Assise sur son banc préféré, Madeleine regardait les roses en fleur. Le parfum sucré lui chatouillait le nez, et elle sourit. Pourtant, quelque chose clochait.
— Comme elles sont belles, murmura-t-elle.
— Oui, maman, répondit Lucie en serrant sa main. C'est toi qui les as plantées.
Madeleine cligna des yeux. Elle connaissait cette jeune femme assise à côté d'elle. Ses traits lui étaient familiers, mais son nom lui échappait. Un frisson lui parcourut l'échine.
— Qui es-tu ?
Lucie ravala un sanglot.
— C'est moi, maman... Lucie, ta fille.
Madeleine fronça les sourcils. Un voile opaque obscurcissait son esprit. Lucie... ce nom résonnait au loin, comme un écho dans un long couloir. Elle voulut s'accrocher à ce fil ténu, mais il se brisa avant qu'elle n'atteigne le souvenir.
— Je suis désolée... je ne me souviens pas.
Lucie sourit tristement et sortit un vieux carnet de son sac.
— Ce n'est pas grave, maman. Regarde, c'est ton journal. Tu y as écrit tous tes souvenirs.
Madeleine observa les pages jaunies. Ses propres mots lui semblaient étrangers, comme s'ils appartenaient à une autre vie. Mais en lisant doucement, une image floue prit forme dans son esprit : un jour d'été, des rires d'enfants, un homme au regard tendre...
Une larme roula sur sa joue. Elle ne se souvenait pas entièrement, mais elle ressentait l'amour. Et peut-être, se dit-elle, que cela suffisait.
Lucie posa sa tête sur l'épaule de sa mère, et ensemble, elles restèrent là, dans le jardin des souvenirs.