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1 - 1. Le Capitaine Markios
2 - 2. La Septième Brigade
3 - 3. Flint et Gabriel
4 - 4. Les premiers rapprochements
5 - 5. Le camp
6 - 6. Le mystère de Kritz
7 - 7. Le secret du mercenaire
8 - 8. L'esprit de la lumière
9 - 9. Tel oncle, tel neveu
10 - 10. Les observations du vampire
11 - 11. Une matinée gênante
12 - 12. Sur le chemin du retour
13 - 13. La fête des récoltes
14 - 14. Le subterfuge de l'albinos
15 - 15. Le cadavre
16 - 16. La détresse d'une guerrière
17 - 17. Les préparations
18 - 18. Cassandra et Misaki
19 - 19. La chasseuse et la crécerelle
20 - 20. Les négociations
21 - 21. Le siège de Xu Fahn
22 - 22. La colère de Nash
23 - 23. La gloire et la chute de Virgile
24 - 24. Un moment de répit
25 - 25. Les origines de Diana
26 - 26. Les nouvelles directives
27 - 27. Le passé de Luna Kelly
28 - 28. La vengeance d'une magicienne
29 - 29. Les manigances de la secte
30 - 30. Les enfants d'Athéna
31 - 31. Le piège
32 - 32. La bravoure de Misaki
33 - 33. Le père absent
34 - 34. Pour qui sonne le glas
35 - 35. La débrouillardise de Luna
36 - 36. Les sous-sols de Baldt
37 - 37. Shayne et Nox
38 - 38. La détresse de Flint
39 - 39. Euryale et Sthéno
40 - 40. De la poudre aux yeux
41 - 41. Troyd et Narcissa
42 - 42. Yosuke et Misaki
43 - 43. L'invasion de Baldt
44 - 44. La supercherie de Perséphone
45 - 45. L'Héritage des Markios
46 - 46. Nash et Diana
47 - 47. Le Roi de l'Olympe
48 - 48. La riposte du vampire
49 - 49. L'intervention divine
50 - 50. Célébrations amères
51 - 51. Flint et Athéna
52 - 52. Le grand ménage
53 - 53. Tendres moments
54 - 54. La lettre de William
55 - 55. Le plan du tyran
56 - 56. L'Ambassadeur d'Archenwald
57 - 57. Un vent de changement
58 - 58. La réunion du groupe
59 - 59. La crise d'Estelle
60 - 60. Le début du voyage
61 - 61. En route pour Archenwald
62 - 62. Chaos sur l'île de Cao Cao
63 - 63. Congé au bord de la mer
64 - 64. Convalescence et complaisance
65 - 65. Les héros de Scottie Sanders
66 - 66. Luna et Wyatt
67 - 67. Le panneau des requêtes
68 - 68. Sous les étoiles
69 - 69. Le retour du dragon
70 - 70. La double surprise de Gabriel Markios
71 - 71. La dimension maudite
72 - 72. L'anniversaire du golem
73 - 73. La cueillette de champignons
74 - 74. Révélations et réconciliations
75 - 75. La fin du monde
76 - 76. Les champs de coquelicots
77 - 77. Le mage et la loutre
78 - 78. Les papillons bleus
79 - 79. Amanites et toiles d'araignées
80 - 80. Flint et Lucas
81 - 81. Pattes acérées et partie de pêche
82 - 82. De l'autre côté du voile
83 - 83. Des retrouvailles corsées
84 - 84. Métamorphoses
85 - 85. Charlie et Gabriel
86 - 86. La famille Tabris
87 - 87. Shayne et Lucas
88 - 88. Frères d'armes
89 - 89. Shayne et Cassandra
90 - 90. Le refuge du nord
91 - 91. Scottie et Wyatt
92 - 92. Le règne de la noirceur
93 - 93. Une lueur dans les ténèbres
94 - 94. Le plan des dieux
95 - 95. Au-delà du temps et de l'espace
96 - 96. Le cri de l'ange
97 - 97. Plumes noires
98 - 98. Utopie
99 - 99. Seconde chance
100 - 100. Une déclaration troublante
101 - 101. Le terrible secret des dieux
102 - 102. Panique nocturne
103 - 103. Un rebondissement étonnant
104 - 104. Décalage horaire
105 - 105. Deus Ex Machina
106 - 106. Nemo et Randy
107 - 107. La grande plongée
108 - 108. La Fête du Canada
109 - 109. La journaliste et le strip-teaseur
110 - 110. Quand Estelle rencontre Kylie
111 - 111. L'ascension de Perséphone
112 - 112. Le choix de Thanatos
113 - 113. Athéna et Perséphone
114 - 114. Retour à Célestia
115 - 115. Une pause bien méritée
116 - 116. Flint et Luna
117 - 117. La déchéance du mage
118 - 118. Période d'adaptation
119 - 119. Mère et fils
120 - 120. Le blond et son colosse
121 - 121. Le souhait d'Artael
122 - 122. Le voyage continue
123 - 123. Le premier assaut
124 - 124. Une chute inattendue
125 - 125. Retrouvailles dans l'espace
126 - 126. Nash et Cerbère
127 - 127. Le fléau des anges
128 - 128. L'heure de la bête
129 - 129. Lucas et Kyran
130 - 130. La décision de Flint
131 - 131. Le champion du diable
132 - 132. Des gorgones et des larmes
133 - 133. Nash et Troyd
134 - 134. Le combat tant attendu
135 - 135. La philosophie du diable
136 - 136. La boîte de Pandore
137 - 137. La fin d'une aventure
138 - 138. Une sensation de déjà-vu
139 - 139. Troyd Markios
140 - 140. Le début d'une nouvelle ère
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92. Le règne de la noirceur

— Nan, mais qu’est-ce qui t’as pris, couillon !? dit Kylie qui toisa son frère. Comment t’as pu lui dire ça comme ça ? C’était mesquin et gratuit !

— Je n’avais pas le choix… Tu sais comment elle est… Elle n’a que Wyatt en tête. J’en ai marre de devoir endurer son côté groupie.

— Mais ressaisis-toi ! Tu es juste jaloux !

Furieuse, elle lui donna une claque derrière la tête.

— Aïe ! brailla-t-il. Pourquoi t’as fait ça ?

— Parce que c’est quand même notre amie ! grogna sa sœur entre ses dents. Tu n’avais pas le droit de lui faire ça !

— Mais je…

— Ryan Scott Sanders, poursuivit Kylie. Tu vas m’écouter clairement. Tu vas aller présenter tes excuses tout de suite à Estelle où je te réduis en charpie !

— Ne m’appelle pas comme ça, tu sais que j’ai horreur de ce nom !

— C’est justement pourquoi je l’utilise, imbécile !

Scottie bouda et partit, les mains dans les poches. Sa sœur l’observa s’éloigner alors qu’il courait déjà dans la même direction où Estelle avait pris la fuite. Kylie remarqua que l’entorse à la cheville de son frère était complètement guérie. Elle soupira et s’assit sur la grosse pierre, pendant qu'elle repensait à sa vie d’avant.

Le jour de l’adoption, elle se souvint que Conrad avait décidé de les nommer : Ryan Scott et Kylie en mémoire de ses défunts parents. Quelques années plus tard, le garçon avait rejeté la première partie de son prénom et opté pour qu’on l’appelle Scottie. La musicienne, quant à elle, ne s’était jamais sentie embarrassée de porter le diminutif de sa grand-mère, dont le véritable nom était Makayla.

Ils n’avaient jamais connu le vieux Ryan Scott, mais son épouse avait vécu quelque temps aux quartiers généraux des rebelles, avant de s’éteindre paisiblement dans la nuit. Kylie se souvint qu’elle avait été une gentille dame qui leur avait souvent offert des biscuits. En plus, elle leur avait raconté de belles histoires. Elle ne se souvenait plus de son visage, toutefois.

Conrad avait été un peu déçu lorsqu’il s’était rendu compte que son fils ne voulait plus du prénom Ryan, mais avait apprécié le fait qu’il garde un peu le deuxième prénom. Scottie était donc devenu son nouveau patronyme.

Ruby, déjà amie avec la famille, s’était vite adapté à ce changement. Cette dernière avait connu les grands-parents des jumeaux, bien avant leur naissance. Elle leur avait même dit qu’ils avaient un peu hérité de leurs traits, même s’ils avaient été adoptés. Scottie avait les talents culinaires de Makayla ; Kylie avait l’attitude déterminée et positive du vieil homme. Ils avaient pris cela comme un compliment.

Kylie se dit qu’il était temps de rentrer. Donc, elle se leva de la grosse pierre et marcha en direction du campement. Fatiguée, car son sommeil avait été interrompu par son frère, elle se dit qu’un peu petit somme ne serait pas de refus. Elle avança alors dans la pénombre et lâcha un long bâillement.

Ce silence est inquiétant, se dit-elle. Je me souviens quand nous avions toujours des démons à nos trousses. Il n’y a plus rien… Les autres ont raison de croire que les monstres sont passés de l’autre côté du voile. Nous n’avons donc plus rien à faire ici. Mais… qu’est-ce que…

Elle n’avait pas fait attention où elle mettait les pieds, avait trébuché et était tombé à travers un trou étrange. Elle s’agrippa de justesse à l’écorce d’un vieil arbre qui avait été coupé grossièrement, mais dont personne n’avait jamais creusé les racines. Elle poussa un juron et remonta à la surface avec l’aide d’une dague qu’elle gardait à sa ceinture. Le sol semblait s’effriter autour d’elle.

— NON MAIS C’EST QUOI CETTE MERDE !? hurla-t-elle.

Kylie ne se souvenait pas d’avoir contourné un précipice sans fond lorsqu’elle avait marché vers la plage. Celui-ci venait d’apparaître. Une matière obscure était en train de dévorer le terrain. Elle ne savait pas ce que c’était, mais elle n’oserait pas s’aventurer de trop près. Même qu’elle dut reculer, quelques secondes plus tard, car l’écorce de l’arbre était déjà en train de disparaître. Elle fit apparaître une boule de lumière et éclaira sa route.

Les plaines étaient en train de se faire ronger par une magie terrifiante. Elle n’avait pas d’autre choix que de courir en direction du campement. Elle remarqua aussi qu’il faisait plus sombre que d’habitude, dans cette dimension. Elle leva la tête et remarqua que la lune rouge avait complètement disparu.

Prise de panique, elle s’arrêta à mi-chemin et hurla :

— ESTELLE !? SCOTTIE !?

Elle ne pouvait pas les entendre, mais il y avait des cris qui venaient de la direction du campement. Même la petite communauté était en danger. Était-ce la fin de ce monde, tel que l’avaient prédit ses camarades ? Elle reprit son souffle et se mit encore à courir, mais entendit un cri d’effroi à sa droite. C’était Estelle.

— NE BOUGE PAS ! cria Kylie. J’ARRIVE !

Elle sauta par-dessus un trou qui était en train de se former près de ses pieds et courut vers sa protégée. Elle finit par retrouver cette dernière, en haut d’un arbre mort dont le tronc était partiellement en train de disparaître. Quelques secondes plus tard, l’arbre s’effondra et Estelle tomba dans le vide. Kylie la rattrapa de justesse, mais dut se laisser choir près du tout nouveau ravin qui n’était pas là, une heure plus tôt.

— Scottie est tombé… couina Estelle, nerveuse. Scottie est tombé !

— Où ça !? demanda la jumelle.

— Dans le… trou… à nos pieds !

Elle était en larmes, en crise de panique.

La guerrière sentit son cœur se serrer, son frère était probablement mort. Elle prit une grande respiration et tira son amie de toutes ses forces. Malheureusement, au moment où elle la ramena sur la terre ferme, le sol disparut sous les deux jeunes demoiselles.

Toutes deux hurlèrent à l’aide, puis s’évaporèrent dans un nuage sombre de magie, en même temps que leurs voix.

¤*¤*¤

Au même moment, au campement de Cordelia Lawson, les meilleurs mages repoussaient l’étrange nuage ténébreux qui rongeait tout sur son passage. Une bonne partie de la population avait déjà disparu, il ne restait plus que la Septième Brigade et les esprits élémentaires présents sur place.

Wyatt et Luna avaient activé un champ de force, tous deux se trouvaient à un côté opposé de la bulle protectrice, en sueur. Leur bouclier magique faisait au moins dix mètres de longueur et de largeurs. Une partie des tentes avait déjà été rongée.

— Bon sang, mais qu’est-ce que c’est que cette chose !? grogna Flint.

— Nous avons été rassemblés trop tard… soupira le tigre blanc qui baissa la tête. Ce monde est en train de disparaître.

— Mais comment est-ce possible ? mentionna Cordelia, près du feu de camp. Je croyais que l’enfer devait coexister avec Aeglys !

La rousse était la seule représentante des survivants, présente à l’intérieur du cercle magique. Elle était venue discuter avec le capitaine et le général des procédures à suivre pour ouvrir un portail magique lorsque la chose sans nom avait commencé à dévorer le terrain.

— Vos ancêtres ne vous ont rien dit en rapport à la fin du monde, j’imagine ? commenta Flint qui se tourna vers l’alchimiste.

— Non ! s’exprima-t-elle. Tout ce que nous savions, c’était que le temps s’était arrêté. Nous pouvions encore y faire pousser plein de choses, donc personne ne pensait à sa destruction imminente ! Nous sommes des alchimistes, quand même… Nous devions reconstruire cette dimension et…

Elle s’agenouilla en colère. Elle donna un coup de poing dans le sol, mais remarqua qu’il s’était désintégré sous le bouclier magique. Ils flottaient dans le vide, avec le feu de camp toujours intact. Elle poussa un cri d’horreur. Toute sa vie, elle avait été élevée à protéger cette dimension ancienne et son devoir avait été d’empêcher les démons à détruire le voile. Elle avait échoué à sa mission. Furieuse et répugnée par son incompétence, elle sortit une dague de sa ceinture et s’apprêta à l’enfoncer dans son cœur. Flint l’en empêcha.

— Mais vous êtes folle ! cria-t-il.

— On va tous mourir, de toute façon !

— Ce n’est pas une raison de vous enlever la vie comme une lâche ! Battez-vous !

L’alchimiste lâcha sa dague, car le capitaine pressait sur son poignet si fort qu’elle ne ressentait déjà plus sa circulation. Elle déglutit et pleura en silence. Pendant ce temps, les esprits élémentaires renforçaient le champ de force avec leur magie.

— Que devons-nous faire ? demanda Wyatt à Bella.

La loutre était revenue à lui, peu de temps avant que l’enfer commençait à disparaître. Elle avait repris la forme des bracelets à ses poignets et l’aidait à récupérer des forces.

— Je n’en sais rien ! couina l’esprit des eaux. C’est la première fois que j’assiste à un tel désastre ! À la moindre faute, nous mourrons !

— Tu ne me rassures pas, mais vraiment pas… marmonna le mage.

Derrière lui, Luna venait de synchroniser avec Kelvin. Deux ailes enflammées se trouvaient sur son dos. Elle non plus ne savait pas comment réagir à tant de puissance. Tout ce qu’elle pouvait faire, c’était de maintenir leur seul moyen de protection.

— Je ne veux pas mourir… couina aussitôt Cassandra.

Flint se tourna vers elle et remarqua qu’elle était recroquevillée près du vampire. Elle était en train de paniquer. Misaki vint la consoler, alors que Gabriel avait le regard perdu dans le vide, en dehors du champ de force.

— Crois-tu qu’Estelle s’en est sortie ? demanda le colosse à son mari. Notre fille ne peut pas avoir péri… n’est-ce pas ?

— Les jumeaux sont avec elle, répliqua Flint. Elle ne craint rien…

Il essayait de le rassurer, mais c’était lui-même qu’il essayait de convaincre. Jamais de toute sa vie, avait-il connu un moment aussi effrayant ; à part l’invasion des démons à Baldt. Il était stupéfait. Tout était arrivé si vite.

— Cassandra, regarde dans mes yeux et répète après moi, formula Shayne qui se pencha vers sa compagne. Nous allons survivre ! Tu m’entends ? Nous allons survivre. Prends une grande respiration… C’est ça… Nous allons survivre…

— Nous allons… nous allons… couina Cassandra.

La guérisseuse suffoquait d’hyperventilation. Elle enfouit son visage dans la poitrine musclée de son bien-aimé, tandis que Misaki l’enlaçait par l’arrière. Flint constata que Lucas maintenait aussi le champ de force avec sa propre magie. Il était assis près du feu de camp et insufflait tout son mana dans l’enchantement du groupe. Le capitaine préféra ne pas le distraire.

Ce fut à cet instant que des craquelures apparurent dans la bulle magique, ce qui laissa pénétrer de petits bouts de cet étrange nuage ténébreux qui dévorait tout à l’extérieur. La première chose que Flint fit, fut de courir en direction de son mari. Il se jeta dans ses bras, mais il était trop tard. Cet instant serait leur dernier moment, ensemble.

— Gabriel, je t’ai... commença celui-ci.

Mais son visage avait déjà disparu, ainsi que le bout de ses bras. Le colosse poussa un énorme cri, et sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine.

— Flint, non ! cria-t-il. Tout sauf ça ! Oh Athéna, pit-

La phrase de Gabriel fut aussi interrompue, car il venait d’être dévoré vivant par le nuage obscur. La dernière chose à disparaître était le bout de son bedon. Dia et Charlie se tournèrent en direction de l’endroit où s’étaient trouvés leurs protecteurs. Ils étaient sur le point de crier leurs noms quand ils disparurent eux aussi.

Cordelia Lawson fut la suivante à se faire engloutir par la matière noire. Il ne restait plus que sa dague, gisant là où elle s’était trouvée.

Ce fut ensuite le tour de Cassandra qui embrassa les lèvres de Shayne, au moment où celui-ci se fit absorber à son tour. Misaki se tourna vers Lucas et tendit un bras dans sa direction, mais il avait déjà disparu, ainsi que le feu de camp. Il ne restait plus que Luna, Wyatt et les autres esprits élémentaires éparpillés dans le noir.

— Luna ! cria le mage. Je t’interdis de mour-

Le néant l’avait déjà consumé. Tête basse, la magicienne se serrait les épaules et fit une petite prière pour le phénix qui l’accompagnerait dans les ténèbres. Elle ne pleurait pas, elle ne criait pas. Elle semblait avoir accepté que ce fût malheureusement la fin de ses aventures. Elle ferma les yeux.

Merci pour tout, Kelvin… dit-elle.

Pas de quoi, Luna… répliqua l’oiseau.

Il ne restait plus rien qu’une larme ; celle de la magicienne qui avait réalisé à la dernière seconde qu’elle ne souhaitait pas mourir. La goutte d’eau salée s’évapora dans le vide. Ce qui restait du champ de force, cessa d’exister.

¤*¤*¤

Le 18 avril 3918 AD, à Archenwald, la grande capitale de Lanartis était assiégée depuis quelques jours. Le roi et la reine avaient été exécutés sur la place publique, sous l’ordre de Troyd Markios, dirigeant de cette opération. Une bonne partie de la ville avait été brûlée dans un incendie épouvantable, démarré sous les ordres du chevalier des ténèbres.

Assis dans la salle du trône, le nouveau roi de Lanartis examinait les prisonniers que ses disciples démoniaques lui avaient apportés. Troyd s’était fait un plaisir de s’autoproclamer chef de cette nation, après l’assassinat de Davis et de Floraine d’Archenwald. Il traitait déjà les citoyens comme du bétail et tuait peu importe osait se mettre sur son chemin. Tout ceci n’était qu’une diversion pour assouvir ses besoins personnels.

— Votre Majesté, dit le garde qui poussa le villageois devant le tyran. Ce mendiant a tenté de dérober un morceau de viande dans le garde-manger, pour le donner à ses enfants. Quels sont vos ordres ?

Troyd haussa les épaules.

— Je vous en prie, Votre Altesse ! Ça fait trois jours que nous n’avons rien mangé. Il me fallait les nourrir… Depuis que vos hommes occupent nos marchés, nous ne pouvons plus rien acheter… Je vous demande pardon !

Le tyran leva une main, ce qui donna signe au garde d’agir. Ce dernier lui trancha la gorge. Le mendiant tomba à ses pieds.

Un autre garde tira un autre sujet en face de son roi, pendant que le précédent tirait le cadavre en dehors de la salle du trône.

Troyd s’ennuyait. Au départ, devenir le dirigeant de cette monarchie lui avait semblé une excellente idée. Par la suite, ses gardes et ses soldats lui avaient obéi au doigt et à l’œil. Il avait reçu l’ordre de veiller sur Lanartis pendant que les dieux renégats étaient partis guerroyer à travers le monde. Il était dégoûté. Il avait toute une armée de démons qui gérait Archenwald et il n’avait pas le droit de quitter cette ville, sous prétexte que c’était désormais leur quartier général.

— Votre Altesse, je vous présente votre nouvelle pâtissière.

— Et quel est votre nom, madame ? demanda Troyd.

Elle le fusilla d’un regard perçant et garda silence. Cette femme était petite, frêle et arborait une chevelure grise en chignon. Ses nombreuses rides lui donnaient une allure sérieuse et endurcie.

Troyd haussa un sourcil. Le pâtissier précédent avait été brûlé au bûcher avec le reste des citoyens qui avaient résisté à l’invasion d’Archenwald. Le despote avait remarqué que la vieille dame devait être aussi vieille que Virgile Knox, à sa mort.

— Emmenez-la dans les cachots, dit le tyran qui pointa une porte à sa droite. Enchaînez-la avec les autres cuisiniers et fouettez-les un peu. Ils ont intérêts à nous préparer un festin ce soir, sinon ils seront tous exécutés au pilori demain matin.

— À vos ordres, Messire ! répondit le deuxième garde.

Le barbare sanguinaire assit sur le trône remarqua qu’il restait une dizaine de sujets à passer. Il roula les yeux et sortit une pièce de sa poche de chandail. Il ne portait rien d’extravagant, simplement des vêtements normaux. Il avait fait fondre les couronnes royales pour les mêler à sa nouvelle armure que le forgeron était en train de lui préparer. Tous les bijoux des nobles étaient en train d’être recyclés par ses ingénieurs pour être transformés en armes. L’or et l’argent ne vaudraient rien dans la nouvelle société qu’ils étaient en train de construire.

Silencieux, Troyd observa ses potentielles victimes et plissa des yeux. Il faisait passer sa pièce de monnaie d’un doigt à l’autre, un vieux truc qu’il avait appris durant ses nombreuses années à Baldt.

— Écoutez, je n’ai pas envie de m’éterniser pour répondre à toutes vos demandes, alors je vais résoudre cela avec la Dame de la Fortune, expliqua-t-il. Si j’obtiens face, je vous tue tous sans exception. Si je tombe sur pile, je devrais quand même vous juger et il y a de fortes chances que je vous tue malgré tout…

— Vous êtes un monstre ! cria une jeune femme dans la vingtaine.

— Tuez-la, ordonna Troyd au garde derrière elle.

Le soldat qui portait une armure ténébreuse lui transperça le crâne avec sa lance. Il retira son arme et le cadavre tomba devant celui-ci. Cela provoqua les cris et les pleurs des neuf autres victimes qu’ils avaient rassemblées dans la salle du trône.

Le dirigeant tira alors la pièce dans les airs et la rattrapa. Il était si habitué à ce jeu qu’il n’eut aucun problème à rattraper la pièce, à la vitesse d’un éclair. Il la regarda et esquissa un petit sourire en coin, avant de se lever du trône.

— Eh bien, mes chers amis, je crois que c’est votre jour de chance. Quel gâchis…

Il s’avança près d’une première femme et lui effleura le visage, avec sa main. C’était une dame dans la quarantaine qui le méprisait avec toute son âme.

— Celle-là est trop vieille pour moi, dit le roi. Quelle est sa spécialité ?

— Elle est couturière, Monseigneur, expliqua le garde, derrière elle.

— Peu importe.

Troyd jeta la pièce derrière lui et saisit la tête de la femme avec ses deux mains avant de la tordre rapidement et la craquer. La dépouille s’effondra par terre.

— En passant, j’ai obtenu Face, avoua-t-il au reste des prisonniers.

Il sortit alors de sa ceinture son épée et embrocha un vieil homme en haillon. Un par un, il abattit son arme sur les victimes maintenues par les gardes, jusqu’à ce qu’il tombe sur une jeune femme aux traits familiers. Celle-là devait avoir plus ou moins vingt ans. C’était une brunette qu’il avait déjà croisée à Baldt, quelques années plus tôt. Elle grelotta de peur lorsqu’il la reconnut. Il caqueta alors qu’il passait une main dans sa barbe.

— Comment va ta pétasse de mère, petite Doyle ? demanda le roi. Cette truie ne se trouvait pas parmi les citoyens que nous avons déjà capturés…

Il rengaina son épée recouverte de sang, sans se préoccuper de la nettoyer.

— Elle était en dehors de la ville lorsque vous l’avez envahie, Monsieur Markios, déclara Misha, froidement.

— Mmm… Voyez-vous ça, elle a de la gueule, cette petite…

Les soldats présents dans la pièce se mirent à rire en même temps que le despote.

Misha avait les mains ligotées derrière le dos et ne put se défendre lorsqu’il approcha sa main pour lui toucher le visage, délicatement. Elle bouillait de colère et ne le quittait pas du regard. La jeune femme enfonça ses doigts, si fort, dans ses paumes qu’elle saignait. Elle ne craignait pas la mort, ni la douleur. Toutefois, elle connaissait assez bien cet homme pour comprendre qu’il était dangereux et qu’il la voulait déjà dans son lit.

Troyd la gifla du revers de la main gauche. Elle tomba au sol. Il se pencha vers elle et lui fit son plus beau sourire.

— Ose me parler encore sur ce ton et je te trancherais la langue, ma mignonne, formula-t-il. C’est dommage, parce qu’elle est si jolie, ta voix…

Il tourna ensuite son regard vers le garde qui avait emmené la pauvre vendeuse de parfums au château. Il lui montra la porte qui menait aux chambres royales.

— Conduisez cette pute dans mes appartements personnels et ligotez-la au lit. J’ai bien envie d’aller me vider le sac…

L’ancien général attrapa alors ses parties intimes et les secoua brièvement pour se faire comprendre. Il rigola.

— Tout de suite, Votre Altesse ! obéit son soldat.

— Non ! Je ne vous laisserai pas faire ! grogna Misha tandis qu'elle se débattait.

Elle reçut un coup de matraque sur la tête et perdit connaissance. Le roi souffla des narines et dévisagea le soldat.

— Ah, c’est malin ! tonna Troyd. Maintenant, comment espères-tu que je puisse terroriser ma proie si elle est inconsciente ? Pfft… Tu es incompétent, ma parole !

— Je vous demande pardon, monseigneur… dit le garde qui s’agenouilla devant son roi. Je devais la calmer !

— Soit, je t’accorde une deuxième chance. Ta prochaine gaffe te coûtera la vie, j’en ai peur. Tâche d’être plus prudent, avec mes autres catins.

— Oui, votre Altesse !

Le garde qui avait manqué de respect au monarque, ramassa le corps inconscient de Misha Doyle et la traîna jusqu’aux chambres royales. Les autres demeurèrent silencieux en face de leur supérieur.

— Veuillez disposer, dit Troyd. Mais pas avant d’avoir ramassé ces insectes et de nettoyer le plancher. Je veux y voir mon reflet. Me suis-je fait comprendre ?

— Oui, Votre Altesse ! répondirent les soldats en chœur.

Ils prirent tous la pose militaire qu’on leur avait enseignée afin de saluer le despote et ses supérieurs. Quiconque ne pourrait reproduire celle-ci en face de ces derniers, serait exécuté sur le champ.

Satisfait, le nouveau Roi de Lanartis allait enfin procéder à sa partie préférée de la journée : celle d’agresser sexuellement une innocente. Perséphone lui avait promis plein de vierges ; il en avait eu. Elle lui avait promis le royaume servit sur un plateau d’argent, elle le lui avait donné… mais temporairement, car le retour de la déesse entre ces murs, il céderait son titre de roi à sa supérieure. Le tyran avait tout fait pour que le plan de Perséphone fonctionne durant ces dernières années. Il pouvait enfin profiter de sa petite victoire personnelle avec sa sixième victime de la semaine.

Servir ses sujets n’était qu’un stupide prétexte pour se trouver une nouvelle victime, chaque soir. Les autres femmes avaient été faites prisonnières dans les chambres royales, et on les avait ligotées, donc elles ne pouvaient s’enfuir, ni le battre. Parfois, il leur donnait à manger, mais négligeait celles qui lui manquaient de respect. Misha Doyle serait ainsi sa sixième épouse. Il se sentait fier et approcha ses mains, l’une vers l’autre. Il se demandait laquelle des six engrosserait le meilleur bébé, car il y avait une autre raison pour laquelle il terrorisait toutes ces femmes : il désirait un élever un enfant qui lui succéderait un jour à son poste de général dans l’armée de Perséphone.

Pendant qu’il marchait le long du couloir, vers la chambre de laquelle la porte était grande ouverte. Il croisa le regard avec un vieil homme à la barbe blanche qui montait du premier étage. Celui-ci portait une grande soutane pourpre et l’observait d’un air sévère. Troyd lui sourit et s’approcha de lui.

— Quelles sont les nouvelles, mon vieil ami ? demanda le roi. Est-ce que notre dame est satisfaite de sa guerre ?

— Évidemment, Troyd. Je vois que tu t’es beaucoup amusé en mon absence.

Le vieil homme haussa un sourcil et pointa les chambres des victimes. Ils pouvaient entendre les cris des cinq femmes éveillées. Elles criaient toutes à l’aide.

— On partage, si tu en as envie, formula le chevalier des ténèbres. Elles sont toutes jeunes et bien en formes, si tu vois où je veux en venir…

— Sans façon, mais merci pour l’offre, répliqua son interlocuteur. J’ai passé l’âge de mettre mes parties dans celles des femmes, de toute manière. Et honnêtement ? L’idée de passer là où… ta chose est passée avant moi, me répugne.

Le vieillard pointa les bijoux de famille de Troyd.

— Pfft, Randell ! s’exclama Troyd. Tu es juste jaloux de ma jeunesse et de mon sex appeal. Estime-toi heureux que tu sois pratique à notre cause, parce que sinon je ne te garderais pas au château. Tu serais beaucoup mieux utile avec les dieux sur le terrain, d’après moi.

— Je vais prendre cela comme un compliment…

L’homme qui se tenait devant l’ex-général de Baldt avait faussé la mort à de nombreuses reprises au cours de sa longue vie. La dernière fois fut lorsqu’ils avaient envahi Baldt, quatre ans plus tôt. Il avait vu son corps d’emprunt périr avec la magie puissante de son ancien élève, Artael Markios. Randell était le mage-conseiller officiel de la cour du Roi Troyd, mais ce n’était qu’à titre seulement. Sa véritable tâche jusqu’à cet instant avait été de vider l’enfer de toutes ses créatures, afin d’assister les dieux renégats dans leur quête. Deux jours plus tôt, il avait fait transférer les dernières gargouilles à travers les brèches et décidé de prendre une journée de congé. Le lendemain, il était de retour au château.

— Ça tombe bien que tu dises cela, cher ami, ajouta Randell.

— Ah bon ? Pourquoi donc, Randy ?

Le vieux mage soupira, comme à chaque fois que son allié l’appelait par ce ridicule surnom. Il le méprisait, mais au moins savait se rendre utile.

— Je pars, dit l’ancien conseiller de Baldt. Notre déesse m’a contacté ce matin-même et désire que je combatte à ses côtés.

— Oh, c’est qu’elle joue avec mes nerfs, la salope ! soupira le roi. En plus, elle ose me ficher ici, à me tourner les pouces… Elle m’avait promis la tête d’Artael et m’a dit que je serais celui qui la trancherait… J’espère qu’elle tiendra sa promesse.

— Chaque chose en son temps, jeune Markios. Ton tour viendra…

Le mage passa une main sur son menton fraîchement rasé et haussa un sourcil.

— Curieux… dit-il.

— Quoi donc ? questionna le despote.

— Mes liens avec l’enfer semblent s’être éteints. Je ne ressens plus son influence maléfique. Quelqu’un ou quelque chose est en train de jouer avec le voile.

Il fronça des sourcils alors qu’il frôlait quelque chose d’invisible dans l’air. Troyd n’avait jamais compris comment Randell était capable de sentir le voile de la magie, mais comprenait aussi qu’il était le seul mage dans ce château capable de traverser les deux dimensions sans problème. Avec quelques disciples des renégats, il avait réussi à ouvrir de nombreuses brèches, suite à la capture des esprits élémentaires dans l’au-delà. Ils avaient enfermé ces derniers en enfer et cela avait grandement affecté les sceaux d’Aeglys.

Graduellement, les chamans et les sorciers subordonnés à Randell avaient appris à ouvrir et à refermer les brèches d’eux-mêmes. Cela avait permis à Perséphone et ses acolytes de traverser librement à travers les deux dimensions.

En ce moment même, ils avaient des agents qui travaillaient pour eux, au Saint Royaume. Ces derniers avaient brouillé leurs pistes depuis quatre ans et s’arrangeaient toujours pour que les rapports faits aux dieux de l’Olympe soient sans signe de danger. Troyd ignorait combien de temps cette supercherie allait durer, mais espérait qu’ils seraient prêts, le jour où ils déclareraient la guerre au monde spirituel.

— Bon bah… Ce n’est pas tout, mon petit père, mais j’ai une garce à aller engrosser, formula le roi. Je te souhaite une bonne route vers le champ de bataille.

Le tyran lui serra la main en gage de son amitié, puis s’éloigna vers la porte ouverte, d’où jaillissait la lumière. Randell roula les yeux et se dirigea vers la salle du trône. Il était temps pour lui de partir de cette horrible ville. Ce qu’il pouvait mépriser Troyd Markios… 

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