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Chiara
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Prologue

Ses pas résonnent sur la pierre noire obsidienne au sol. Sa respiration est amplifiée par l’écho des souterrains. L’eau qui perle sur les murs tellement il fait humide se reflète dans la lumière de la torche. Le bruit assourdissant des gouttes qui tombent à terre à rythme régulier lui rappelle le temps qui passe. Ça le rend nerveux. Un gros rat noir passe juste devant lui. Son regard jaune croise le sien juste avant qu’il ne s’enfuie dans les souterrains. Un frisson de dégoût parcourt son corps. Kieran déteste descendre dans les cachots.

La chaleur et la Lumière d’Arietis lui manquent. Retourner au palais d’Éris après des semaines à bénéficier des rayons du Soleil le déprime. Malheureusement, en tant que Roi, il ne pouvait déserter indéfiniment son royaume. Hydrae a besoin de lui. Du moins, c’est ce qu’il se dit pour se rassurer. La vérité est que s’il avait eu le choix, il serait resté au palais d’Ignis. Mais il ne l’a pas eu, ce choix, et tant mieux. Partir lui a rappelé ses responsabilités.

Le mur d’Ombres se fragilise toujours plus et il doit constamment le renforcer. Ça l’épuise, mais il doit préserver l’équilibre de ses terres. Il ne manquerait plus que le mur s’effondre et que n’importe qui puisse pénétrer dans le Royaume de l’Aether. Son peuple se porte bien mieux depuis que les autres ignorent ce que renferme Hydrae. Cependant, retrouver l’obscurité et l’humidité ne réjouit pas Kieran. Certes, Hydrae est une terre riche en ressources et en beautés, mais depuis qu’il a rencontré Aliona, tout dans sa vie manque de Lumière quand elle n’est pas là. Son regard se perd un instant en regardant la danse des ombres que son flambeau crée sur le mur. L’Ombre ne peut vivre sans Lumière et lui ne peut plus vivre sans elle…

Juliette était ravie de retrouver la quiétude de leur palais. Éris est la capitale d’Hydrae, en plein cœur du Royaume. À peine étaient-ils arrivés qu’elle s’est empressée de se rendre aux écuries pour retrouver sa jument, Némésis. Juliette a besoin du calme de leurs terres. Vivre au palais d’Ignis était trop pour elle, ses pouvoirs étaient sans cesse sollicités. Elle entendait toutes les voix et pensées des personnes qui l’entouraient. Un brouhaha incessant qui lui causait de violentes migraines. Retrouver son chez-soi, ses livres, ses plantes, ses potions et son cheval lui a fait le plus grand bien. Elle se porte beaucoup mieux depuis. Jamais Kieran n’aurait dû l’emmener à Arietis, mais elle a insisté et il a cédé. Par pur égoïsme, il doit bien l’admettre. Il avait besoin d’une présence familière et rassurante auprès de lui pour parvenir à se maitriser. Depuis leur naissance, ils sont inséparables. Chacun est le pilier de l’autre. Lui la soutient quand les voix lui font perdre la tête et elle empêche les Ombres de totalement le submerger. Bien évidemment, ils sont au courant des rumeurs obscènes qui courent à leur encontre, mais ils n’en ont que faire. Que les gens pensent ce qu’ils veulent, eux, ils connaissent leur vérité.

Kieran atteint enfin la dernière porte qui mène à la cellule qu’il est venu visiter. Cela fait des années qu’il n’y a pas mis les pieds. Au fond, il a de la peine pour cet homme derrière les barreaux. L’ivresse du pouvoir lui a fait perdre la raison. L’isolement dans une cellule froide et humide ne doit pas être d’une grande aide. Si les gardes ne venaient pas lui donner à manger, l’homme pourrait tout aussi bien être mort que Kieran ne s’en serait pas aperçu. Cela lui ôterait une grosse épine du pied s’il rejoignait les Étoiles…

Kieran secoue la tête pour écarter ses pensées et se composer un visage neutre. Il doit être à la hauteur de sa réputation de prince des Ténèbres. Le regard dur, il fait signe à l’homme qui garde l’entrée de lui ouvrir. La clef tourne dans la serrure. Le mécanisme gronde alors que le loquet se lève. La porte s’ouvre en grinçant sur ses gonds. Ils auraient bien besoin d’être huilés. L’odeur qui émane de la pièce est nauséabonde. Un frisson parcourt l’échine du jeune monarque.

La cellule est sombre. Une chandelle éclaire un homme à même le sol jonché de carcasses de rats. Son corps autrefois puissant et athlétique est désormais rachitique. Ses cheveux ont poussé avec les années ainsi que sa barbe. Doucement, le vieillard lève les yeux en direction de celui qui daigne lui rendre visite. Son regard gris s’illumine de cette lueur de folie que Kieran lui a toujours connue. Il fixe avec convoitise la chevalière de Kieran.

—   Un jour, elle sera à moi, tu le sais, dit-il d’une voix éraillée de celles qui ne servent pas souvent.

—   Il faudra d’abord me tuer pour ça, rétorque Kieran après un silence. Quand bien même tu mettrais la main sur ma bague, il te manquerait encore les quatre autres pierres pour arriver à tes fins.

Un sourire carnassier se dessine sur les lèvres du prisonnier. C’est le même dialogue chaque fois que Kieran descend lui rendre visite. Le pauvre fou parle en boucle de sa chevalière et des pierres qui lui permettront de devenir omnipotent.

—   Mon fils me donnera celle d’Aquilae, il ne m’en manquera que trois.

—   En parlant de ton fils, il va se marier, enchaine Kieran. À la reine d’Arietis.

Le regard du prisonnier s’illumine davantage.

—   Plus que deux et même toi tu ne pourras plus m’enchainer.

—   Cela ne risque pas, il te pense mort.

—   Comme tout le monde.

Kieran s’accroupit pour faire face à son interlocuteur. Il prend le temps de dire chaque mot en savourant leur prononciation.

—   Tu aurais dû voir sa tête quand je le lui ai dit en face, Aeolus.

Le regard du vieux roi d’Aquilae quitte la chevalière de Kieran pour se poser sur son visage. Il prend le temps d’examiner chaque trait du visage de son tortionnaire. Ses yeux traduisent tout ce qu’il lui fera si un jour il arrive à se défaire de ses chaines.

—   C’est lui qui t’a amoché ainsi ? demande le vieux Roi d’Aquilae, un sourire en coin.

Kieran se relève brusquement. Son visage porte encore les marques de son affrontement avec Jonas. Il ne pouvait pas contre-attaquer sans se trahir. Personne ne doit savoir qu’il maitrise ses pouvoirs. Ce serait la panique totale dans les cinq royaumes. Le coup d’éclat de Jonas fera suffisamment parler de lui. Heureusement qu’Aliona, elle, s’est montrée discrète sur le réveil de ses pouvoirs.

—   Dis-moi comment démanteler les Nouveaux dévots, grogne Kieran qui perd patience et souhaite en venir droit au but de sa visite.

Le visage d’Aeolus se déforme d’une étrange manière. Son corps se secoue alors qu’il se met à rire d’un rire dément.

—   Le projet des dévots est plus grand que toi et moi. Tu devrais le savoir mieux que quiconque, la magie c’est le pouvoir. Toi et moi nous sommes pareils. Nous sommes faits pour asservir les autres et réunir les pouvoirs des Dieux. Tu pourrais restaurer la grandeur de ton royaume, t’élever dans la lignée de tes ancêtres. Tu sais : Quand les étoiles brilleront, les Ombres trembleront.

En entendant la prophétie, la colère ne fait qu’un tour dans le sang de Kieran. Il se précipite vers le vieil homme à terre et l’attrape par le col pour le mettre à sa hauteur.

—   Écoute-moi bien, pauvre fou, crache Kieran entre ses dents. Jamais Hydrae ne retombera dans ses heures sombres. Je ferais tout pour contrer cette folie que tu as déclenchée et quand ton œuvre s’effondrera je me tiendrais face à toi pour te voir tomber avec.

Aeolus retombe lourdement sur le sol et un rire secoue à nouveau sa carcasse décharnée.

—   Il vaut mieux pour toi que tu aies raison. Les Ombres seront sans pitié pour les impies. Omnis est le seul dieu qui mérite notre allégeance. Il nous faut restaurer la grandeur !

Kieran quitte la cellule sans se retourner. Le mur ne peut faillir. Il doit protéger Hydrae. Son royaume a connu trop d’adversité. Il ne peut laisser les Ombres se libérer. Il finira bien par trouver un moyen d’empêcher ces maudites prophéties de se réaliser, même si pour ça il doit mettre son bonheur de côté.

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