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Julia_Roswell
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Chapitre 5

Ils reprirent leur route peu après leur échange avec l’homme, le cœur plus lourd mais l’espoir ravivé. Si cette femme existait, si elle était bien celle dont Ash s’était rapproché, alors ils devaient la retrouver. Coûte que coûte.

Les souterrains s’étiraient devant eux comme des intestins d’acier, tordus, sombres, résonnant de leurs propres pas. Cela faisait des heures qu’ils marchaient, sans croiser âme qui vive, uniquement des murs suintants, des ombres mouvantes, et des signes que la civilisation avait abandonné ces lieux depuis longtemps.

Nova sentit alors un tiraillement étrange dans son ventre, un nœud presque douloureux. Elle posa la main sur son estomac, perplexe.

— Qu’est-ce que…

Un bruit aigu s’échappa de son ventre, trahissant son état. Un gargouillis presque comique, bien qu’elle n’en riait pas.

Elian, un peu en avance, s’arrêta net et se retourna avec un petit sourire en coin.
— Tiens donc… on dirait que la guerrière intrépide n’est pas invincible après tout.

Elle lui lança un regard faussement noir, mais ses joues rosirent légèrement.
— C’est pas ma faute si mon estomac décide de parler à ma place.

Sans un mot, il fouilla dans son sac et en sortit une barre de céréales à moitié écrasée, qu’il lui tendit comme s’il offrait un trésor.

— Il vaudrait mieux éviter que tu ne meures de faim, petite étoile.

Nova attrapa le paquet et lui tira la langue, retrouvant un instant la légèreté d’avant.

— Merci, Soleil. Tu me sauves la vie… encore une fois.

Elle croqua dedans à pleines dents, savourant chaque miette comme si c’était un festin royal.

Ils reprirent leur marche, plus silencieux qu’auparavant, mais un peu plus proches, comme si le simple fait de partager une barre de céréales dans un monde qui s’effondre les liait un peu plus.

Les murs changeaient peu à peu. Moins froids, moins humides. L’air, lui aussi, se transformait. Il devenait plus lourd, chargé d’une chaleur étrange, presque palpable.
Elian fronça les sourcils, s’arrêtant une seconde pour poser la main contre la paroi.

— Tu sens ? Ça vient de là… la pierre est tiède.

Nova s’approcha à son tour, posant sa paume contre les briques. Une vibration très légère lui parcourut les doigts, presque comme un battement.

— On approche. Il y a quelque chose, là, tout près…

Un courant d’air chaud passa soudainement entre eux, comme un souffle venu d’ailleurs. Nova se raidit.

— Il y a quelque chose derrière ce mur… On doit passer.

Nova s’était approchée, les doigts effleurant la pierre fissurée comme s’ils cherchaient une réponse, un secret prêt à leur être murmuré. Son souffle s’accélérait déjà, porté par l’élan de l’espoir.

Mais Elian, plus lucide, posa sa main sur son épaule. Une pression douce, mais ferme.

— Ne nous précipitons pas. On ne sait pas ce qui se cache là-derrière.

Elle se figea un instant, les mâchoires serrées. Il avait raison. Comme toujours. Elle recula d’un pas, le laissant s’avancer.

Le blond examina la fissure du mur en silence, ses yeux suivant le fil irrégulier qui serpentait jusqu’au sol. Puis, il s’abaissa lentement. Derrière un rideau de lierre ayant pris racine dans les interstices humides, il repéra une ouverture grossière, taillée à la main. Un passage oublié du temps.

— Là. Tu vois ? C’est pas un mur, c’est une porte.

Ils écartèrent délicatement la végétation, leurs pas crissant contre le sol irrégulier. De l’autre côté, ils débouchèrent dans une pièce aux allures d’abri improvisé. Des caisses servaient de meubles — les petites comme sièges, les plus larges en guise de table. Quelques lampes bricolées diffusaient une lumière jaune tremblotante, insuffisante pour rendre l’endroit chaleureux, mais suffisante pour y déceler les traces d’une vie passée.

Pas un bruit. Pas une silhouette. Le silence, lourd et humide, s’insinuait jusque dans leurs os.

Le cœur de Nova battait à tout rompre. Son regard balayait la pièce, à l’affût du moindre détail, de la moindre présence. Une goutte de sueur glissa le long de sa tempe.

Et si c’était un piège ?

Et si l’homme leur avait menti, les envoyant vers une mort qu’ils n’auraient pas le temps de comprendre ?

Mais un bruit, soudain, les figea : le grincement lent et menaçant d’une porte rouillée.

Ils se retournèrent d’un même mouvement.

Dans l’encadrement se tenait une femme. Grande. L’allure solide, presque menaçante. Sa carrure semblait taillée dans l’acier et les souvenirs. Ses cheveux, grisés par le temps, encadraient un visage marqué, buriné par la guerre, les pertes, ou peut-être les deux. Elle n’était pas vieille. Juste… usée. Par la vie. Par les choix.

Son regard les transperça. Méfiant. Calculateur.

— Qu’est-ce que vous voulez ?

Sa voix, grave et rauque, fendit l’air comme une lame.

Nova déglutit. Elle aurait pu parler. Elle aurait pu supplier. Mais son instinct lui soufflait que cette femme n’écouterait ni les larmes, ni les envolées.

Alors elle se redressa, planta son regard dans le sien, et répondit simplement :

— Mon frère. Ash. Je crois qu’il est venu ici… et qu’il a besoin de vous.

La femme les scruta en silence, ses yeux passant de Nova à Elian comme si elle jaugeait leur sincérité, leur force, ou peut-être ce qu’ils étaient prêts à sacrifier. Puis, sans un mot, elle s’assit sur l’une des caisses. Le bois grinça sous son poids, mais elle ne sembla pas y prêter attention.

D’un geste lent, presque cérémonial, elle alluma un cigare qu’elle porta à sa bouche. Une première bouffée, puis une autre. L’odeur âcre du tabac brûlé se mêla à l’humidité ambiante, tissant un voile entre eux, comme pour gagner du temps, ou mesurer l’effet de ses mots avant qu’ils ne soient prononcés.

Le silence devint lourd. Compact. Il vibrait de tout ce qui n’était pas dit. Nova, restée droite, n’osait briser cette attente. Son cœur cognait contre sa poitrine avec l’impatience d’un tambour de guerre.

Finalement, la femme écrasa le mégot dans un petit récipient en métal cabossé, rongé par la rouille et le temps. Ses yeux d’acier revinrent se planter dans ceux de la rousse.

— En effet, il est possible que j’aie aidé un gamin… petit, 1m68 à tout casser. Des yeux vifs, le regard trop grand pour son âge. Il a dormi ici. Quelques nuits seulement. Il était paumé… mais déterminé. Le genre de môme qui a déjà vu trop de choses, et qui refuse d’abandonner.

Nova sentit sa gorge se nouer.

— Et ensuite ? Où est-il ?

La femme inspira profondément avant de reprendre.

— Il est parti hier. Seul. Il voulait atteindre les Terres Mortes.

Le sang de Nova se glaça dans ses veines. Elle avait entendu ce nom. Elle savait ce que ça signifiait.

— Je lui ai dit que c’était de la folie, que personne ne revenait jamais de là-bas. Mais il avait cette conviction dans les yeux… Il pensait qu’il y avait quelque chose, là-bas. Quelque chose qu’on avait tous raté. Je lui ai donné un peu de vivre, de l’eau, mais pas de quoi tenir bien longtemps. Quatre, cinq jours, tout au plus. Après… il devra compter sur sa chance.

Nova sentit un frisson lui parcourir l’échine. Encore une fois, elle avait raté son frère de peu. Encore une fois, elle arrivait après coup. Si elle avait trouvé cette page plus tôt… s’ils étaient descendus plus vite…

Elian s’avança, le regard sombre, les bras croisés contre sa poitrine.

— Dites-nous par où il est parti. On doit le retrouver avant qu’il ne soit trop tard. Avant que le désert ne le prenne.

Il marqua une pause, son ton se fit plus ferme, plus froid.

— Donnez-nous ce qu’on cherche, et on ne parlera pas de vous à la surface. Ni aux autorités. Ni à personne.

La femme le fixa, impassible. Puis, lentement, elle se leva. Son ombre grandit contre le mur, projetée par la lumière tremblotante de la lampe.

— Vous avez du cran, les gosses. Et vous tenez à ce petit. Je respecte ça.

Elle s’approcha d’un vieux plan accroché à un panneau de bois, griffonné à la hâte, couvert de tâches et de poussière. Son doigt se posa sur une ligne fine qui s’enfonçait vers l’est, au-delà des zones habitées, au-delà même des routes connues.

— Il a pris cette direction. À pied. Il m’a dit vouloir suivre les anciennes bornes électriques, celles qui mènent vers la sortie Est, là où les souterrains se retirent pour laisser place au désert.

Nova hocha la tête, le regard brûlant de détermination. Elle ne pleurerait pas. Pas maintenant. Il était encore en vie. Il comptait sur elle.

— Alors on va le retrouver, murmura-t-elle.

Elian jeta un coup d’œil vers elle. Elle n’avait jamais été aussi résolue. Et il n’avait jamais été aussi inquiet.

— On va le ramener.

 

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2 Comments

5 days
J'aime beaucoup ta façon d'écrire ! On sent vraiment une ambiance pesante et les pensées des personnages sont hyper bien amenées !
Je trouve que ton style donne envie de poursuivre ton roman, on a envie de continuer avec eux.
Moi j'aime beaucoup ! =)
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5 days
Merci beaucoup c’est adorable !!
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