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Chapitre 4 - La Malédiction de Valdrake

Dans les sombres entrailles du château de Valdrake, au cœur d'un royaume où la cruauté des hommes rivalisait avec celle des bêtes, vivait Elodie. Jeune fille aux yeux trop rêveurs et aux mains trop frêles pour les tâches rudes qu'on lui imposait, elle était sans cesse la victime des railleries et des brimades de sa famille. Une mère aussi froide que le marbre, un père aveuglé par l'ambition, des frères et sœurs qui ne voyaient en elle qu'un fardeau.

On la punissait sans raison, on la rejetait sans remords, et dans la froideur des oubliettes où elle était souvent jetée, elle murmurait ses prières à des dieux qui ne répondaient jamais.

Une nuit, alors qu'elle était enfermée dans les cachots oubliés du château une fois encore pour une faute qu'elle n'avait pas commise, Elodie pleurait. Ses larmes mouillaient la pierre sous elle. Soudain, une brise glaciale s'infiltra entre les fissures des murs. Ce n'était pas le vent... C'était quelque chose de bien plus ancien, bien plus affamé.

Un démon.

Il s'était glissé dans l'ombre, attiré par la souffrance de la jeune fille. Sa bouche sans lèvres s'était courbée en un sourire carnassier, prête à dévorer cette âme fragile. Au moment où il allait s'en repaître, il se figea, intrigué. Il fit passer sa langue bifide dans l'air tout autour de sa proie. Elle n'avait pas ce qu'il recherchait, son amertume était différente, de celle qui ne se débattent plus pour vivre... ou pour être aimée.

Quelle ironie. Quelle absurdité.

Il se glissa autour d'elle, glissant son essence démoniaque contre sa virginité puritaine, un diamant brut qui avait pourtant perdu tout éclat. Un cœur éteint, consumé par le rejet. Un goût... ennuyeux sur sa langue.

— Un festin sans épices ne vaut rien, susurra-t-il dans son esprit alors qu'il prenait peu à peu possession de son corps. Mais peut-être pourrais-je cuisine quelque chose de plus... corsé.

Celle qui aurait du être sa proie devint son instrument, son fouet, et lui le cuisinier des abysses infernales, il allait se repaître des âmes qui oseraient croiser son chemin.

Quand Elodie ouvrit les yeux au matin, ils brûlaient d'une lueur que personne ne pourrait jamais ignorer. Consciente ou non de sa possession, un sentiment pulsait dans sa poitrine, puissant, aussi grand que la détresse qu'elle avait ressentie tout au long de sa vie, et aussi délicat qu'une fleur de printemps.

— Il est temps, souffla-t-elle dans un murmure rauque.

La première à subir les prémisses de sa vengeance fut sa mère. Cette dernière l'avait toujours considérée comme une erreur. Un regard suffisait pour la maudire. Pour faire bonne mesure, elle lui en adressa trois et observa le résultat.

Chaque matin, le château résonnait des cris terrorisés de la marâtre qui s'égosillait devant son miroir. Une étrangère se tenait à sa place dans son reflet. Si au début, cela attirait l'attention de tous, peu à peu, les hurlements devinrent le quotidien et peu à peu, la mère devint une ombre tout aussi effacée que l'avait été Elodie pendant toutes années. Au détail près que la marâtre était considérée et même devenue une folle à lier.

Vint après le tour du père avide de richesse de statut. Un soir, après avoir servi le repas, Elodie le regarda dans les yeux par trois fois. La malédiction du démon s'installa. Observatrice silencieuse dans les ombres du château, elle vit les belles terres prospères de son père se flétrir. Tout ce que l'homme venait à toucher devenait cendres entre ses doigts. Chaque transaction qu'il cherchait à faire n'avait pour seul résultat sa ruine. L'homme riche et cupide qu'il était devint un mendiant à la porte de son propre château, suppliant pour un peu de pitié, cette même pitié qu'il n'a jamais accordée à Elodie.

Débarrassée de principaux responsables de son malheur, la jeune fille se tourna vers les derniers bourreaux qui lui restaient encore à pourrir : ses frères et sœurs. Comme avec ses géniteurs, elle leur accorda trois regards. Habitués à une vie de luxure et de débauches, la malédiction les piégea dans une boucle infernale de festins où elle les suivait. Sous son regard calme et ses sourires sereins, Elodie dégustait chaque plat exquis mais surtout, elle observait. Sa fratrie honnie ne cessait de se goinfrer plus encore, souffrant du goût de la famine à chaque bouchée. Plus ils mangeaient, plus leur ventre se vidait, les rendant fous de faim sans jamais pouvoir se rassasier. Leur peau pâlit, leurs corps s'affaiblirent au point d'en venir à se battre entre eux pour une bouchée. Ils étaient désormais des créatures faméliques devenues esclaves d'une faim insatiable.

Le dernier frère, celui qui avait toujours ri de la fragilité d'Elodie, finit par se retrouver seul, isolé dans le château de Valdrake. Les autres avaient disparus dans une frénésie insensée. Peut-être avaient-ils finis par s'entretuer ? Cela faisait un moment qu'il n'entendait plus leurs voix suppliantes résonner dans les couloirs ou leurs cris pour réclamer de la nourriture qui pourtant ne les rassasiait plus.

Alors qu'il pensait être le dernier survivant, il aperçut une silhouette sortir de l'ombre : Elodie. Il écarquille les yeux quand il la voit le fixer de son regard brûlant. Les yeux sont le miroir de l'âme pourtant, chez elle, c'est indéchiffrable. Comme si... il n'y en avait pas.

Elle approchait de lui d'un pas tranquille, ses chaussons résonnant sur le sol de pierre. Elle lui tendit le plateau repas qu'elle avait dans les mains.

— Mange, murmure-t-elle d'une voix rauque qu'il ne reconnut pas.

Le frère observa le met succulent, la bave aux lèvres. Pourtant il savait. Cela ne servirait à rien de manger, mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Il mangea sous les yeux et le sourire serein de sa soeur.

Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour rejoindre les autres dans le trépas.

Quand enfin, il n'y eut plus que silence dans les couloirs du château, Elodie se tenait droite, victorieuse.

Le démon, satisfait de son oeuvre et repu des âmes du père, de la mère et des frères, s'enroula une dernière fois autour de l'âme de la jeune fille.

— Tu étais insignifiante, susurra-t-il alors qu'il se décrochait d'elle peu à peu. Maintenant, tu es quelque chose.

Elodie, pour la première fois de sa vie, sentit qu'elle avait un rôle à jouer. mais était-elle encore une fille ?

— Maintenant, à qui le tour ? demanda-t-elle dans le silence du château de Valdrake.

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