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Chapitre 7

La nuit tombait doucement, Nela continuait de s'enfoncer dans la forêt de plus en plus sombre, commençant à regretter son numéro de rebelle, face à la brume qui s'installait petit à petit sous les crissements des feuilles fâchées par le vent. Fatiguée, elle s'appuya contre un arbre pour reprendre son souffle, quand elle entendit une branche craquer non loin d'elle. Elle se redressa rapidement, observant le paysage autour d'elle, mais elle ne vit rien. Elle attacha ses longs cheveux, ne voulant pas être gênée. Elle avait peur, ses mains étaient moites, des gouttes de sueur perlaient sur son front. De nouveaux craquements se firent entendre, plus proches cette fois. Réellement effrayée. Elle en était sûre, elle n'était pas seule. Les jambes molles et le souffle court, elle repéra discrètement d'où venaient les bruits de pas. Tout en surveillant ce qu'il se passait aux alentours, elle saisit alors un bout de bois assez solide et s'adossa à un tronc.

Soudain, un énorme cheval noir apparut entre deux arbres, chevauché par un être en cape noire avec une large capuche qui cachait son visage. Prise de panique, Nela se mit à courir dans les bois, affolant le cheval qui se mit au galop, la suivant jusqu'à être à sa hauteur. Le cavalier l'attrapa par le bras et la fit grimper sur le majestueux animal. Après quelques minutes de galopade, l'animal ralentit, passant par un chemin étroit bordé de palmiers, pour arriver à la lisière de la forêt du côté de la plage. Nela profita de cet arrêt pour sauter à terre.

— Mais ça va pas ? Vous auriez pu m'écraser, vous avez vu la taille de ce truc ? Faut être malade pour monter là-dessus. Imaginez que vous me ratiez, hein ? Ou si j'avais trébuché ? Hurla-t-elle, folle de rage, à l'adresse de son kidnappeur.

— Heureusement, rien de tout ça n'est arrivé, répondit l'autre en riant et en mettant pied à terre.

Reconnaissant ce rire, Nela réfléchit un instant en observant l'énigmatique personne qui se tenait en face d'elle.

— Oui, c'est moi Nela. Il fallait bien que quelqu'un vienne te chercher. Je me suis dit que ce serait une bonne occasion pour nous réconcilier, avoua Fleure, ôtant sa capuche.

Nela se jeta dans ses bras, laissant couler quelques larmes de soulagement. Les deux filles marchèrent sur la plage, suivies par le cheval assagi.

— Mais où est-ce que tu as trouvé cette bestiole ? demanda Nela.

— Je l'ai appelé Diablo. Et c'est grâce à lui que je t'ai retrouvée, alors sois reconnaissante.

— Ça ne répond pas à ma question, insista-telle.

La jolie brune prit son amie par le bras pour l'arrêter, il était temps de mettre les choses au clair.

— Écoute Fleure, maintenant, il faut que tu me dises ce qu'il se passe, tu ne pourras pas te cacher toute ta vie. Parle-moi, je sais que quelque chose te tracasse. Je suis ton amie, et les amis servent à cela.

Fleure soupira, mais comprenant qu'elle ne pourrait pas fuir éternellement, elle finit par lâcher prise.

— J'ai découvert mon pouvoir.

— Mais c'est génial ! Je comprends vraiment pas ta réaction !

— Tout ce que je dessine prend vie. Comme Diablo. Absolument tout ce que je dessine, et je ne peux l'effacer, se plaignit Fleure.

— Les tests et les entraînements vont t'aider à gérer ça, ce n'est pas un problème. Tu devrais être contente, beaucoup aimeraient être à ta place, croismoi...

— Non pas du tout ! Tu vois, tu ne comprends pas. Le dessin est tout ce que j'ai dans ma vie, c'était mon avenir, comment vais-je faire pour devenir peintre maintenant ? Mes parents vont me tuer, ils ont toujours voulu que je fasse ça, ils investissent beaucoup pour assurer ma carrière, et moi je ne pourrai plus jamais dessiner sans provoquer de catastrophe !

— Au contraire, c'est un don. Tu pourras faire bien plus que de simples dessins. Tout ce que tu fais prend vie, imagine tout ce que tu pourras accomplir grâce à ce pouvoir. Regarde, en quelques instants, tu as fait naître un magnifique et vraiment énorme cheval alors que tu n'as aucune expérience. Imagine après trois années d'entraînement intensif... Fit Nela rêveuse, tout excitée en même temps par cette bonne nouvelle.

Fleure observa son amie occupée à lui lister tout ce qu'elle pourrait faire grâce à ce « don ». Elle saisit alors son carnet de dessins et dessina des dauphins sautant dans la vaste mer en face d'elle. Quelques secondes plus tard, ceux-ci se retrouvaient devant elles, sortant de l'eau pour faire de magnifiques figures.

Après deux heures de discussions, les deux filles rentrèrent discrètement aux dortoirs, abandonnant leur nouveau compagnon dans la forêt.

***

« Nela et Fleure dans mon bureau, tout de suite ! » informèrent les haut-parleurs accrochés au plafond de la salle de classe.

La journée n'avait même pas démarré que les ennuis commençaient déjà. Toute la classe se retourna vers elles, attendant une explication. Johanna leur lança un sourire compréhensif, quant à Alice, elle haussa les épaules, une moue dubitative aux lèvres suggérant que ce n'était peut-être pas grave.

Le professeur d'Histoire n'étant pas encore arrivé, les deux filles se levèrent pour quitter la salle, mais quand elles arrivèrent à la porte, Héléna provoqua Nela, soutenue par le rire de ses amies.

— À défaut d'avoir un pouvoir, tu sais bien trouver les problèmes, toi.

Serrant les poings, Nela s'arrêta. Trop, c'était trop ! Elle s'approcha de sa camarade et, dans un élan de colère, elle la frappa au visage sous les yeux stupéfaits de tous qui n'avaient pas entendu la réflexion d'Héléna.

— Mais tu es folle ! s'exclama, choquée, une amie de la victime.

— Non, mais ça va pas ? Qu'est-ce qu'il t'a pris de faire ça ? Renchérit une autre.

Nela et Héléna, face à face, le regard haineux, ne prêtaient attention à rien d'autre qu'à cette colère grandissante en elles. Mais Fleure saisit Nela par le bras, et l'emmena dans le couloir avant que cette situation ne dégénère davantage.

— Mais t'es dingue, pourquoi est-ce que tu as fait ça ? lui demanda-t-elle, surprise.

— Elle n'avait pas le droit de me dire ça.

— Mais te dire quoi ? Tu vas avoir des problèmes, c'est sûr...

— Cette fille est insupportable, elle se pense supérieure aux autres... Elle le sait, tout le monde sait à quel point ça me touche. Pourquoi elle fait ça ? Elle l'a mérité cette claque, crois-moi.

— Mais que t'a-t-elle dit ? Dis-moi !

— Non, ça n'en vaut pas la peine.

— Bon, comme tu veux...

Fleure n'osa pas insister, d'autant qu'elles arrivaient au bureau de Juliana.

La directrice adressa à Nela un avertissement concernant son comportement, la menaçant d'un travail supplémentaire si elle ne s'investissait pas plus dans ses entraînements, voire d'une expulsion si elle continuait de disparaître comme elle l'avait fait la veille. Elle voulait également prévenir Fleure que le cheval qu'elle avait créé avait été retrouvé avec son bloc ; il serait vendu à un marché aux enchères. Nela serait alors de corvée samedi et dimanche à titre de punition. Nettoyer le grand hall de fond en comble serait sa tâche. Quant à Fleure, elle était excusée pour cette fois. Nela restait figée devant Juliana, serrant un peu plus fort le bout des accoudoirs du fauteuil dans lequel elle était assise. Que pouvait-elle dire pour sa défense ? Rien. Elle était obligée de se taire, s'excusant, faisant des promesses qu'elle ne tiendrait sûrement pas. Personne ne semblait voir Héléna sous son vrai jour, personne ne semblait comprendre à quel point cette situation atteignait Nela. Elle n'était qu'une fille banale, obligée de faire semblant d'être extraordinaire, comment cela pouvait-il fonctionner ? Les larmes aux yeux, elle quitta le bureau sans un mot.

***

Lorsque vint l'heure du repas, le groupe d'amis se retrouva comme à son habitude, plaisantant sur des événements de la veille. Après s'être rassasiés, profitant des derniers instants de soleil, ils allèrent à la plage se baigner... Mais Nela aperçut Joey assis près d'Héléna, riant avec elle. Elle se contint d'abord mais quand sa camarade de classe posa ses lèvres sur celles de son frère, Nela entra dans une colère noire, se dirigeant vers eux d'un pas déterminé. Arrivée à leur niveau, un peu désemparée, elle s'arrêta un instant, scrutée par les deux tourtereaux. Les ongles plantés dans ses paumes, elle essayait de se retenir, mais elle n'y arrivait pas, elle prenait le comportement d'Héléna pour une attaque personnelle ! Alors, elle se jeta sur cette dernière, la projetant à quelques mètres.

La riposte ne fut pas longue à venir ! À tour de rôle à terre, elles entrèrent dans une lutte acharnée, en s'adressant des insultes incompréhensibles. La haine les habitait sans que personne ne n'en comprenne la raison. Depuis le début, elles étaient comme chien et chat. Joey essaya tant bien que mal de les séparer, mais aveuglées par la colère, elles ne se laissaient pas faire, trouvant une grande force au fond d'elles pour résister. Heureusement, Jack arriva rapidement, prévenu par Peter. Chacun des garçons prit une fille par la taille, s'en allant plus loin, tentant de garder le contrôle sur elles.

— Tu n'aurais jamais dû faire ça ! Tu vas le regretter Nela, je te jure, il vaut mieux ne pas m'avoir comme ennemie, tu croyais que je te pourrissais la vie, tu n'as encore rien vu, cria Héléna, emportée par Joey vers l'école.

— Tu crois que tu me fais peur ? Espèce de...

Jack resserra son étreinte, l'empêchant de s'agiter davantage. Elle tremblait beaucoup, elle suait. Son mentor ne l'avait jamais vue dans un tel état. Il écarta les cheveux de son visage, essayant de la calmer. Il plongea ses grands yeux verts dans les siens en lui répétant de respirer calmement.

Ses amis s'échangèrent des regards anxieux. Ces deux-là venaient de se déclarer la guerre et aucune des deux ne semblait être prête à lâcher prise. L'année risquait d'être mouvementée. Mattéo prit Nela par le bras, remerciant sèchement Jack, et la raccompagna à sa chambre. Surpris, le mentor de la jeune fille lança un regard à Johanna qui haussa les épaules avant que chacun regagne ses quartiers dans le calme absolu, la tête pleine d'interrogations. Mais que cachaient Héléna et Nela ?

***

Exténuée par sa semaine, Nela en avait oublié sa punition. Elle passa le weekend à exécuter ses corvées. Fleure dut arrêter l'atelier d'art le samedi matin, Juliana s'occuperait personnellement d'elle et de son pouvoir désormais ; il fallait croire que c'était quelque chose de peu commun. Quant à Peter, il découvrit également le sien, malheureusement, ça ne s'était pas très bien passé.

Alors qu'il était avec Hank, son professeur de tests, très bon boxeur, en train de planifier leur semaine, un moustique eut le malheur de venir se poser sur l'épaule du professeur. Agacé, Peter frappa l'insecte, par manque de chance, son pouvoir décida de se montrer à cet instant, et, de sa force surhumaine, il déboîta l'épaule de monsieur Hank, l'empêchant d'assurer ses cours pour quelques semaines.

Nela, qui avait passé son weekend à récurer des sols et étudier ses cours, n'avait en tête qu'une seule chose, et qui la mettait hors d'elle : c'était d'imaginer son frère avec cette Héléna sournoise et manipulatrice pendant qu'elle, se noyait dans son chagrin, parvenant avec difficulté à garder la tête hors de l'eau... Mais ça, Joey, hélas, n'en avait que faire ! son idylle amoureuse était bien plus importante.

Heureusement, Mattéo, lui, s'était montré présent, il avait avancé les devoirs de Nela pour l'aider. Non qu'il ait fait le travail à sa place — il appelait cela du « soutien » — mais il voulait seulement, de cette manière, aider son amie à oublier ses tracas. Pourtant, le lundi matin, tout lui revint en tête, devoirs faits ou non.

Cette journée commençait déjà mal ; sa première vision, au petit déjeuner, fut Héléna rejoignant la table de son frère et ses amis, puis Jack qui ne lui adressa qu'un bref regard au buffet. Par chance, Johanna et son incroyable bonne humeur étaient là pour lui redonner le sourire.

Ils étaient maintenant sept à avoir découvert leurs pouvoirs. Peter avec sa force surhumaine ; Chloé, la pro de la lévitation ; Martin qui découvrit son talent pour scruter les airs ; Lili qui contrôlait le feu ; Clotilde devenant invisible ; Simon le télépathe fou ; Sonia qui communiquait avec la nature ; sans oublier Fleure qui donnait vie à ce qu'elle dessinait. C'était assez impressionnant de les voir jouer avec leurs dons, surtout quand certains, comme Nela, doutaient qu'il y ait quoi que ce soit de magique en eux.

Pour Nela, les tests seraient d'ailleurs différents des autres, car, contrairement à ses camarades, elle n'avait aucune piste sur son potentiel pouvoir. Il fallait alors trouver ce qu'elle aimait faire, ce pour quoi elle était douée. Dans une petite semaine, les élèves entreraient dans la seconde moitié du mois d'octobre, ils devraient tous avoir au moins une idée de ce qu'ils étaient capables de réaliser. Madame Scofield, la future professeure de tests de Nela, lui fit essayer une trentaine d'activités durant la semaine afin de l'aider, mais rien ne se passait. Il fallait avouer que Nela était une vraie empotée. Les travaux manuels : non, elle avait deux mains gauches ! Intellectuels ? Non plus, elle était bonne élève, certes, mais pas assez pour être exceptionnelle de ce côté-là. Le sport ? N'en parlons pas, c'était une catastrophe. L'art enfin, trop ennuyeux pour elle.

La fin du mois risquait d'être intense pour elle, mais en attendant, il était prévu, ce weekend, de fabriquer de belles robes à l'atelier couture pour Johanna, Alice et Nela. Fleure, elle, n'avait qu'à la dessiner. Deux jours entre filles, sans devoirs, ni autres préoccupations que se reposer et rire, c'était le meilleur programme qu'elles pouvaient avoir.

Les cours du vendredi soir terminés, Nela se dirigea vers sa chambrepour se changer, déçue et fatiguée d'une semaine pour rien. Au fond d'elle,l'inquiétude remplaçait le doute. Était-elle capable, comme les autres d'unequelconque magie ? Alors qu'elle était perdue dans ses pensées noires, ellesurprit une étrange conversation...

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