Aïden s’éveilla en sursaut quand une main s'abattit violemment sur son bureau, déclenchant le rire des autres élèves autour de lui. Son professeur, les bras croisés face à lui, secoua la tête, faisant voleter ses oreilles de cervidés parmi ses cheveux hirsutes.
— Je sais bien que c’est la fin de l’année monsieur Sauma,mais veuillez au moins avoir la décence d’écouter jusqu’au bout.
Aïden passa sa main dans ses cheveux blond platine en grimaçant et acquiesça de mauvaise grâce. Le professeur s’éloigna du bureau, le silence brisé seulement par le bruit des deux sabots de l’edhel. Celui-ci s’arrêta près de son bureau et se tourna vers la classe.
— Maintenant que j’ai l’attention de tout le monde, je tenais à vous dire quelque mots, dit-il de sa voix enjouée. C’est votre dernière heure dans ce lycée, dans ma classe, et d’ici demain vous vous dirigez vers le monde adulte. Vous allez embrasser votre créature, vivre dans différents milieux et grandir. Vous avez été une classe difficile mais merveilleuse. N’oubliez jamais que vos résultats et votre comportement envers les autres comptent pour votre avenir.
Le professeur à la peau brune plongea son regard sombre dans celui de Aïden. Le jeune garçon ne répondit que par un regard morne. Il n’avait pas à écouter toutes les absurdités débitées par un adulte. Il détourna ses yeux parmes, observant la cour bordée d’arbres de couleurs légèrement vert-bleuté. Plusieurs navettes volantes de plusieurs couleurs différentes, informant leur destination, étaient déjà sur la place en attente des élèves rentrant chez eux. Comme il avait hâte d’enfin sortir de ce lieu de torture.
— Bien, je ne vais pas vous retenir plus longtemps. Je vous souhaite de bonnes vacances et une vie heureuse. Que Yalun’da vous accompagne.
Aïden saute presque de sa chaise et sortit de la pièce, les mains dans les poches de son pantalon noir troué et la capuche de son haut blanc rabattu sur la tête. Il passe rapidement, bousculant plusieurs élèves, manquant de les faire tomber. Arrivé dans la cours où déjà plusieurs personnes étaient présentes, il repéra ses deux amis assis sur un banc de couleur bleu.
Kyridan et Sylven étaient tous deux des créatures de races différentes. Un peu comme tout le monde qui entourait Aïden au final. Il ne s’en plaignait pas, au moins il était juste humain et rien de plus, rien de moins. C’était au moins quelque chose qu’il pouvait apprécier chez sa mère.
Il prit place près d’eux et poussa un long soupir de soulagement. Une aile de couleur brune l’entoura.
— Alors, qu’est-ce que tu prévois de bien maintenant ?
— Dégage le plumeux, va câliner quelqu’un d’autre, répond Aïden en poussant Sylven qui manque de tomber au sol.
— Hey les mec regardez, c’est notre petit oméga, dit Kyridan en redressant ses oreilles de renard.
Le jeune vulpe se leva et se dirigea vers un jeune garçon de petite taille aux quatre grandes ailes transparentes iridescentes et aux longs cheveux bleu pastel natté. Kyridan avait sa longue queue rousse qui remuait dans le dos. Il se plaça devant, légèrement de côté.
— Alors petit faelen, on retourne chez ses parents ?
— O... Oui, répondit la jeune fée intimidée par la grande taille du dhelpèr.
— Et tu vas écarter tes cuisses comme la bonne soumise que tu es ? demande Sylven qui vient se placer dans son dos.
— Je… laissez moi.
— Je suis certain qu’il va être bon pour son ou ses futurs maîtres. Restez chez lui à être engrossé et rien faire de sa vie qu’être une bonne catin, continue le renard la voix vicieuse.
— Je suis tellement content d’être humain, ajoute Aïden en venant se placer devant le garçon. Au moins je ne suis pas réduit à devoir suivre ces lois ridicules.
— Et moi je suis fier d’être un oméga et une créature, pas une anormalité humaine qui ne trouvera jamais l’amour ! Au moins MOI j’ai un futur !
Le jeune Faelen poussa Aïden de ses deux mains et s’envola tout en priant que Sylven ne le suive pas dans les airs. Les trois garçons éclatèrent de rire avant de prendre la direction de chez eux. Ils discutèrent de projet qu’ils feront quand ils se verront pendant les vacances.
Au bout de quelques minutes de marche, les trois se séparèrent. Sylven s’envolant pour chez lui et Kyridan partant en courant dans une autre direction. Aïden se retrouvant ainsi seul. Il souffla avec un petit sourire crispé et observa la ville. Caelùn, s’il se rappelait plus ou moins de ses cours d’histoire, tiendrait son nom de “ville bleue” de sa proximité avec l’océan mais aussi parce que l'île sur laquelle elle se situait, Orus, fut la base principale des êtres magiquement liés avec l’eau. Les plantes présentes avaient toutes cet aspect bleutée par la concentration de magie aquatique de l’endroit.
Il s’arrêta sur un pont fait de bois et observa la rivière qui passait sous lui. L’on voyait de nombreuses personnes nager, partant et arrivant, rentrant chez eux, allant chercher leur enfants ou peut-être faire les courses. Levant les yeux, il observa cette fois le ciel légèrement nuageux où les races aériennes partageaient l’endroit avec les nombreuses navettes. Il s’étira et continua son chemin tranquillement.
Il arriva enfin devant une petite maison claire au toit sombre. Il passa la porte en bois vernie et s’arrêta en voyant ses deux parents assis dans le salon. Il savait pourtant qu’ils devaient être encore au travail vu l’heure. Du moins, surtout son père qui était avocat.
— Ah Aïden, bonne journée childe ? demande doucement sa mère.
— Qu’est-ce que vous faites ici ? dit-il en fermant la porte derrière lui et en enlevant ses chaussures.
— Viens t’asseoir, nous devons te parler, fait son père en tapant du sabot au sol.
— J’arrive.
Aïden passa dans la pièce sans un mot de plus et monta les escaliers pour arriver dans sa chambre. La pièce était simple, blanche avec un sol en bois sombre. Quelques tableaux quelconques, son bureau avec une encoche pour une tablette afin de travailler. Il décrocha la bourse en cuir noir qu’il avait sur sa hanche et la jeta sur le lit, manquant de faire tomber son orbe de paiement, avant de descendre dans le salon aux couleurs chaudes. Il s’affala dans un fauteuil au tissus orange et jaune et attendit.
Sa mère, Élena était une petit femme, d’un mètre soixante cinq au cheveux blond foncé et aux yeux clair. Elle avait tout d’humain si ce n’était son sang de créature très dilué.
Son père, Haròn, était un Edhel. C’était elfe de la terre, mi-humain mi-cerf de plus de deux mètres avec des sabot à la place des pied, une peau couleur brune et des oreilles tel des cervidés dans une chevelure folle noire souvent courte.
— Ton dix-huitième anniversaire est bientôt, et comme tu le sais je ne suis pas totalement une humaine… Ce que je veux dire c’est… que…
— Ce que ta mère essaye de te dire, c’est que tu n’es pas humain Aïden, tu es un Ylèndr oméga..
— A.. Attend quoi ? Vous vous… c’est une blague ?
— Non Aïden, tu es un Ylèndr, continua sa mère. Comme chaque créature de ta race tu vas bientôt entrer en chaleur et dès ce soir nous t'emmenons au COMFY. Au centre, un Alpha deviendra ton référent et …
— LA FERME ! Je ne suis pas une saleté de nymphe et encore moins un oméga ! C’est faux ! Je suis un humain et je refuse d’y aller ! Je vous déteste et surtout toi, dit-il en pointant son doigt vers sa mère. Tu ne pouvais pas être normal et pas avoir du sang de créature immonde ?
Aïden se leva, évitant son père qui essaya de l’attraper au passage et se dirigea vers la porte d’entrée. Quand il posa sa main sur la clanche, rien ne se passa. Ils avaient bien prévu le coup.
— Et merde !
Il fit demi-tour et monta dans sa chambre, prenant soin de fermer sa porte à clé. Il se jeta sur le lit avant de balancer son oreiller à travers la pièce. Merde, il voulait tout casser. C’était juste impossible qu’il soit une créature faible. Il devait au moins être un bêta non ?
Aïden se redressa et avança vers son bureau. Il ouvrit un tiroir, le renversant sur le sol. Plusieurs livres tombèrent, s'abîmant légèrement pour certains. Il regarda les titres et prit celui des études des races. Il revint sur son lit et le feuilletta rapidement. Dhelpèr, edhel, faelen, ghrul…Vampire, Ylèndr.
— Un ylèndr, prononcé Aï-lèn-dir, est une nymphe hermaphrodite oméga (voir très rarement bêta) affilié à l’eau, murmure t-il. Elles sont très souvent confondues avec les humains de par leur apparence. Leur cheveux sont clair, souvent blond, avec deux yeux de couleur varié bien que la plus recherché est violette. Elles sont reconnaissables, cependant, par leur petite taille et leur hanche plus marqué pour les personnes de genre masculin. Le lendemain de leur dix-huitième anniversaire, un Ylèndr entrera en chaleur. La nymphe se voit alors dotée dans les jours à venir d’une cavité femelle située sur le périnée qui lui permettra de concevoir des enfants. Les chaleurs sont quelque chose à prendre en charge rapidement dans le centre médical, le COMFY [Centre Opérationnelle Médical pour Faelen et Ylèndr] dans la ville d’Asiri sur l'île d’Andara.
Aïden, la peau plus pâle qu’avant, laissant voir ses quelques rares tâches de rousseur, lâcha vivement son livre à travers la pièce comme si celui-ci l’avait brûlé. C’était impossible, tout bonnement impossible. Le livre mentait, ses parents mentaient, il est humain.
Il s’allongea dans son lit, l’angoisse noué au plus profond de sa gorge et essaya de fermer les yeux. Il était certainement en train de rêver, oui c’était ça, quand il ouvrirait de nouveau les yeux… tout serait comme avant.
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Le jeune homme se sentait un peu lourd. Il papillonna des yeux, essayant de savoir où il était. Il vit ses parents assis sur… Il se redressa pour s’asseoir et observa autour de lui. Ils étaient dans une navette privée.
— Qu’est-ce que…
— Nous arrivons à Asiri dans 20 minutes, prononça la voix automatique de la navette.
— Comme tu viens certainement de comprendre, nous somme en direction du centre, dit son père d’une voix neutre. Je ne me fais pas d’illusion que tu vas y rester un moment à cause de ton caractère. Mais je fais confiance envers l’équipe du centre, ils sauront sûrement te faire rentrer quelque chose dans la tête.
— Tu ne peux pas m’y obliger… murmure-t-il les yeux écarquillés et la gorge nouée.
— Si Aïden c’est ta santé qui est en jeu. Tu le sais, les chaleurs peuvent te tuer. Je suis ton père et j’ai encore des droits sur toi. Tu n’es pas encore considéré comme adulte aux yeux de la société et ne le sera qu’une fois ton traitement terminé, sache-le.
Aïden lance un regard de dédain envers ses parents, déglutit et se recouche sur la banquette, leur tournant le dos. Il n’avait plus rien à leur dire.