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Myfanwi

CHAPITRE 26

Mardi 19 octobre 2020, 9 h 20.

— Un laboratoire ? En pleine apocalypse ? C'est ça ton idée lumineuse ?

Miranda s'arracha les cheveux. Avec Connor, ils avaient passé la moitié de la nuit à expliquer la situation à Bruce et Frédéric, dans l'espoir que l'un des deux ait une idée quelconque pour les aider à progresser. Au petit matin, Frédéric était venue la trouver dans sa chambre pour lui proposer de trouver un laboratoire fonctionnel, afin de reproduire l'arme chimique de Connor à grande échelle. Ou tout du moins en avoir assez avant de se mettre à chercher après les vaisseaux spatiaux des soi-disant extraterrestres de brume.

La jeune femme se pinça l'arrête du nez.

— Admettons qu'on trouve un laboratoire, qu'est-ce qui nous dit qu'on va réussir à le faire fonctionner ? Ou qu'on y trouvera tout ce qu'il nous faut pour reproduire cette chose, surtout si c'est en partie alien.

— Comprendre comment est-ce que le produit agit pourrait nous aider à fabriquer quelque chose de similaire, insista-t-il. J'étais un scientifique avant, je peux le faire.

Miranda le dévisagea de haut en bas, un sourcil levé.

— Toi, tu étais un scientifique ?

— J'étais... Étudiant dans un laboratoire... Enfin, j'y suis resté un an, après ça je me suis réorienté dans l'informatique.

Elle serra l'arête de son nez. Ce plan lui plaisait de moins en moins. Il sentait l'amateurisme et les problèmes.

— Et tu comptes reproduire un produit extraterrestre avec seulement un an d'expérience ?

— Je n'ai pas beaucoup mieux à proposer, désolé.

Miranda soupira. Ils n'étaient pas plus avancés. Même s'il trouvait un laboratoire, cela faisait plus de deux ans que toute électricité avait disparu. Leurs investigations n'aboutiraient à rien à moins d'un miracle.

La jeune femme se laissa tomber contre le dossier du canapé et posa sa tête entre ses mains, désespérée. Elle se massa les tempes pour calmer son mal de tête naissant.

Toute cette histoire avait pris des proportions ridicules. C'était la fin du monde, et c'était comme si ça ne leur suffisait plus. L'humanité courait à présent volontairement vers sa perte et son extinction. L'homme méritait peut-être de disparaître après tout. Ils avaient donné à cette planète tout ce qu'ils avaient à donner. Laisser la place à une autre biodiversité rendrait service à la Terre.

Et pourtant, s'il restait un espoir, un infime espoir de sauver ce qu'il restait de leur civilisation, de quel droit le refusait-il ? N'était-ce pas leur devoir de faire tout ce qui était possible pour sauvegarder leur espèce ?

Loin de se démonter, Frédéric sortit une carte de la région et l'étala sur la table basse. Miranda le regarda faire d'un oeil éteint. Elle n'y croyait plus, contrairement au jeune homme qui traçait déjà des lignes avec son doigt, à la recherche de quelque chose.

— Là ! clama-t-il, triomphant. Boeretang. Je savais que ce nom me disait quelque chose. Il y a un centre d'étude sur l'énergie nucléaire dans cette ville. S'il y a un endroit où l'on a encore la chance de trouver de l'électricité, c'est là. Après tout, ça a été conçu pour limiter les radiations, ils chercheraient forcément à s'assurer que ça reste comme ça, même en cas de fin du monde.

— Ou bien le laboratoire a laissé fuir les radiations dans l'atmosphère et on va tous finir carbonisés ou avec un cancer. Personne ne s'attendait à une fin du monde. On n'est pas dans un film catastrophe.

— C'est notre meilleure chance, insista-t-il. Faites-moi confiance. C'est à environ deux ou trois jours de marche. On peut aussi chercher une voiture et tenter d'y aller en petit groupe en quelques heures. Toi, moi, le gars bizarre de l'espace. On s'en sortira mieux qu'avec tous les autres. Ils restent ici à garder le camp, on est de retour avant la semaine prochaine.

Miranda garda les yeux sur la carte, songeuse. Elle ne croyait toujours pas à une issue favorable de cette quête vaine, mais il s'agissait d'une belle occasion de se débarasser de Bruce et des autres pour de bon. Si elle prenait les jumelles avec eux, ils n'auraient pas besoin de revenir ici. Elle se mordit la lèvre. Il valait mieux ne pas parler de cette partie du plan avant qu'ils ne soient loin de Bruges.

— D'accord, concéda-t-elle. Je marche. On peut toujours essayer. Si ça ne donne rien, eh bien... Il faudra continuer à chercher. En revanche, je ne laisse pas les filles toutes seules ici. Elles sont sous ma garde.

— Elles peuvent venir avec nous, mais... Enfin, c'est un peu dangereux. Ça m'étonne venant de toi. Tu n'es pas du genre à prendre des risques inconsidérés.

— C'est non-négociable, répondit-elle, glaciale.

Il leva les mains en signe de réddition.

Connor choisit ce moment pour entrer dans la pièce. Il dressa un sourcil devant la posture défensive de Frédéric, mais ne posa pas plus de questions. Tant mieux. Ils étaient peut-être en meilleurs termes qu'avant sa disparition au phare, mais Miranda avait toujours cette envie de lui exploser la figure qui la titillait. Certaines personnes n'étaient pas faites pour s'entendre, et de toute évidence, tous les deux faisaient partie de cette catégorie. Il avait juste une tête à claques.

— Des avancées ? demanda-t-il prudemment. Désolé, j'ai dormi un peu tard.

Miranda laissa le loisir à Frédéric de résumer leur conversation. Connor hocha la tête de temps à autre, et finit par approuver le plan, après n'avoir rien fait du tout pour le concevoir. Ils décidèrent de se laisser la journée pour se reposer et en parler à Bruce, puis de se mettre en route à l'aube. Bien sûr, les deux hommes lui laissèrent la tâche de prévenir le « chef » du groupe, prétextant qu'elle le connaissait mieux qu'eux et saurait le convaincre plus facilement.

La jeune femme jura, mais se décida à y aller, les épaules basses, comme une condamnée dans le couloir de la mort.

Miranda descendit les marches de l'immeuble pour rejoindre l'extérieur, où Bruce organisait des groupes de ravitaillement qu'il envoyait fouiller des quartiers précis de la ville. Son système se révélait efficace, si ce n'était sa gestion catastrophique des réserves qui mettait Miranda sur les nerfs. Tout le monde pouvait se servir à sa guise, ce qui contraignait les éclaireurs à risquer leur vie bien plus que nécessaire.

La jeune femme le laissa terminer son discours, en arrière. Bruce lorgna dans sa direction, puis fit signe aux groupes de se disperser. Ils saisirent leurs sac-à-dos et trottinèrent vers différentes artères de Bruges. L'homme s'étira comme un chat, puis la rejoignit, un sourire charmeur aux lèvres.

— Attention, je pourrais bientôt penser qu'tu peux plus te passer de moi, ma macreuse.

— Ce n'est pas le cas. D'ailleurs je venais t'annoncer que je partais.

— Ah, on s'en va déjà ? T'aurais dû me prévenir plus tôt, j'aurais...

— Non, tu ne m'as pas compris. Je pars, seule. Enfin pas seule, avec Connor, Frédéric et les jumelles. On doit continuer notre enquête et ce n'est pas en restant coincés ici que l'on progressera.

— Tu crois que tu va me l'affûter comme ça ? C'est pas ce qu'on avait convenu ! haussa-t-il la voix.

Miranda eut un mouvement de recul involontaire. Elle avait presque oublié la raison première pour laquelle elle avait fui son groupe, ses crises de colère.

— T'avais promis de nous trouver un endroit sécurisé pour faire notre base. On a accepté de faire un détour par ici pour combler ton syndrôme du héros, mais on va certainement pas moisir dans cet immeuble merdique.

— Je n'ai pas dis que je ne reviendrai pas. La ville où l'on se rend est à deux heures en voiture, trois ou quatre jours à pied.

— Prends-moi pour un con ! Tu prends les gamines avec toi, bien sûr que tu ne comptes pas revenir ! Tu m'as fait le même coup la première fois. « Oh Bruce, je vais chercher des ressources avec la vieille bique, on sera rentré ce soir ! ». Mon cul, oui ! Tu crois que tu vas me rouler encore une fois, petite fouine ?

— Je t'aurais bien pris avec moi, insista-t-elle, de plus en plus décontenancée, mais ils ont besoin de toi ici. Tu as un groupe maintenant.

Le visage de son interlocuteur prit une teinte rouge. Il serra le poing, puis le lança en direction de son visage. Miranda l'esquiva d'un pas sur le côté.

— Ne fais pas ça, supplia Miranda. Tu sais très bien pourquoi je me suis barrée la première fois. Je vois que t'as changé. Tu es plus stable, tu prends plus soin d'eux. Ne fous pas tout en l'air en leur montrant ton vrai visage. Ce n'est pas ce qu'ils ont envie de voir. Tu veux vraiment qu'ils te craignent tous ? Quel bien est-ce que ça a fait la première fois ?

Il garda le poing serré, mais détendit son épaule.

— C'est toi qui m'a poussé à bout. Je ne voulais pas... Ce n'est pas...

— C'est ce que disent tous les mecs violents. C'est toujours la faute de la victime. Je te méprise. Du plus profond de mon âme. Et je ne te le pardonnerai jamais. Mais tu peux encore faire les choses bien ici. Avoir une chance de te rattraper. Ne fous pas tout en l'air et laisse-moi partir. Je n'ai plus peur de toi.

Bruce baissa la tête, vaincu, et soupira. Il se détourna d'elle et ramassa son sac-à-dos pour partir à la suite d'un groupe de survivants qui l'attendait un peu plus loin.

— Disparais. Fais ce que tu veux. J'en ai plus rien à foutre.

Ça suffit à Miranda. Sans un mot, elle tourna les talons et regagna le hall d'entrée.

— Ma mésange ? appela la voix de Bruce.

Elle se retourna vers la direction de sa voix.

— Bonne chance sur les routes. Et reste en vie.

Elle hocha la tête et remonta vers son appartement. Son coeur battait la chamade après cet échange qui aurait pu très mal tourner. Peut-être Bruce était-il capable de faire les bons choix après tout. De là à lui manquer ? Non, quand même pas. Elle ne s'était jamais sentie aussi libre que le jour où, le visage balafré par un excès de colère, elle avait pris la fuite avec Louise. Comme beaucoup de victimes avant elle, elle espérait qu'il avait changé. Il venait de lui prouver que c'était toujours en lui.

Il était temps de partir.

Elle poussa la porte de « son » appartement. Macron lui passa entre les jambes, la queue haute, content de la revoir. Les jumelles levèrent à peine la tête du canapé pour la regarder, le nez plongé dans des bandes dessinées que Frédéric avait déniché dans les toilettes. Miranda n'était pas sûr que ce soit adapté à leur âge. Sea, Sex and Deuche n'avait pas l'air d'un titre à mettre entre les mains de jeunes filles. Néanmoins, tant qu'elles étaient diverties, ça lui allait.

— On va devoir partir, leur annonça-t-elle. Demain.

— Pourquoi ? s'inquiéta Rose. On est en danger ?

— Non. J'ai des affaires à régler dans une autre ville, et je ne vous laisse pas ici. Remettez vos sacs-à-dos en ordre et allez vous reposer, on part tôt. D'accord ? Je suis désolée de vous imposer ça, mais vous serez plus en sécurité avec moi qu'ici.

Les deux fillettes se lancèrent un regard inquiet. Blanche se leva sans un mot et commença à rassembler ses affaires. Miranda la suivit du regard. Toujours aucune expression. Ce voyage lui permettrait au moins plus de proximité pour tenter d'en discuter avec elle.

Rose en revanche mit instinctivement une main à la bouche pour se ronger les ongles.Miranda posa une main douce derrière sa tête et l'encouragea à en faire de même. La petite transpirait l'anxiété. Miranda espérait qu'elle faisait le bon choix en les laissant venir avec elle. Frédéric avait raison sur un point : elle ne pourrait pas assurer éternellement leur protection sur les routes. Elles allaient devoir devenir plus autonomes. Elle allait devoir leur apprendre quelques bases de survie, juste au cas où les événements se passaient mal. Si elle venait à se faire tuer, elle devait pouvoir se débrouiller seules et sans aide.

Dans un soupir, elle se dirigea vers son sac-à-dos et commença à réorganiser ses affaires.

Il était décidément temps de partir.

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