Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
AlodieRomand
Share the book

Prologue

Valachie, quelques siècles plus tôt.

 

     Un verre de vin rouge à la main, la sorcière souriait en contemplant le feu ronflant dans la cheminée. Installée dans un fauteuil rembourré, elle savourait sa victoire tout en écoutant distraitement ses comparses dans le grand salon qu’ils occupaient actuellement. L’alcool coulait à flot, les rires étaient joyeux. En contraste total avec les populations de la Valachie et de la Transylvanie qui pleuraient leurs morts depuis plusieurs jours.

     La victoire avait été difficile à remporter, mais finalement Catarina y était parvenue.

     Une silhouette se matérialisa près de son fauteuil. Une jeune fille qui récupéra le verre vide tout en lui en donnant un nouveau. Inquiète, elle jetait des coups d’œil régulier vers les grandes fenêtres fermées. Agacée, Catarina lui lança un regard noir.

     — Qu’y a-t-il ?

     — Il y a beaucoup de brouillard, dehors, vous êtes certaine que… ?

     — Que quoi ? Le Prince de Valachie va soudain surgir de sa tombe ? Allons donc, ne soit pas sotte.

     D’un geste autoritaire de la main, la sorcière chassa la jeune fille qui tourna prestement les talons, rassurée.

     Après tout, le brouillard n’était pas rare dans ces contrés.

     Elle goûta une nouvelle gorgée de vin. Ce n’était pas le même que celui bu juste avant. Les sourcils froncés, elle le huma, lui trouvant une odeur cuivrée qui n’était pas sans rappeler celle du sang. Pourtant, lorsqu’elle se leva pour vérifier la bouteille posée sur la table ployant sous le nombre impressionnant de plats, Catarina constata que non, elle buvait bien le même vin depuis le début de la soirée. Quand elle le porta à nouveau à ses lèvres, il avait à nouveau sa saveur délicieusement fruitée.

     Vaguement interpellé, la sorcière observa quelques instants ses proches. Sorciers et sorcières avaient improvisé un banquet dans le grand salon. Des instruments de musiques, animés par la magie, jouaient pour accompagner la soirée. Certains mangeaient en bavardant, d’autres dansaient. Ils étaient tous détendus même si un vent d’excitation planait dans l’air. Depuis le temps qu’ils étaient en guerre contre la Transylvanie et la Valachie, leur récente victoire, accompagnée de leur occupation actuelle du château de Valachie était un énorme pas en avant. Maintenant que les principaux obstacles avaient été abattus, Catarina et les siens n’auraient guère de difficulté à faire tomber la Transylvanie dans les jours à venir.

     Elle reposa son verre sur la table. Si sa dernière gorgée était normale, celle qu’elle venait de prendre avait à nouveau cet arrière-goût désagréable.

     Ses délicats sourcils froncés, la sorcière jeta un coup d’œil à l’imposante horloge trônant non loin de la cheminée. Le tic-tac du balancier passait inaperçu sous les violons, flûtes et claviers. Du moins, il aurait dû. A cet instant, elle l’entendait distinctement. Trop distinctement. Mais surtout, elle constatait le retard de Janus. Il lui avait promis d’être là avant minuit, pour fêter sa victoire en sa compagnie. Une victoire qui lui revenait aussi, ses conseils avaient été plus que précieux pour l’aider à abattre ses ennemis. Même si l’un d’eux s’était abattu tout seul. Dans tous les cas, son allié tardait à arriver, les deux aiguilles se rapprochaient déjà du douze marqué en haut du cadran.

     Catarina soupira, tout en se rapprochant d’une fenêtre. Ce retard l’intriguait, sans l’inquiéter. Même si elle savait que Janus pouvait entrer dans le domaine, sans passer par la porte principale, elle jeta un coup d’œil à l’extérieur. Effectivement, le brouillard était dense. Ce qui pouvait expliquer son retard.

     Avec un sourire narquois, elle contempla les nappes de brume qui envahissait son nouveau domaine. Jusqu’à récemment, ce brouillard était annonciateur de mauvaises nouvelles. Aujourd’hui, il ne s’agissait plus que d’un simple phénomène naturel.

     Du moins, le croyait-elle.

     Lorsque minuit sonna, les flammes dans la cheminée jaillirent de leur prison et se mirent à ravager les pierres des murs comme s’ils étaient de bois.

     Les cris d’horreurs remplacèrent l’allégresse de la fête.

     Par quel miracle la pierre pouvait-elle brûler ?!

     Les convives de Catarina se ruèrent vers les sorties alors que l’incendie se propageait dans tout le château, bien trop vite pour être naturel.

     Les habitants des hameaux voisins sortirent de chez eux, impressionnés, effrayés, attirés par le phénomène. Ceux qui vivaient dans les villages les plus proches du château arrivaient en courant dans ceux un peu plus éloignés, escortés par des soldats et des loups. Les animaux les avaient tirés du lit pour les emmener à l’abri.

     Dans les cieux, au-dessus de l’imposant château de la Principauté de Valachie, un crucifix enflammé se détachait dans le noir de la nuit. Il était si grand qu’on l’apercevait distinctement à des kilomètres alentour. L’extrémité basse de sa colonne touchait les toits les plus hauts du château qui brûlaient déjà, dévoré par ce feu surnaturel.

     Les loups renversèrent leur gueule en arrière et hurlèrent à la lune, accompagnant un autre cri, bestial, qui résonna dans l’air. Un hurlement si terrible que la terre trembla jusqu’en Transylvanie.

     Il n’y eut aucun survivant parmi les occupants du château. Ceux qui avaient réussi à s’enfuir dans les hameaux désertés furent noyés dans le brouillard, perdus, incapables de retrouver leur chemin, condamné à errer jusqu’à ce que de nouvelles gerbes de feu surgissent pour les attraper et les achever.

     Avec l’épais brouillard et les éclats de l’incendie, il était difficile de voir d’où provenait l’attaque. Des ombres bougeaient parfois, déformées, indéchiffrables… Homme ou créature ?  Châtiment divin ? Cette croix ne pouvait pas être l’œuvre d’un démon surgit des enfers ! Ils la craignaient ! Pourtant, ce feu et ce hurlement ressemblait presque à celui d’un animal qui appartiendrait au Diable en personne. Quelle autre bête pouvait ainsi crier et manier le feu, à part un dragon ?

     Parmi tous les villageois, certains se signèrent avec crainte, murmurant des prières angoissées. D’autres contemplèrent le crucifix enflammé. Ils effectuèrent également le signe de croix, le visage emplit d’un espoir nouveau.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet