déjà envisagée. Les autorités et la justice ne peuvent rien faire contre un fantôme. Elle n’existe plus depuis longtemps. Marika est terriblement intelligente et c’est ce qui la rend dangereuse à mes yeux.

— Al’, appela Ayana après un silence. Dis-moi pourquoi tu es arrivé à éprouver de tels sentiments envers elle…

— Comment peut-on apprécier une personne qui te maltraitait tous les jours ? Qui, pour tes dix ans, te lance que si elle n’avait pas fait un déni de grossesse, tu n’aurais jamais existé ? Si j’étais né sous x, mon enfance aurait certainement été un peu meilleure… Mais non, c’était sans compter sa folie. Elle a préféré me garder et faire de faux papiers pour que je porte ce maudit nom… Marika parvenait à esquiver tous les rapports et l’intervention des services sociaux et je pense qu’elle a même saboté ma demande d’émancipation. Pablo voulait me sortir de là, mais son mode de vie ne permettait pas que je passe sous sa tutelle.

— Attends, tu es en train de sous entre que ton nom… C’est ce « Ribes » ?

— Oui, avoua-t-il honteusement. Je me doutais qu’en travaillant dans le milieu judiciaire, tu le connaitrais, mais j’espérais ne jamais te le confirmer… Je ne connais pas mon père, mais ce nom m’a pourri la vie en France. À Marseille, tout le monde sait et un bon nombre de trafiquants ont tenté de m’utiliser pour leur affaire.

Ayana passa doucement les doigts dans ses cheveux et posa la tête contre son épaule en restant silencieuse. Son contact et son écoute l’apaisèrent un peu. Il n’avait pas l’intention de parler du calvaire qu’il avait vécu. Cependant, avouer que c’était plus noir qu’il ne l’avait bien voulut dire le soulageait. Jusqu’à son arrivée Allemagne, sa vie n’était qu’un cauchemar qu’il tentait d’effacer… Il continua :

— C’était souvent Fatima qui s’occupait de moi quand elle le pouvait malgré ses cinq garçons. Puis un peu avant mes dix-huit ans, la HDC m’a repéré après des prétests. Monsieur Polen a même fait le déplacement jusqu’à Paris pour approfondir. Il voulait que je devienne un Passeur et pour ça, il a tout fait. Il m’a trouvé une école, des bourses et des aides, un logement en colocation où j’ai rencontré Hugo… J’ai quitté la France le jour de ma majorité en prévenant du jour au lendemain Pablo, sans le moindre bagage et regret. Marika ne m’a jamais cherché… Et maintenant, elle réapparait ? pesta-t-il en éteignant sa cigarette.

— Elle a réussi à obtenir ton numéro grâce à Pablo ?

— Impossible, contredit-il aussitôt. Il n’a que ma ligne privée et il n’aime pas sa sœur. Pour reprendre ses mots, il va lui rendre visite de temps en temps pour vérifier si elle est encore vivante. Mon oncle a découvert que j’existais quand j’avais huit ans, parce qu’on s’est retrouvé par hasard l’un face à l’autre. Je suis qu’un gamin torturé qui explore des rêves qui le sont tout autant, commenta-t-il avec douleur.

Ayana le tira doucement pour retourner à l’intérieur avant de l’enlacer. La chaleur de son étreinte le réconfortait et il appréciait le silence dont elle faisait preuve face à ses confessions. Elle ne cherchait pas à en savoir plus que ce qu’il disait. Il se sentait toujours autant angoisser. L’ombre de Marika et pire, celle de son père, planait au-dessus de lui et le terrifiait profondément. L’avouer était impensable. Il l’embrassa longuement pour chasser ses craintes et lui proposa :

— Je vais cuisiner. Je crois qu’il y a ce qu’il faut au frigo pour un hachis parmentier.

— Je te suis !

Alan étira un léger sourire devant l’enthousiasme d’Ayana. Elle semblait si innocente lorsqu’elle réagissait ainsi, mais il savait aussi qu’elle s’efforçait à lui changer les idées. Cela dit, elle aimait cuisiner avec lui. Ses colocataires l’avaient tous poussé à apprendre et partager cette partie de sa culture et il ne le regrettait pas. Il n’avait pas toujours mangé correctement et encore moins à sa faim par le passé… Il se retint de secouer la tête pour chasser ses réflexions afin de ne pas créer un vertige. Il devait juste à nouveau étouffer cette histoire au fond de lui comme il le faisait constamment.  

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