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JBDelroen
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Chapitre 15.3

Je sursautai, me retournant prestement. Je ne l’avais pas entendu arriver, mais Ruben se tenait là, devant moi, avec un sourire plus que ravi. J’en restai coite de stupeur, le détaillant, afin d’être sûre qu’il s’agisse de la même personne. Ses yeux pétillaient d’excitation et d'extase. Son corps mince et musclé était détendu, ses mains dans les poches. Il en retira une pour remonter ses lunettes sur le nez. Quelque chose clochait.

— Tu admires l’exposition ? J’y ai mis tout mon cœur à la faire. Ça n’a pas été simple, poursuivit-il, mais je crois que le résultat en vaut la peine, non ?

Ce fut comme un déclic. C’était tellement gros que je ne m’en étais pas rendu compte. Il n’empestait pas son infâme eau de Cologne. Non. Il exsudait cette odeur de coriandre, avec une touche de sous-bois. Et je discernais à peine ce soupçon de musc qui flottait autour de lui, enlevant mes derniers doutes. Ruben était un Ebed. Et il avait tout fait pour me le cacher jusqu’à présent. La surprise de ce que je venais de comprendre devait se lire sur mon visage, car il enchaîna :

— Ah, désolé de t’avoir trompée, mais ça partait d'une bonne intention. Je ne voulais pas que tu te sentes menacée quand je me rendais au Ruby’s Trail. C’est tellement rare qu’on ait des petits nouveaux par ici, et les pâtisseries sont vraiment trop délicieuses pour y renoncer, ajouta-t-il d’un ton taquin, me faisant un clin d’œil. Mais Zachariah a dit que tu allais te joindre à nous à la prochaine Pleine Lune, alors…

Je ne cachais plus ma contrariété. En plus de me draguer, selon les dires de Monsieur Bill, il m’avait sciemment trompée, s’amusant à me priver de flair et jouer les humains innocents.

— Et c’était donc préférable de nous griller les synapses à l’eau de Cologne ? Devrais-je être soulagée de ne plus la sentir à des kilomètres à la ronde ? Et comment as-tu fait toi pour la supporter ? lui demandai-je hargneusement, une main sur la hanche.

Il haussa les épaules, détendu.

— Je récoltais une jolie migraine pour mon mauvais tour à chaque fois, mais je n’avais rien de grillé, fit-il, le sourire goguenard collé au visage.

Son attitude puait la supériorité : les omoplates lâches, les muscles de ses avant-bras au repos et ses jambes légèrement écartées. Pour un peu, il marquerait son territoire comme un chien, en m’urinant dessus. Mais je tiquai intérieurement. Alors, comme ça, lui, il conservait son odorat ? Et comment se faisait-il qu’il avait su que le mien ne résisterait pas ?

— D’ailleurs, tu cocottes un peu trop la menthe. Nasrim a décidé de te tourner autour ? Je sentirai presque son musc sur toi. Tu n’as pas trop peur d’empester le mâle dominant ? m’interrogea-t-il sans me laisser le moindre répit.

Il ne portait pas Ishmail dans son cœur. Probablement que son musc inexistant en était la cause. Les Ebeds mâles étaient parfois complètement stupides sur ça et cherchaient à compenser d’une manière ou d’une autre. S’intéressait-il vraiment à moi ou n’était-ce que par rivalité avec mon colocataire – qui devait s’en ficher comme d’une guigne. Je croisai les bras, commençant à me braquer, sur la défensive.

— On habite ensemble. Ceci explique cela, même si ce ne sont pas tes affaires.

— Qu’est-ce que tu peux lui trouver avec son visage estropié, il est horrible à regarder, grimaça-t-il.

Je soufflai, et je fis quelques pas en direction d’un des coins de l’exposition. Là, sous ce grand arbre feuillu qui cachait un gros porc-épic entre ses branches. Je perdais patience. Il était clairement complexé et je n’avais pas le temps ni la moindre envie de devenir sa psy.

« Surtout que c’est toi qui devrais en voir une », ricana ma sœur.

J’en levais les yeux au ciel, avant de les poser sur la dépouille de l’animal, feignant de m’y intéresser, tapotant sur le panneau informatif devant moi. Malheureusement, j’entendis derrière moi le pas de Ruben qui me suivait. À priori, le message n’était pas assez clair. Ou son intellect était plutôt limité dès que ses hormones parlaient. J’optai pour la seconde explication. Je sentis sa présence s’arrêter dans mon dos. Je ne me retournai pas. J’avais envie de me jeter sur lui pour lui arracher la carotide, afin d’éliminer la menace qu’il représentait pour ma tranquillité. Mais il paraissait qu’il fallait que je prouve que j’étais saine d’esprit. Je ne pouvais me permettre la moindre effusion de sang. J’espérais qu’il s’en aille, mais il choisit plutôt de poursuivre :

— Nasrim n’est pas un bon gars pour toi. Je suis sûr que tu t’en es aperçue.

Dépitée que ma stratégie n’ait pas fonctionné, je me retournai en haussant les épaules. J'optai pour planter mes yeux dorés dans les siens, brumeux derrière ses lunettes qu’il remonta sur son nez, deux doigts entre les deux verres. Le geste aurait pu être charmant si je ne sentais pas en lui un mâle déterminé à partir en chasse. Hors de question que je m’écrase.

— Quand bien même, c’est à moi de décider.

Ce côté des Ebeds ne m’avait pas du tout manqué, même si je n’avais pas eu à le subir plus jeune. Les adolescents qui découvraient leurs hormones penchaient vers Noah, qui adorait les faire tourner en bourrique. Ils aimaient se plier en quatre pour elle, même si c’est surtout Aaron qui avait eu sa préférence. Pourquoi ? Je n’en avais aucune idée. Ma sœur ne devait pas avoir bon goût en matière d’homme.

« Mauvais goût, c’est mieux que rien du tout ! » persifla-t-elle.

L’apparition de ma jumelle eut au moins l’avantage de déstabiliser le Ranger devant moi. Imperceptiblement, ses narines se dilatèrent, petite preuve que l’effluve des roses était revenu et il ne comprenait pas pourquoi cette odeur avait surgi brusquement. Il se mit à lancer des regards à droite et à gauche discrètement, essayant de voir où était cachée cette présence malvenue, un potentiel témoin de ses actions harceleuses. Une alliée providentielle pour ma part.

«  Si tu veux, Miha, je lui rentre dans le lard tout de suite ! » rigola ma jumelle.

Pas maintenant, Noah, mais tu peux me dire tout ce que tu voudrais lui faire. C’est ta présence qui va le faire fuir.

J’encourageai ma sœur à se montrer plus vindicative encore dans ma tête, espérant que son parfum se fasse plus entêtant également. Plus puissant. Ce mec aurait au moins un doute et abandonnerait son assaut. Il devenait nerveux, tandis que je campais sur mes positions. Je n’allais nulle part et je lui faisais face. J’avais des problèmes, mais je semblais être sur la bonne voie pour les affronter.

Il finit par grommeler dans sa barbe.

— Je persiste à te dire que Nasrim cache bien trop de choses pour être quelqu’un de bien. On ne subit pas une blessure comme ça par hasard.

Je haussai les sourcils. Voilà qu’il parlait en termes sensés, bien que complotistes.

— C’est son histoire, c’est à lui de me la raconter, s’il le souhaite. Chacun ses secrets. Aurais-tu révélé tous les tiens ? le questionnai-je d’un ton neutre.

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