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Hazel_Nash
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Partie III

Ce soir-là, elle se prépara avec l'idée de se faufiler entre les jardins pour sortir de la propriété royale. Mais avant qu'elle n'arrive à former son plan, elle s'était déjà endormie dans son lit. Ce matin-là, ce fut avec honte qu'elle se réveilla et qu'elle se rendit compte de son echeque. Ainsi, la nuit d'après, elle se prépara à ne pas refaire la meme erreur. Au début, ce fut compliqué de ne pas succomber au sommeil. Pourtant elle resta forte et quand elle fut sûre que ses camarades étaient toutes profondément endormies, elle sortit de son lit avec prudence.

Avec des pas légers, elle sortit de la chambre, et avec la même attitude qu'un chat, elle se faufila entre les couloirs avec une légèreté surprenante. C'était la première fois qu'elle traversait ces lieux dans sa forme humaine, et il était compliqué des fois de se rappeler que ce soir, elle ne serait qu'une servante. Elle marcha prudemment encore pendant quelques minutes, manquant de se faire prendre plusieurs fois. Ce ne fut que quand elle commença à s'éloigner du château qu'elle put souffler de nouveau.

Ygritte n'était jamais sortie du lieu où elle était née, à part pour vagabonder dans les forêts proches quand elle rentrait dans le corps du chat noir. C'était bien une première pour elle de voir le château de si loin et de ne plus subir son oppression. Pourtant, la fille n'avait pas de carte, et ses capacités d'orientation n'avaient tout au long de sa vie été que très peu nécessaires. Ainsi, quand elle se retrouva enfin libre en dehors de la propriété royale, elle se surprit à se sentir perdue. Elle n'avait vu que sur quelques cartes où se situait cette fameuse forêt interdite et dans aucune de ses occasions, elle n'était venue à se dire qu'elle en aurait besoin un jour.

Ainsi, quand elle se mit enfin en chemin, ce fut avec comme source seulement son propre instinct et une boussole presque cassée qu'elle avait réussie à emporter quand un des gardes ne regardait pas. Elle marcha et marcha pendant quelque temps sans trop savoir où aller. À des moments, ses pas ralentissaient de peur de se tromper de chemin. A d'autres, elle courait presque en ayant peur que le soleil ne se lève avant qu'elle n'ait pu arriver à sa destination. Heureusement pour elle, à un moment où elle pensait que cette péripétie aller etre encore une faillite, un épais brouillard commença à apparaître au loin.

De ce que les histoires racontaient, le brouillard était noir, et de lui parvenaient des cris de terreur de ses victimes. Pourtant, rien de cela n'y ressemblait alors qu'Ygritte se surprena à traverser un brouillard totalement normal. Rien ne se voyait dedans. Elle voyait à peine ses pieds et le chemin, mais elle ne recula pas et commença à avancer. Les minutes passèrent jusqu'à ce que, bientôt, la fille ne se souvienne plus combien de temps s'était écoulé depuis qu'elle était rentrée dans cette étrange brume. Soudainement, des hululements commencèrent à se faire entendre. Une chouette apparut. Ygritte n'eut pas le temps de prendre en compte ses yeux jaunes lumineux que l'oiseau partait déjà.

De peur de se retrouver perdue, la fille commença à lui courir après pendant un bon bout de chemin. Rapidement le paysage autour d'elle commença a revenir, et les silhouettes d'arbres reprirent forme. La chouette partit, et Ygritte fit quelques pas encore, ses yeux admirant ses alentours. La forêt de Brumenoir avait tout ce que l'on pouvait trouver de plus banal dans une forêt. Le bois s'étendait à perte de vue alors que de temps en temps, des bruits d'animaux résonnaient. Ygritte eut à peine le temps de prendre en compte son environnement que la chouette s'élança à son tour, obligeant la fille à s'enfoncer plus profondément entre les plantes. Elle marcha encore quelques temps. Des douleurs aux pieds se faisant déjà ressentir jusqu'à ce que, bientôt, à ses pieds, commencent à apparaître des étranges fleurs bleues. La fille n'avait jamais rien vu de tel. Elle continua son chemin jusqu'à en voir toute une prairie entourant une petite hutte.

La chouette, qu'elle n'avait suivie que grâce à ses hululements, se posa sur le toit de la maisonnette. Comprenant que tel était sa destination, Ygritte s'avança et entra dans la hutte. Dedans, tout était décoré de talismans étranges avec des plumes et des pierres. Une odeur étrange semblait ressortir de certains pots à l'allure étrange, et l'endroit était rempli de livres anciens dont Ygritte ne connaissait pas la langue.

— Ça t'a bien pris du temps avant de venir ici,— dit une voix grincheuse.

La maisonnette était plus grande que ce qu'elle avait l'air, et si au début la fille n'avait pas senti de présence, il lui fallut faire encore quelques pas avant d'en voir l'auteur. C'était une femme dans sa cinquantaine avec des cheveux blanchis se mélangeant à ses meches noirs. Si elle avait eu 20 ans de moins, elle aurait sûrement été magnifique, mais il était clair que ses jeunes années étaient bien derrière elle. Elle était habillée d'une grande fourrure, recouvrant tout son corps, et elle était assise en tailleur devant une petite table remplie de potions. Si Ygritte s'était plus concentrée, elle aurait presque pu voir ses yeux à une lueur jaunâtre étrange.

— Bah alors, enfant, on t'a coupé la langue ? T'as déjà perdu un œil, il ne manquerait plus que tu ne saches plus parler.—

À ces mots, la fille se sentit encore plus déstabilisée, mais après un long silence, elle opta pour prendre la parole.

— J'ai vu quelque chose d'affreux, quelque chose que je n'avais jamais vu.—

Un silence suivit. La sorcière la fixa avec des yeux étranges.

— Un homme, aux veines noires, avec la peau écailleuse et des mains tranchantes.—

— Ah, chère enfant, il y a bien des choses étranges dans ce monde, cependant ce n'est pas pour ces réponses-là que tu es venue ce soir,— répondit-elle de la façon la plus surprenante.

Face à ça, Ygritte ne sut pas quoi dire. Elle était venue ici car elle avait des questions sans réponse, mais elle ne s'attendait pas à une telle confrontation.

— N'est-ce pas étrange qu'une servante si banale que toi se retrouve du jour au lendemain à observer par les yeux d'un chat ? Peut-être est-ce une question à laquelle une réponse te serait plus favorable.—

La fille était toujours debout dans une posture mal à l'aise, et commençant à avoir mal aux genoux, elle s'assit en face de la femme.

— Vous allez me donner des réponses ? demanda-t-elle avec espoir.

En réaction à cela, la sorcière tendit la main. Doucement, Ygritte l'imita, mais au moment où elles se connectèrent, la sorcière attrapa un couteau de sa poche et perça sa paume d'un grand geste. La fille hurla de douleur, prise au dépourvu. Elle tenta de s'échapper de l'étreinte, mais la femme ne lacha pas. En attrapant une peau vide, elle y versa son sang.

— Maintenant, sois gentille, dis-moi tout ce que ces poufiasse de servantes t'ont dit sur ta mère,— parla-t-elle en lâchant la main de la fille.

— Ma mère ? Je ne comprends pas... —

— Tu veux que je remplisse le pot ?
Ses mots terrorisèrent la fille et, avec vitesse, elle commença à dire tout ce qu'elle savait.
— On... on m'a dit qu'elle est morte en m'accouchant. On était censé me noyer dans un lac, mais la gouvernante a réussi à en faire autrement.
— La gouvernante, c'est toujours cette vieille femme insupportable je suppose, dit la femme dans sa barbe, puis, en relevant les yeux, elle reprit sa main entre les siennes.
Ygritte trembla de peur à l'idée de subir une nouvelle blessure. Au lieu de ça, la sorcière parla.
— Écoute très bien ce que je vais te dire là, mon enfant. Toutes ces histoires sont des mensonges, car celle qui est morte ce soir-là, ce n'est pas ta mère, mais toi.

Un long silence plana dans la salle, le temps que la fille essaye de reprendre ses émotions.

— Mais je ne comprends pas, ma mère est morte en me donnant naissance, marmonna-t-elle, incrédule.

— Tu es morte étranglée dans son ventre, et cette nuit-là, c'est vers moi qu'elle est venue en aide.
Ygritte fixait ses chaussures, désorientée, mais à ces mots, elle souleva le regard pour croiser ceux de la sorcière

— En échange de te donner la vie, j'ai pris son âme. Cependant, une âme ne meurt jamais. J'en ai mis une partie dans le corps du premier être que j'avais entre les mains : Onyx.

— Onyx ? dit Ygritte, envoûtée par le récit farfelu de la femme.

À ces mots, des pas se firent entendre et bientôt, le chat noir s'installa sur les genoux de la sorcière. Ce corps dans lequel elle avait passé de maintes nuits à explorer chaque recoin du château. Ce corps qui l'avait sortie de sa vie si monotone et qui lui avait permis de frôler du bout des doigts la liberté.
La fille était bouche bée.

— Cependant, il fallait que j'équilibre les liens, donc j'ai fait une double union : la nuit, l'âme de l'enfant se glisserait à son tour dans le corps partagé par contrat ancien, donc toi.

— Mais je ne comprends pas, donc cela voudrait dire que...

— Que tu es à moitié morte, mon enfant. Tu ne possèdes qu'une moitié d'âme complète. Ce pacte est lié entre le passage de la vie et la mort. Le crépuscule est le seul moment où ton âme est instable, car tu n'aurais jamais dû vivre.

Après la fin de son récit, le silence plomba la salle. Au cours de l'histoire, la femme avait lâché la main de la fille, et celle-ci la tenait au chaud contre son corps en réfléchissant à ce qu'elle venait d'apprendre.

— Tu as deux choix : soit le chat meurt avec l'âme de ta mère et tu récupères ton âme complète, soit tu continues à vivre entre la vie et la mort.

La fille réfléchissa quelques instants. Pour elle, le choix était presque déjà fait. Peut-être que si elle décidait de reprendre son âme, quoi que cela veuille dire, elle reviendrait à sa vie monotone et ennuyeuse de toute servante. Et Ygritte ne savait pas si une vie ennuyeuse valait la peine d'être sacrifiée pour une fraction de cet élan de liberté. Elle n'était pas prête à abandonner cette partie d'elle, et encore moins à redevenir celle d'avant.
De plus, ses questions n'étaient toujours pas éclaircies. Sa curiosité, par nature, la poussait à aller voir le bout de la chose.
Quand elle souleva les yeux, ce fut avec un regard déterminé.

— Je refuse de revenir à ma vie d'avant. C'est trop tard maintenant.

Elle se leva, croyant la discussion terminée, mais la sorcière lui prit la main.
— Dans ce cas, prends ça, dit-elle en lui glissant une étrange bague.
Elle était faite en acier, décorée de gravures. Au centre se tenait un œil si réaliste que Ygritte sentit son sang se glacer rien qu'à l'image. L'œil était englobé d'un serpent à deux têtes.
— Demain soir, rends-toi au bal des ombres au fond du bois d'Ys. Montre-leur la bague et dis exactement ces mots : « Eímai ypiretís tou ouranoú. » Tu y trouveras là-bas toutes les réponses à tes questions.
— Mais ce bois a été...
— Interdit par la garde royale, oui. Pourtant Brumenoir l'est aussi, et tu es bien venue, n'est-ce pas ?
— Mais on dit qu'il est extrêmement dangereux d'y aller, renchérit encore une fois la fille.
— Peut-être pour une petite servante, mais tant que tu portes l'œil, rien n'arrivera. Suis le sentier sans JAMAIS te dévier de la route. Tu sauras quand tu seras arrivée.
En hochant la tête, la fille se prépara à partir avant de s'arrêter dans son geste.
— Mais pourquoi vous m'avez donné autant d'informations ? demanda-t-elle rapidement, incrédule de ce qu'une sorcière aurait à y gagner à part un peu de sang dans un pot.
— Car il fallait que tu choisisses. Maintenant que ton choix est fait, il n'y a plus rien que tu puisses faire pour échapper à ton destin.
Sur ces mots, un frissonnement parcourut tout son corps. Elle resta plantée là, sans trop savoir quoi répondre, avant que la sorcière ne la devance.
— Tu ferais bien de te dépêcher, mon enfant, dit-elle au même moment où les premiers rayons du soleil commencèrent à traverser la hutte.
Le jour s'était levé. Ygritte écarquilla les yeux de surprise, et, elle se lança dans la forêt en suivant la chouette par le même chemin qu'elle avait pris pour venir ici.
Elle courut et elle courut jusqu'à en perdre l'haleine. Le passage de la brume fut long et coûteux, mais bientôt Ygritte réussit à en sortir et s'élança de toutes ses forces en direction du château.
Réussir à se faufiler entre les gardes fut chose coûteuse maintenant que le soleil était dans le ciel, mais néanmoins, elle y arriva. Bientôt, elle rentra dans sa chambre.
— Où étais-tu passée ? parla Jules.
— Je suis juste sortie aux toilettes quelques instants, dit-elle de la manière la plus décontractée possible avant de suivre ses camarades pour commencer les corvées.
Cela faisait bizarre à Ygritte de ne pas avoir passé la nuit dans le corps d'Onyx, et encore plus avec le peu de sommeil qu'elle avait eu. La fatigue était compliquée des fois, surtout quand il lui fallait toute sa capacité mentale pour s'endormir sur son balais. Mais l'attente du bal des ombres était telle qu'elle ne pouvait s'empêcher de rêvasser.
Elle n'était jamais allée à un bal. Même si le nom de celui-ci était des plus étranges, elle ne pouvait s'empêcher de s'imaginer danser dans un grand salon luxueux. Dommage qu'elle n'ait pas de grande robe brodée, elle n'avait que sa longue jupe de servante, et Ygritte devrait se contenter de se montrer telle qu'elle était.
Soudainement, elle arrêta de frotter une fenêtre alors qu'une idée lui vint à l'esprit. Il n'y avait personne dans le château qui connaissait mieux chaque recoin. Elle n'avait qu'à se faufiler dans le quartier des nobles pendant l'heure du thé et emprunter une robe pour le bal.
C'était son premier bal tout de même, se rassura Ygritte, et quand l'heure de l'apres midi arriva, elle mit son plan à exécution.
L'heure du thé était un temps de la journée où toute la noblesse devait impérativement partager ce moment, sûrement dans les beaux paysages des jardins royaux.
Alors, quand ses autres camarades étaient trop occupés à prendre une pause dans leurs quartiers, Ygritte se faufila dans les couloirs à la recherche de son objectif.
Bientôt, elle trouva une chambre au hasard, et sans y penser deux fois, elle s'y aventura pour aller chercher dans les tiroirs son trésor.
Elle se retrouva fascinée devant tous ces vêtements de toutes les couleurs. Il y en avait en or, en argenté, brodés de fleurs et de motifs.
Mais Ygritte savait bien qu'elle n'avait pas le temps de réfléchir. Ainsi, elle prit la première à sa portée et se dépêcha de la cacher dans sa chambre, sous son matelas.
Alors qu'elle était en train de refaire son lit, Yules rentra.
— Tu disparais assez souvent ces derniers temps, lui dit-elle en la fixant avec un regard suspect.
Ygritte, sûre d'elle, sachant que jamais Yules ne pourrait imaginer la grandeur de son secret, haussa les épaules et partit reprendre ses tâches.
Tout le long de la journée, ce fut comme si les heures étaient interminables.
La fille était impatiente pour la nuit et elle ne pouvait pas s'empêcher d'être déçue à chaque fois qu'elle regardait l'heure.
Heureusement pour elle, la nuit tomba bientôt, et avec, le moment tant attendu de la fille.
Son plan était resté le même que la nuit précédente : elle se faufilerait entre les gardes, juste cette fois-ci avec un sac pour y cacher sa robe.
Ainsi, quand elle fut sûre que toutes ses camarades ronflaient profondément, elle se faufila hors de la chambre et suivit le même chemin que d'habitude.
Encore une fois, jamais elle ne s'était rendue dans le bois d'Ys. Les seules informations qu'elle en avait, à part toutes les histoires de monstres, c'était qu'il se trouvait à l'est de la forêt Brumenoir, entouré d'un lac menaçant dont le seul passage était un pont.
Évidemment, elle n'avait aucune idée d'où il pouvait se trouver, mais elle décida de suivre son instinct.

De plus, la présence de plusieurs chouettes volant autour d'elle la faisait espérer qu'en cas de situation critique, elle s'en sortirait. Ainsi, elle marcha et marcha pendant un temps interminable. Et quand elle avait l'impression que le chemin allait durer pour toujours, elle vit au loin un arbre plutôt imposant. Par pure curiosité, elle s'approcha, puis remarqua le pont qui traversait une rivière à l'eau trouble. La fille traversa, essayant de son mieux de ne pas faire attention aux silhouettes terrifiantes qui y reflétaient. Comme lui avait dit la sorcière, rien de brume sombre ou dangereuse, il y avait juste un simple chemin qui s'enfonçait dans la forêt. Sentant déjà la peur venir, la fille s'avança quand même et continua sa marche. Elle marcha pour ce qui lui parut des heures, jusqu'à ce que ses pieds lui fassent mal et qu'elle ne puisse plus voir l'entrée par laquelle elle était arrivée. La forêt était simple, comme le petit sentier, mais à des moments, des grognements ou des yeux jaunes se faisaient voir entre les arbres. Soudainement, quelqu'un lui prit le bras. Elle poussa un cri de terreur qui vibra dans toute la forêt.


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