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LeLapinaPlumes

- 10 -

De : Type de la boulange

Tu étais beau quand tu dormais ce matin. Comment vas-tu ?

De : Eliott

Seulement quand je dors ?

Pas d’amélioration pour le moment, le nouveau scanner ne montre rien de différent. On verra dans les semaines à venir. Ma mère pense qu’il la reconnaît. Je verrais ce soir avec le médecin après les cours. Je dormirai chez moi.

De : Type de la boulange

D’acc. J’irais bouffer chez mes parents alors, ça fait trois jours que ma mère me tanne.

Eliott sourit à son écran et Jules le lui enleva des mains pour le remplacer par un croissant et une pomme.

— Mange, sinon il va m’arracher les yeux.

— Qui ?

— Le Pape. » Jules leva les yeux au ciel, singeant l’exaspération. « Ton mec pardi, qui veux-tu que ce soit d’autre ?

— Pff.

Eliott dévora les deux viennoiseries et, fait plus rare, la moitié de la pomme aussi avant de se déclarer repu. Il l’ignorait, mais il était victime d’un sombre complot consistant à toujours laisser à sa disposition les quelques aliments qu’il mangeait sans même s’en rendre compte. Depuis un mois, depuis qu’il vivait chez lui presque un jour sur deux puisqu’il n’avait plus besoin de veiller sur son père à domicile, Mathis avait compris que la maigreur d’Eliott était un réel trouble alimentaire et que c’était bien plus compliqué que ce que les clichés sur l’anorexie véhiculaient. Eliott ne se trouvait pas gros, il admettait même sans effort qu’il était trop maigre. Simplement, il ne pouvait pas manger. La nourriture ne l’attirait pas, voire lui donnait des nausées. Il refusait de rencontrer un médecin, arguant qu’il se gérait très bien, et qu’il n’allait pas mourir de faim. Lors de la dernière soirée de sa promo, à laquelle Mathis était venu le chercher, ce dernier s’en était ouvert à Jules, qui partageait ses inquiétudes, et les deux s’étaient revus pour en parler plus longuement.

C’est ainsi que depuis quinze jours, Eliott avait au moins un aliment qu’il adorait entre les mains le midi. Des semaines durant, Mathis avait testé ses goûts. Il savait que les croissants étaient un acquis, mais il ajoutait souvent différentes viennoiseries, toujours abandonnées par l’étudiant, ou d’autres denrées. Fruits, légumes crus, barres chocolatées, sandwiches maison, il avait essayé à peu près tout ce qui lui passait par la tête et qui pouvait se manger machinalement, penché sur un bouquin de cours. Jules avait adopté le même genre de technique sans vraiment y penser, et à eux deux ils avaient réussi à s’organiser pour qu’Eliott fasse au moins deux semblants de repas par jour. Ils étaient assez fiers d’eux.

**

— Tu crois que je peux te présenter à mon père ?

Mathis tressaillit. Eliott était blotti contre lui, sous la couette. Il avait passé une main sous son t-shirt et lui caressait le torse du bout de l’index, la tête nichée dans le creux de son épaule. Mathis pianotait au bas de son dos. Il embrassa les boucles brunes, y dissimulant un sourire.

— Bien sûr, quand tu veux. C’est toi qui sais.

Ses doigts glissèrent dans les mèches sombres, jusque sous le menton du jeune homme. Il lui fit relever le visage pour poser ses lèvres sur sa bouche.

Eliott vint aussitôt caresser sa langue de la sienne. Mathis les fit basculer, allongeant Eliott sous lui pour mieux plonger les deux mains dans les boucles brunes. Il adorait les cheveux de l’étudiant. Fluides et soyeuses, ses ondulations épaisses s’étalaient sur l’oreiller comme une couronne.

Il se redressa sur les coudes pour l’admirer, et les pommettes du jeune homme rosirent délicieusement.

— Quoi ?

— Rien. Tu es beau.

De roses, les joues de l’étudiant virèrent au rouge. Mathis les croqua, puis musa dans le cou qu’Eliott avait arqué pour mieux le laisser y fouiner avant de se blottir contre lui, inversant les rôles en venant glisser sa tête au creux de son épaule et les doigts sous son t-shirt pour caresser le ventre plat.

Eliott inspira brusquement lorsque la main, chaude, du boulanger se posa sur son nombril. Depuis un mois, depuis leurs premiers baisers, Mathis ne l’avait jamais touché que légèrement, avec douceur, et sans jamais chercher autre chose que de la tendresse. Pourtant, ils vivaient presque ensemble. D’une nuit tous les quinze jours, ils étaient passés à une nuit sur deux, puisqu’Eliott n’avait plus de contrainte chez lui et que Mathis habitait tout près de l’université. Quand Mathis travaillait, Eliott s’adaptait à son rythme, quittant le bureau tôt le soir pour se borner à réviser en lisant au lit, une main perdue dans le cou ou le dos de Mathis, qui se tournait de manière à ne pas avoir la lumière dans les yeux. Parfois il s’éveillait lorsque le réveil du boulanger sonnait et échangeait quelques mots avec lui, mais le plus souvent il se contentait d’un baiser et replongeait dans le sommeil pour deux bonnes heures. Les journées de repos du boulanger, comme ce soir-là, ils veillaient plus tard et Eliott s’octroyait une véritable pause, ils visionnaient un film en grignotant, et surtout ils passaient un temps infini blottis sous la couette à bavarder en se caressant. Chastement.

— Mathis ?

— Mmh ?

Eliott se tortilla un peu, parce que la main musclée sur son ventre lui donnait chaud. Vraiment chaud.

— Pourquoi tu… est-ce que tu…

Mathis se redressa sur un coude pour l’observer, intrigué par tant d’hésitation. Eliott était écarlate, et tourna la tête pour ne pas avoir à croiser son regard.

— Non, rien.

— Ça n’a pas l’air d’être rien. Carrément pas. Dis-moi, Eliott.

Le garçon cacha son visage dans ses paumes et murmura d’une petite voix :

— Ta main. Elle me donne chaud, mais…

— Mais ? encouragea le boulanger, intrigué et même vaguement inquiet.

— Mais tu… tu… » Eliott inspira comme pour se donner du courage et débita d’une traite : « mais tu la laisses toujours là sans demander plus comme si tu… tu n’avais pas envie de… de… moi.

— Oh, bon sang…

Mathis enfouit son visage dans le cou de l’étudiant en gloussant tout bas.

— Pardon. Je suis désolé. Je ne…

Mortifié, Eliott tenta de se dégager pour lui tourner le dos. Mathis le retint.

— Non ! Excuse-moi Eliott, je n’aurais pas dû rire c’est juste… Nerveux.

Il se redressa sur ses deux coudes, glissant les doigts dans les boucles brunes pour libérer la figure du jeune homme et planter son regard dans le sien.

— Nerveux parce que je me retiens de… si tu savais…

Mathis se mordillait la lèvre tant il était anxieux, et Eliott le remarqua, ce qui l’apaisa un peu. Ses poings serrés se délièrent et ses mains se nouèrent dans le creux du dos du boulanger.

— Si tu apprenais pourquoi je nous fais toujours basculer comme ça au bout d’un moment tu… rirais tout pareil, je crois.

Lui aussi était écarlate à présent, et il chercha du réconfort dans le regard du brun pour finir par avouer :

— Parce que comme ça je peux cacher mon bassin contre le lit.

Eliott pouffa.

— Vraiment ?

— Vraiment.

— Genre… Là ?

— Genre. Ouais.

— Laisse-moi voir !

— Putain Eliott non ! C’est beaucoup trop embarrassant, OK ?

Eliott lui pinça le flanc. Il couina et s’écarta. Juste assez pour que l’étudiant passe une main entre eux et les fasse pivoter, plaquant le blond au matelas et se jetant sur lui pour le chatouiller encore. Mathis gloussa et riposta, mais Eliott semblait d’une agilité remarquable et le boulanger dut s’avouer vaincu en quelques instants alors que le maigre brun s’installait à califourchon sur ses cuisses et retirait toute la couette qui lui bouchait la vue. Le rouge lui monta à nouveau aux joues en constatant que le jeune homme ne lui avait pas menti.

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