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Seocha
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XXI. Le rêve blanc

Asthar

Aussi longues et profondes que puissent être les Ténèbres nocturnes, la lumière du jour finit toujours par les dissoudre tels des guerriers solaires gagnant leur bataille quotidienne.

La nuit fut affreusement longue.

Boggan avait raison: le rêve se répétait encore et encore, dès l'instant où mes yeux se refermaient jusqu'à ce qu'une main inconnue me happe pour m'en sortir.

Le petit dragon de cuivre, à mes côtés, n'avait rien rajouté au sujet de la magie où des visions.

Il n'y avait rien à dire. Alors il se contentait de rester à mes côtés et de me réchauffer doucement. Grâce à cela, je ne me sentais pas complètement seul.

Passant une énième fois la main dans mes cheveux trempés de sueur, je réfléchis aux dernières années à Tohrin Mar.

Ai-je seulement déjà rêvé là-bas ?

Je n'avais jamais pris le temps de me poser la question. Ce que je voulais, c'était savoir.

Ce que je voulais, c'était partir.

J'avais oublié, un instant.

Je détestais être apprenti. Je détestais les autres érudits, les jeunes comme les doyens.

Les uns me méprisaient d'apprendre plus, et plus vite, comme un acharné.

Les autres méprisaient ma jeunesse et ma volonté d'aller au delà des murs de la Citadelle des Savoirs.

Je m'en rends bien compte, si j'ai hérité de cette mission confié par le Conseil des Rois, c'était avant tout car les doyens espéraient se débarrasser de moi.

Mais les Draconistes, bien que fiers et peu enclins à me délivrer leurs secrets, sont bien moins cruels et mauvais que ce qu'ils peuvent paraître aux yeux de ceux d'en bas.

Et je suis le premier à devoir le faire savoir.

Je jette un regard à l'autre bout de la pièce, ou se trouve mon carnet ouvert et dont les pages noircies de notes formaient l'ébauche de mon premier rapport pour le Conseil des Rois.

Aux premières lueurs matinales, je terminerai ma première lettre à envoyer.

Je me décide à quitter la tiédeur de ma couche pour me préparer à la tâche, quand soudain, je tombe.

Je n'entends aucun bruit de chute.

Je ne me cogne pas.

Il n'y a rien autour de moi.

Tout est blanc.

Je ne sais plus si je tombe, si je vole ou si je suis juste immobile.

L'air est glacial, mes poumons se refroidissent à chaque respiration. Ma peau se met à bleuir, et mes pieds et mes mains sentent vivement la morsure du froid.

Tout est lié, Asthar.

La peur se saisit de moi, mon corps ne cessant plus de trembler.

Suis le fil de ta Destinée.

Je ne comprends plus rien, et je n'arrive pas à parler. Je voudrais poser des questions mais je ne sais même pas d'où vient cette voix.

D'ailleurs, est-ce une voix ?

Suis-je à nouveau dans un rêve ?

Une bourrasque me secoue de part et d'autres, rendant au monde le haut et le bas.

Il y a un sol, couvert de neige, et la roche n'est plus perceptible après la tempête. Aucune trace de pas autour de lui.

A quelques mètres de lui, un chalet noyé du blanc duveteux de la neige.

Pas le sien. Et d'ailleurs, il ne l'avait pas encore vu à la Cîme, celui-là.

Il était bien plus haut.

C'était celui de l'Aïeule.

*****

Boggan sursauta, sentant une vague de magie puissante agir.

Il ne se souvenait pas s'être endormi, pourtant. Mais Asthar ne se trouvait nulle part.

Se précipitant vers la porte, il constata vite que la neige bloquait l'entrée. Le jeune homme n'aurait jamais pu sortir sans que le dragon ne s'en rende compte.

Le petit reptile se faufila alors le long de la cheminée et s'envola dans les airs.

Le vent glacial rafraîchit soudain ses ailes, faisant cliqueter ses écailles: par sa petite taille, il supportait le froid moins longtemps que ses congénères, il ne devrait pas rester dehors longtemps, avec un temps aussi blanc.

Rien ne bougeait, pas âme qui vive à cette heure n'était sorti de chez lui. Tous les Draconistes savaient l'ampleur de la tâche que ce serait d'enlever la neige, et les lendemains de tempêtes, ils n'étaient pas pressés de sortir de leurs foyers chaleureux. En tout cas, bien moins pressés qu'un jeune érudit de la ville.

Aucune trace de pas ne fendait la neige aux alentours. Boggan activa frénétiquement ses ailes, se faufilant de partout pour trouver une trace de son humain.

Mais dans le village, rien.

Il ne restait qu'un seul endroit. Sinon, il devrait aller chercher de l'aide.

Asthar se tenait devant le chalet de l'Aïeule.

Autour de lui, la neige formait un cercle vigoureux. Mais aucune trace de pas. Il se tenait là, en tenue de nuit, les pieds et mains nous, littéralement frigorifié.

Boggan fut soulagé. Il était en vie.

Il fonça vers lui et se nicha dans son cou.

- Mais qu'est-ce que tu fais là, mon grand ? Regarde dans quel état tu es ?

- J-j-j-je n-ne c-c-comprends p-pas ce qu'il s-se p-passe...

Asthar bleuissait à vue d'œil, l'air froid et pauvre en oxygène le figeant lentement. Il fallait qu'il atteigne la maison en face de lui.

Boggan savoir que les Draconistes n'aimaient guère qu'on s'approche de chez l'Aïeule. Mais dans son état, le pauvre érudit mourrait avant de redescendre au village.

- Il semble que les Dieux ne sont pas enclins à te laisser mener une vie paisible, jeune Asthar de Minthe.

La femme aux airs d'éternité avait ouvert sa porte, et se dirigea vers le garçon. Elle déposa une main sans âge mais calleuse sur le front du garçon.

La chaleur qu'il s'en échappa à cet instant rendit à Asthar sa respiration et sa mobilité. Il avait toujours froid, l'air glacé lui mordait le visage, mais il ne se sentait plus piégé dans l'air glacial de la montagne.

Il ne comprenait plus rien.

- Tu n'es plus en âge d'être porté, et je n'ai plus l'âge de le faire. Suis-moi.

Elle se dirigeait chez elle, et le jeune homme se demandait bien s'il avait ne serait-ce que le droit de franchir le seuil de la demeure de l'Aïeule du village. Cependant, Boggan à son cou il ne se sentait pas seul.

Il fit son premier pas dans la neige.

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