Alan jeta un œil à sa montre lorsqu’il sortit de l’ascenseur : huit heures dix. Il était en avance pour la réunion au siège prévu avant son immersion. Cependant, il resta étonné de voir autant de monde dans le hall d’accueil. Ça le laissait sceptique sur ce qui allait suivre. Un agent vint à sa rencontre pour vérifier son identité et ses autorisations. Après avoir présenté son badge ainsi que le document sur sa tablette, il se plaça en retrait. Il avait affreusement mal dormi à cause de sa précédente immersion et il préférait s’effacer face aux gens de plus en plus nombreux. Il sentait qu’il allait en baver, les conditions ne s’annonçaient pas favorables aujourd’hui.
Il observa ce qu’il se passait autour de lui en plus d’écouter ce qui parvenait jusqu’à ses oreilles. Une évidence lui vint, ce dossier se révélait bien plus sensible qu’il ne l’avait supposé. La sécurité à l’étage était élevée, toute personne qui arrivait était contrôlée comme lui. Il pensait même discerner quelques agents de police en civil. Ayana lui avait déjà expliqué comment ce genre d’affaires se déroulait en amont, mais là, ça lui paraissait bien plus important. Il sortit et reporta son attention sur sa tablette. Peut-être qu’il pouvait déceler quelques informations supplémentaires en lisant entre les lignes dans le dossier. En tout cas, ce sera mieux que saturer son esprit en analysant tout autour de lui. Malheureusement, après plusieurs minutes, il admit en masquant son dépit qu’il ne pourrait rien tirer de plus.
L’ascenseur attira à nouveau son regard. Plusieurs personnes en sortir et il devina sans peine qu’il s’agissait d’une grande ponte de la police et de quelques agents de sécurité. La démarche de l’homme était assurée et il menait les autres. Sa carrure jumelée au sérieux de son visage lui donnait un air strict, le genre de personne avec qui il fallait bien choisir ses mots. En comprenant qu’il venait à sa rencontre, il rangea son outil. Il s’enquit aussitôt en lui tendant une main :
— Vous êtes le Passeur Alan Ribes ?
— Oui, confirma-t-il en la lui serrant. Vous êtes ?
— Inspecteur Marius Bernam du BKA. J’ai été mandaté par Europol pour cette affaire.
— Ravi de faire votre connaissance… Et de mettre un visage à votre nom.
— Vous avez déjà entendu parler de moi ? demanda-t-il avec suspicion.
— Effectivement. Madame Bathily vous a mentionné une fois. Je retiens très bien tout ce qui arrive à mes oreilles.
— Ah, Ayana ! C’est vrai que nous avons travaillé plusieurs fois ensemble. Pour être franc, j’aurais aimé m’associer à elle à nouveau… Sans vouloir remettre en cause vos compétences.
— Il n’y a pas de mal, j’admets moi aussi que ses capacités seraient plus adaptées pour ce dossier. Malheureusement, elle se trouve aux États-Unis. Monsieur Polen a jugé que je pouvais intervenir même si ce n’est pas le type d’affaire que je traite généralement… Inspecteur, puis-je vous poser une question ? reprit Alan en fronçant un peu les sourcils face à ce qu’il apercevait.
— Allez-y.
— Avez-vous un quelconque préjugé à mon égard hors cadre de ma fonction ? Je sais très bien reconnaitre une personne méfiante. Nous allons travailler ensemble et je souhaiterais que cela se fasse dans de bonnes conditions.
— J’oublie parfois la capacité d’observation des Passeurs… Surtout celle liée à votre spécialisation. J’imagine qu’il y a prescription depuis que vous êtes un haut cadre à la HDC… Vous devez bien vous douter que votre nom a attiré notre attention lors de votre arrivée en Allemagne.
Alan s’assombrit. Jusqu’à aujourd’hui, il avait préféré naïvement croire que ce bagage gênant n’avait pas passé la frontière avec lui. Pendant longtemps, prononcer « Ribes » avait représenté un calvaire. Du moins, jusqu’à ce que la HDC lui offre un nouveau sens. Il prit un air dépité. C’était vrai que lui rappeler cette histoire ne pouvait pas le laisser indifférent, mais le moment était mal choisi. Marius changea aussitôt le sujet comme s’il n’avait rien dit en lui permettant de retrouver sa façade neutre :
— Savez-vous si Monsieur Polen sera présent ?
— Je n’ai pas eu d’informations à ce sujet, mais il m’a semblé comprendre qu’il souhaitait suivre cette affaire de près. Je suppose qu’il passera. Peut-être que son assistante… Ah ! La voilà justement, indiqua-t-il en apercevant Abigaïl sortir de l’ascenseur.
Ils la regardèrent venir à eux et elle se présenta en bonne et due forme à l’inspecteur. Puis informa, à titre exceptionnel, qu’elle allait animer la réunion ce matin. Il s’étonna, c’était peut-être bien la première fois qu’elle s’en occupait quand ce n’était pas Simon quand ça concernait des dossiers aussi importants. Les coordinateurs assuraient ce rôle, c’était leur métier. La jeune femme confirma à monsieur Bernam que le PDG passera pour faire le point dès qu’il pourra se libérer. Il ne possédait pas encore tous les détails, mais pour que Simon se déplace en personne dès que possible… Son regard s’attarda sur Abigaïl. Rien ne laissait transparaitre son sale caractère ou même l’accrochage qu’il avait eu au téléphone avec elle. Cependant, elle lui rappela :
— Monsieur Ribes, comme je vous l’ai indiquée hier, vous avez accès à l’Amplificateur dès que vous en aurez besoin. Ce ne sera pas nécessaire de me notifier, mais je vous informerai quand la maintenance sera terminée.
— Est-ce qu’il possède toutes les autorisations ? demanda Marius. L’immersion risque de durer un moment et j’aimerais ne pas perdre de temps à cause de l’administratif.
— Oui, toutes les dérogations sont validées et ajoutées au dossier. Monsieur Ribes détient également les certifications pour la machine, il sera plus rapide que les opérateurs pour la programmer. Je vais vous transmettre une mise à jour majeure des documents, lui indiqua-t-il directement. Veuillez en prendre connaissance avant que l’on commence.
Alan sortit sa tablette sans attendre. C’était la bienvenue d’obtenir plus d’informations sur l’immersion qu’il allait mener. Quand le transfert de fichiers se termina, Abigaïl invita Marius dans une salle de réunion pour discuter de quelques détails avant de débuter. Il ouvrit le document en prenant soin que personne ne puisse jeter un œil dessus. Il remarqua immédiatement que l’ordre d’intervention s’était étoffé et que certaines mentions censurées avaient disparu. Il se concentra dans sa lecture :
Robert Prévost
Française
68 ans
Clinique privée, groupe HDC – Berlin, Allemagne
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Victime et survivant d’une violente sortie route sur une voie rapide sans limitation de vitesse. L’expertise menée par les forces de l’ordre a révélé un certain nombre d’impacts de balles du côté conducteur.
La cause de l’accident demeure pour le moment inconnue. Après investigation, la piste criminelle a été retenue et l’auteur, surnommé Nightmare, identifié grâce aux vidéos de surveillances. Europol et Interpol ont émis une demande d’immersion spécifique auprès du gouvernement allemand et de la HDC Europe qui a été validé avec intervention immédiate.
L’état du patient a été stabilisé en coma artificiel, puis ajusté en paradoxal dans le cadre de l’immersion à venir.
aucune donnée connue.
Recherche d’identité et tout élément pouvant permettre la reconnaissance du criminel. Toutes informations liées à l’accident et la raison pour laquelle la victime a pu être pris pour cible.
Intervention urgente avant dégradation totale de la phase paradoxale. D’après les premiers examens, la phase de déstructuration est enclenchée.
Compte rendu expertise médicale
Des sédatifs neuronaux ont été prescript au patient pour ralentir significativement la phase de déstructuration.
D’après les analyses du spectre paradoxal, la défense du rêve semble déjà éteinte, les différents stimulus menés n’ont pas produit de variation dans les résultats de l’examen. Il n’y a plus de traces d’activité suffisamment importante liée à la création pure, seuls des souvenirs peuvent prendre forme et sont fragiles. Un risque accru de résonance et distorsion a été détecté. Les mesures n’ont pas permis à déterminer leur intensité, elles sont trop fluctuantes. L’immersion à travers les niveaux est potentiellement instable, il est déconseillé d’accéder au 5. Les Méandres peuvent absorber cet ensemble du rêve à cause de la déstructuration.
niveau 5
Alan fronça des sourcils. C’était confirmé, il allait en baver. Son immersion d’hier devenait comparable à une promenade de santé vu les données qu’il avait sous les yeux. La section « situation actuelle » qui ne comportait plus aucune censure le fit déglutir avec difficulté : Nigthmare. Encore lui. Cette fois, son intervention le visait clairement. Il leva le regard pour observer tous les agents qui patientaient. Il était le seul à savoir que monsieur Wang avait eu affaire à lui ? Une autre question lui vint en y repensant : « lequel » ? Il verra bien ce qui sera dit durant la réunion. Néanmoins, la profession restait inconnue. C’était un petit détail qui lui déplaisait. Cependant, le compte rendu résumé se révélait intéressant à lire. L’analyse du spectre paradoxal qu’avait créé madame Edren, la PDG de la branche sibérienne, s’avérait tout bonnement fabuleuse. Ça lui permettait de savoir à quoi s’attendre pour des immersions complexes comme celle-ci.
Il demeura sceptique, les données se contredisaient. Quelque chose n’allait pas. Définitivement, il n’arrêtait pas de se faire la remarque depuis hier. Il ferait peut-être mieux de s’accorder quelques vacances après ça et prendre du temps pour se remettre les idées en place. Tout de même… Posséder l’autorisation pour le niveau cinq et le compte rendu qui indique qu’il ne doit pas être atteint ? Peut-être une coquille restée au moment de la mise à jour, les informations avaient circulé trop vite. C’était déjà arrivé.
Il devint pensif au sujet des Méandres, « l’Âme », comme son intuition le nommait. C’était la seule partie d’un songe qui demeurait inconnu. C’était à cause de cet état que les comas paradoxaux existaient, remplacer une réalité par une autre… Et mortel pour un Passeur qui se faisait happer par celle-ci. Comme quoi, les esprits se connectaient durant un rêve. À ce jour, la HDC prenait ces victimes en charge, mais aucune rémission n’avait été observée. Alan se demandait si un jour un Passeur allait développer une variance qui permettrait de les explorer, après tout, rien ne semblait indiquer que c’était impossible.
Il entendit Abigaïl revenir en annonçant à toutes les personnes qui attendaient comme lui que la réunion allait débuter. Il suivit le mouvement et alla prendre place dans la vaste pièce. Ils étaient une quinzaine, estima-t-il en s’installant. Jusqu’à aujourd’hui, il n’avait pas assisté à des concertations avec autant de monde pour une immersion. De plus, Abigaïl avait également bien choisi sa salle. Cette dernière venait d’encastrer sa tablette sur un socle disposé à son bureau. Dès que les deux appareils se connectèrent, la grande baie vitrée derrière elle se teinta en devenant un écran. Son interface s’afficha et elle lança plusieurs fichiers. Les PDG de la HDC étaient vraiment des génies pour penser et créer de tels dispositifs, ça l’épatait toujours. Elle ouvrit un document qui reprenait l’ensemble des informations du patient, puis débuta sa présentation :
— Monsieur Robert Prévost est un militaire gradé de l’armée de terre française. Au moment des faits, il est retraité, mais restait très actif. Il est devenu conseillé stratégique en sécurité à l’échelle européenne, notamment pour le gouvernement allemand, malgré la crise existante. Pour des raisons de confidentialité, le BKA et la HDC n’ont pu obtenir aucune information au sujet des missions qu’il traitait…
Alan redressa la tête. Quoi ? Un militaire ? Mais quelle horreur… D’office, il s’attendait à une immersion infernale. Définitivement, il demandera congé après cette affaire. C’était donc pour cette raison que sa profession était restée censuré dans les documents qu’on lui avait confiés. Cet homme était forcément un haut gradé.
Il se retint de souffler son agacement. En survolant les données affichées, il découvrit une nouvelle incohérence avec son dossier. Celui d’Abigaïl était référencé « n1896ac », soit Affaire Criminelle. Le sien se nommait toujours « n006x ». Il ne supportait pas cette femme, mais il ne pouvait qu’attester la qualité de son travail. Même pour des petits détails comme ceux-ci, elle n’en manquait pas un. C’était surprenant de sa part. Il allait lui en parler après la réunion. Marius prit le relai en complétant avec les informations qu’il possédait :
— Europol a été saisie après que les premiers constats au sujet de l’accident ont été révélés. En effet, la piste criminelle a très vite été considérée étant donné le nombre d’impacts de balle identifié sur les restes de la carrosserie du côté conducteur. Son autopsie a dévoilé que c’est un tir à bout pourtant qui l’a tué et non l’accident. Nous avons déterminé qu’il s’agissait de Nightmare grâce à la vidéosurveillance de l’autobahn. Ce criminel de classe international sévit depuis au moins quinze ans un peu partout dans le monde. Cependant, notre homme a encore fait les choses avec un timing pour le moins impressionnant… Il est passé à l’action pour provoquer l’accident sur une distance de cent-trente mètres que les caméras ne couvraient pas. Et ceci, lancé à plus de deux-cents kilomètres par heure… Nous ne possédons pas la suite des événements, car la sortie de route nous a privés de vision. Nous savons juste qu’il a quitté les lieux douze minutes après.
Alan releva un sourcil. Donc, dans les faits, il était celui qui en savait le plus sur ce criminel ? Les autorités le traquaient sur tout le globe en pensant vraiment qu’il s’agissait d’une seule et unique personne ? Comment ce groupe faisait-il pour à ce point duper tout le monde ? S’il y avait bien une chose qu’il pouvait reprocher à son travail, c’était de parfois connaitre des détails capitaux, mais que son silence professionnel bâillonnait. Pourtant, la HDC savait tout. Sa mémoire et ses secrets leur appartenaient. Il avait parfaitement conscience de ce fait dès le jour où il avait signé ses contrats.
Marius fit un signe de tête à Abigaïl et elle lança une brève séquence vidéo. Il remarqua un motard bien équipé en noir avec une grosse cylindrée passée à grande vitesse. L’assistante la mit en pause, il avala sa salive fébrilement. En dessous de la visière teintée de son casque, un terrible sourire oni rouge était dessiné. C’était le même homme ou bien un autre ? Il ne saurait dire si ce signe les concernait tous. Marius n’avait pas eu le temps d’expliquer qu’il avait déjà compris. C’était le même que celui d’hier. L’inspecteur continua :
— Nigthmare se met rarement en scène sur les crimes qu’on lui incombe. Cependant, nous avons constaté que ce sourire constitue sa signature. Ça lui permet de se faire identifier en quelque sorte. Nous avons néanmoins trouvé d’autres marques différentes, mais elles font toujours référence à des cauchemars ou des démons. Ce n’est pas à prouver qu’il est expérimenté et qu’il sait très bien duper les technologies de reconnaissance que nous disposons. Cependant, un point reste flou à son sujet. Il semble agir comme un mercenaire et ses cibles sont constamment des hommes politiques, d’influence ou bien des militaires.
Une hypothèse lui vint à l’esprit. Est-ce que toutes ces personnes possédaient un lien quelconque avec ce fameux « projet Dreams » ? Dans le rêve de monsieur Wang, il avait entendu Nightmare le qualifier d’hécatombe dont il était un rescapé. Cette histoire avait une ampleur bien plus grande qu’il le supposait et lui faisait froid dans le dos. Un autre constat lui fit l’effet d’une gifle. Il pouvait devenir la cible de ce criminel par le simple fait qu’il connaissait le nom de ce projet. Le silence, il l’avait toujours gardé, mais là, c’était vital. Pour la première fois de sa carrière, il craignait vraiment l’immersion qu’il devait accomplir. Peur de ce qu’il allait pouvoir trouver et de toutes les conséquences qui allaient en découler. Marius s’adressa directement à lui en indiquant :
— Monsieur Ribes, les priorités concernant votre intervention sont de découvrir comment l’accident s’est exactement produit étant donné qu’il est survenu hors champ de surveillance. De plus, nous visons tout élément pouvant nous permettre d’identifier ce criminel, même une simple main sans gant nous donnerait la possibilité de le démasquer grâce à ses empreintes. Aussi, si vous parvenez à savoir pourquoi Robert Prévost est devenu sa cible, ça ne serait que d’autant plus important pour le dossier.
— Bien que mon domaine d’action soit différent habituellement, je me suis tout de même spécialisé en recherche. Dans les grandes lignes, c’est la démarche que j’envisageais de suivre, approuva Alan. Je ferais tout pour explorer le plus possible. J’ai aussi pris connaissance des nouvelles informations au sujet du patient. Je demande une supervision médicale durant l’immersion, un réveil d’urgence est une sécurité que je ne peux pas négliger. Je possède une expérience avérée, mais le rêve de monsieur Prévost est en pleine dégénérescence. Je garde à l’esprit que c’est une intervention complexe. Ma mémoire risque de saturer si j’encaisse plusieurs résonances de souvenirs. Néanmoins, si je ne parviens pas à établir un rapport à mon retour, l’Amplificateur récupéra toutes les informations que j’aurais emmagasinées inconsciemment.
— Je confirme ses propos, ajouta Abigaïl. Cependant, je vous rappelle que la profondeur autorisée a été revue étant donné les insécurités détectées. Votre limite est le niveau trois.
Alan acquiesça d’un simple signe de tête, le regard de la femme lui intimait de ne poser aucune question à ce sujet. Trois ? Son dossier était pourtant resté à cinq… Elle semblait le savoir… Pourquoi ? Il se frotta les yeux. Mais putain de merde… Quoiqu’il puisse arriver, les directives qui primaient, c’étaient celles de la HDC. Il ne la sentait vraiment pas cette immersion. Il préféra tout de même préciser :
— J’en tiens compte, mais je me dois de rappeler une chose. Étant donné les conditions atypiques que Monsieur Prévost réunit, c’est possible que je m’enfonce contre mon gré. Cela m’est déjà arrivé par le passé. Si cela vient à se produire, j’en assumerai les conséquences.
— Je vois, murmura Marius d’un air pensif. Je comprends le risque, mais ce n’est pas du ressort du BKA si cela se produit.
Alan accorda à nouveau un signe de tête et l’inspecteur continua avec des informations destinées aux autorités présentes. Effectivement, c’était à la HDC de juger s’il outrepassait les limites grâce aux données de l’Amplificateur. Ça lui était déjà arrivé plusieurs fois, et ce, de manière involontaire, mais la société ne lui avait jamais tenu rigueur. Il écouta que d’une oreille en se perdant dans ses réflexions. À qui devait-il se fier ? C’était inédit qu’il se pose réellement la question. D’habitude, sa réponse était toute trouvée : à Simon. Il supposa qu’il allait aviser suivant comment l’immersion allait se dérouler. Pour le moment, il devait surtout se concentrer, construire des barrières pour protéger son esprit. Il avait déjà vu un meurtre la veille sans s’y être préparé. En sachant qu’il allait de nouveau faire face à Nightmare, il devait prendre les mesures nécessaires.
Lorsque la réunion prit fin, il remarqua qu’Abigaïl sortit son téléphone, lu quelques secondes avant de le ranger. Elle semblait soucieuse et ses yeux se posèrent sur lui. Elle vint jusqu’à lui pour l’informer :
— J’ai fait la demande pour le matériel de suivi, mais tout est prêt. Monsieur Polen avait déjà envisagé que vous puissiez en avoir besoin. Je suppose que vous pouvez agir selon vos méthodes. Je ne vous accompagne pas, je dois rester au siège en l’absence du PDG.
— Je me charge de transférer Monsieur Ribes jusqu’à la clinique, indiqua Marius. La mesure de sécurité est peut-être surévaluée, mais je préfère ne prendre aucun risque.
Alan accepta et commença à le suivre, mais il ne se sentait pas à l’aise avec cet homme. Peut-être que le fait qu’il lui avait rappelé la signification de son nom ne jouait pas en sa faveur. Néanmoins, il chassa vite cette réflexion. Son passé devait rester à sa place, loin derrière lui. Il entendit une notification, son portable. Il pensait l’avoir mis en silencieux. Le message qu’il venait de recevoir le laissait perplexe, aussi bien par son expéditeur, Simon Polen, que son contenu. Un mauvais pressentiment naquit :
— J’ai foi en ton silence et tes capacités. N’oublie pas tout ce que tu as accompli.