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1 - Chapter 1 : Silence
2 - Chapter 2 : Sons
3 - Chapter 3 : Temps
4 - Chapter 4 : Coma
5 - Chapter 5 : Reviens-moi
6 - Chapter 6 : Petit bout de rien
7 - Chapter 7 : Joyeux anniversaire !
8 - Chapter 8 : Casse-toi !
9 - Chapter 9 : Fautif
10 - Chapter 10 : Accident
11 - Chapter 11 : Besoin d'aide
12 - Chapter 12 : Psychologue
13 - Chapter 13 : Un pas en avant
14 - Chapter 14 : Ce qui est dit est dit
15 - Chapter 15 : Jamais sortir
16 - Chapter 16 : Dissociation
17 - Chapitre 17 : Retour à la maison
18 - Chapitre 18 : Avec ou sans sucre
19 - Chapitre 19 : Vivre
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Valentin_Bthr

Chapter 12 : Psychologue

La jeune femme doit avoir une trentaine d'années. Ses yeux bruns attirent aussitôt l'attention d'Alexis qui se perd un instant dans leur contemplation rassurante. Pauline, laisse-t-elle tomber avant de lui tendre une main chaleureuse. Un geste qui le ramène à la réalité. Elle l’invite à prendre place où bon lui semble, dans la petite pièce chaleureuse. Gêné, Alexis s’installe près du bureau pour avoir l’impression de garder autour de lui, dans cette démarche inimaginable, un cadre professionnel. Il laisse ses yeux vagabonder un peu partout. Derrière la psychologue se trouvent une multitude de classeurs rangés sur une étagère ; des dessins d’enfants sont accrochés au mur ; à côté de son ordinateur portable, quelques stylos sont ordonnés dans un pot et une petite plante verte se tient près de l'unique fenêtre. Les couleurs harmonieuses, un mélange de gris et de vert, apaisent Alexis qui sent ses muscles se détendre.

« Alexis Tabor, c'est bien ça ? »

« Oui. »

« Qu'est-ce qui vous amène ? »

« Le docteur Galet ne vous l'a pas expliqué ? »

« Il me l'a expliqué. Mais votre avis m'intéresse davantage. »

Alexis hausse vaguement les épaules.

« Un ami à moi est hospitalisé. »

« Un membre de votre entourage est à l'hôpital... »

« Un ami proche... Il est resté dans le coma pendant deux mois, environ, et à son réveil il a refusé de me voir. »

« Et cela vous blesse ? »

« Me blesse ... ? ... Non, je ne crois pas que ça me blesse. Il fait ce qu'il peut. Et je comprends aussi pourquoi il ne veut pas forcément me voir, je n'ai pas été un bon ami avant son accident. »

« Vous vous sentez coupable ? »

Alexis garde le silence, fixe les classeurs derrière la psychologue, refuse de répondre. Après un moment de flottement, Pauline reprend la parole :

« Vous avez fait la démarche pour me rencontrer, c'est bien cela ? »

Les yeux d'Alexis reviennent se poser sur elle.

« Oui. »

« Pourquoi ? »

« ... J'ai vu mon reflet dans un miroir. »

« Et qu'a reflété ce miroir ? »

« L'image d'un homme que je ne connaissais pas. »

La séance se déroule en échanges de quelques banalités. Alexis n'arrive pas à aller au fond de sa pensée, s'arrête, recule, repart. La jeune femme n'essaie pas de forcer les limites qu'il s'impose. Un respect qui, quelque part, rassure Alexis. Le pousse à fixer un autre rendez-vous. Deux fois par semaine, c’est ce qu’ils décident ensemble. 

*

Pour la première fois en trois semaines; Alexis reçoit un appel de Theo, l'un de ses frères, qui lui demande s'il compte venir passer les vacances d’hiver avec lui et ses fils, comme le veut leur tradition. Et, pour la première fois depuis l’accident de Johan, Alexis hésite, considère la question. Malgré tout, il finit par décliner l’invitation. 

Le trois février, il entre dans le bureau de Pauline. C’est son même regard chaleureux qui l’accueille. 

« Vous avez bonne mine aujourd'hui. » constate-t-elle en le voyant arriver.

« On sait tous les deux que c'est faux, mais c'est gentil d'essayer d'être optimiste. Cela dit… C’est bientôt mon anniversaire, alors j’imagine qu’on peut toujours garder espoir pour l’année à venir. »

« Avez-vous des projets pour votre anniversaire ? »

« Non. »

« Que faites-vous d'habitude ? »

« Je monte dans les Alpes avec une partie de ma famille. J'ai deux frères et on est tous les trois nés en février, alors on a toujours pris l’habitude de fêter ça ensemble en partant faire du ski… Mais cette année, je peux pas. »

« Et dans l'idéal, qu'auriez-vous aimé faire cette année ? »

« Dans l'idéal... J'aurais beaucoup aimé fêter mon anniversaire avec Johan. »

C'est la première fois qu'Alexis prononce le nom de Johan à voix haute au cours de leur séance. D'habitude, il se contente de l’appeler mon ami. Pauline hoche la tête.

« Qu'est-ce qui vous empêcherait de le faire ? »

« Il refuse que je le vois, je pense que c'est une raison suffisante, non ? » souffle-t-il.

« Eh bien, qu'en pensez-vous ? »

« Je pense que c'est... Je pense que c'est ridicule. Vous ne trouvez pas la situation complètement ridicule, vous ? Il est tout seul, je le sais, il n'a pas de visite puisqu'il les refuse. Et moi, je me prive de toute ma vie simplement parce que j'attends qu'il m'autorise à revenir dans la sienne. Ce n'est... Ce n'est pas la situation la plus absurde dont on vous a jamais parlé ? »

Irrépressible, un rire franchit la barrière de ses lèvres. Bon sang, rire lui fait tellement de bien ! Plus libérateur que toute autre forme d'expression. Un simple éclat de rire. Lorsqu'il reprend contenance, ses émotions déferlent et des larmes trop longtemps retenues prisonnières passent la frontière de ses yeux, dévalent ses joues en silence.

« Excusez-moi... » dit-il faiblement en les essuyant.

Pauline lui tend quelques mouchoirs sans rien dire. Sur son visage, Alexis ne décèle aucun jugement. Il prend donc une profonde inspiration.

« Je devrais passer mon anniversaire avec lui. Je devrais... J'aimerais tellement. Même s'il ne me dit rien. Je voudrais lui parler... Ou même me taire. En fait, j'aimerais juste le voir. »

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