Marchant le long du couloir principal qui coupait en deux la classe, le nouveau venu fixa le point de son nouvel emplacement. Les minutes ressemblèrent à des heures, tout élève qui sentit son parfum citronné avait l'impression de consommer la meilleure des drogues. Une drogue qui se voulait d'abord douce, puis, après avoir pénétré dans l'œsophage du client, explosait comme une bombe impatiente de se faire connaitre. Ces dames comme ces messieurs portaient à merveille la couleur rouge. Des perles de transpiration coulaient le long de leur jambe, mais elles s'apparentaient plus à de la peur qu'une simple excitation libidineuse. La plupart montèrent même des signes de nervosité, peu commune alors que celui-ci n'eût franchi les portes de l'université seulement deux heures auparavant.
Sa destination se rapprocha de lui à pas de loup. Tentant de regarder un autre point visant à de stimuler sa curiosité, le gris leva aussitôt la tête lorsqu'il sentit le blond arriver devant sa personne. Un éclat de rouge vint s'éparpiller sur son visage fatigué. Les yeux braqués sur son joli minois, il en décela quelque chose pouvant se confondre avec du regret et de la retenue. Une retenue qui continua de s'étendre plus il avançait devant lui. Ses mirettes avaient l'air de vouloir se perdre dans ce bleu océan se confondant avec le rouge du sang. Telle une envie de laisser son propriétaire se morfondre dans ses cauchemars les plus profonds, l'esprit de la boule de poil réactiva les nuits où il peina à dormir, la faim et l'effroi se mélangeant parfaitement avec le désir de faire cesser cet horrible tintement de cloche dans sa tête.
Ses lèvres fines minutieusement dessinées se firent observer par le regard malicieux du gris qui, sentant les autres personnes le nez dans leur cahier, s'ouvrirent à mi-clos pour laisser passer un souffle de plainte.
Le temps reprit son travail initial lorsque Taehyung posa ses fesses sur la chaise. À peine qu'il effectua son action que toutes les paires d'yeux se contentèrent d'observer un point non voulu par leurs propriétaires, c'est-à-dire leur instituteur.
– Bien, j'espère que ces quelques minutes vous ont permis de réfléchir aux propositions subordonnées relatives ! Sortez votre manuel et allez à la page 10.
Le groupe s'exécuta et regarda de manière désabusée le professeur. Se contentant de soupirer, il fit rappeler au groupe qu'il était là pour étudier, et que s'il voulait valider son semestre, c'était maintenant qu'il fallait s'y mettre. Les approbations d'une petite minorité de la classe fit sourire l'homme qui s'assit bruyamment sur son fauteuil de bureau. Mettant sur freeze son vidéoprojecteur, il se décida à préparer la correction de l'exercice donné.
Le gris regarda sa fenêtre, l'air ailleurs.
Tapant à la manière d'une acharnée sur les vitres de la salle de cours, la pluie pressentait son envie de visiblement provoquer une inondation. Elle se fit de plus en plus forte, et étrangement, elle avait augmenté son intensité durant la présentation du blond. Il abordait une mine, désintéressée certes, mais avec un peu de peine. Cette peine que Jimin avait ressentie en le toisant du regard. Comme si un épisode s'était produit au sein même de son regard. Un air abattu vint s'imposer dans son moral. Celle-ci combinée avec la tentation de vouloir repartir dans le monde des rêves, sa conscience l'invita à aller observer le profil du blond, essayant de comprendre ce qu'il y avait de noté sur la diapositive du professeur.
Prenant des notes avec ardeur sur son cahier fraichement acheté, son stylo semblait bien à l'aise, saisi par les longs doigts de son propriétaire. Il rapprocha ensuite de lui le manuel de la boule de poil pour relier les notions aux phrases qu'ils se devaient d'analyser avant de les traduire.
Remarquant son camarade travaillant avec ardeur, Jimin secoua la tête négativement puis tenta de se mettre au travail.
Le cours suivit sa progression. Alors que le prof exigea que l'un d'entre eux lit un passage du livre, la boule de poil voyait que son camarade de classe n'avait aucun repère dans cette salle. Étant donné que ce fut rare pour l'université Han d'accueillir de nouveaux arrivants en cours de cursus, il remarqua assez vite que le blond levait parfois la tête pour placer ses repères dans la salle de classe. Le professeur ayant entretemps entrouvert la porte pour laisser passer un courant d'air, il devina que celui-ci devait sans doute se faire un petit plan de leur bâtiment dans sa tête. Mais, tandis que l'enseignant quémanda à un groupe de servir de modèle pour effectuer le futur exercice au tableau, le décoloré se raidit, une expression se fondant avec celle de la réflexion.
Je devais peut-être lui parler au lieu de le fixer, non ?
Il tapota doucement l'épaule du cendré, le sortant brusquement de sa concentration.
– Salut, tu m'as l'air perdu... Ça t'intéresserait si je t'emmène faire une petite visite du campus ?
Le concerné arqua un sourcil. Il ne mit pas de temps pour penser à une réponse. Le terme avoir l'air perdu jouait avec ses nerfs. Il tourna la tête et inspecta le visage de son voisin de table. D'un air bizarrement agacé, sortit alors :
– Oui, mais non. Déjà parce que je ne voudrais pas te déranger, mais en plus, le directeur lui-même me l'a faite cette visite. Donc désolé. En revanche, tu devrais te concentrer plus sur le cours que sur moi. Il reporta de nouveau son attention sur le cours.
Pris de court par sa réponse, le gris afficha un sourire forcé. Il ne s'attendait à ce que le blondin lui réponde avec un tel aplomb...
Et puis d'abord...
Qui avait dit que sa personne était plus importante que le cours du professeur Kwon ?!
– Mais c'est quoi son problème ? Marmonna-t-il
Il ne fit pas plus attention à son camarade de classe et reporta lui aussi son attention sur le cours en tournant farouchement les pages de son cahier.
Le supplice de cette première matinée de cours se termina sous les coups de cloche assourdissants. Rangeant ses affaires comme s'il était pressé, le gris se précipita dans le couloir encore vide d'élèves. Le ton de voix employé par son camarade de classe l'avait déplu. Se portant volontaire de perdre sur son temps pour le faire visiter le campus, voici que celui-ci se sentit miraculeusement pousser des ailes en proclamant que le directeur en personne lui avait fait la visite.
Réfléchis avant d'agir, toi...
Sa gorge lui indiquant des signes de sécheresse, il fila dans l'une des toilettes de son étage pour assouvir sa soif. Il estimait qu'il avait déjà trop consommé sa salive pour un matin de rentrée. Toujours la conversation en boucle de son interlocution avec le cendré, il essaya néanmoins d'oublier sa première impression sur lui. Une impression qui pourrait tomber dans les oreilles d'un détraqué, s'il venait à l'énoncer à voix haute.
La porte des toilettes déjà ouverte laissa s'échapper une odeur âcre impossible à esquiver. Ne disposant pas de bouteille d'eau en main, il abandonna l'idée d'aller boire et mit le cap vers l'amphithéâtre de son bâtiment, le discours fastidieux du fameux directeur n'allait pas tarder à être entamé.
Il ne fit pas l'effort d'accélérer sa marche. Depuis qu'il était dans cette université, le discours n'avait pas subi de modifications. Entendre les mêmes mots chaque année rendait la boule de poil de plus en plus capable à mémoriser ces mots prononcés sans la moindre douceur. Des flèches et des piques se dispersaient sous l'haleine flétrie du vieil homme souhaitant garder son poste à jamais. C'était l'archétype parfait du proviseur ayant rencontré la génération d'avant. Et, certaines spéculaient même sur le fait qu'il aurait rencontré la génération antérieure.
Pendant que Jimin marcha, son ventre criait famine. Il se maudit de ne pas avoir apporté un autre encas en attendant la pause du déjeuner. Caressant furtivement son ventre pour diminuer convenablement les bruits, une personne avec une touffe orange vint vers lui, se moquant de son apparence.
– Toi, ça se voit que tu ne t'es pas levé du bon pied !
– Hoseok-Hyung !
À peine que celui-ci eut fermé la bouche, le dénommé Hoseok se jeta sur lui.
– Jimin ! Fit Hoseok en insistant sur les voyelles de son ami. Alors, comment ça va ? Les vacances se sont bien passées ?
– Déjà, je me passerais bien de tes stupides commentaires... Ricana le cadet. Mais, bref. Mis à part que le nouveau m'ait... cloué le bec ?
– Comment ça «cloué le bec» Chim ? Questionna l'orangé.
Le nez à l'air, Le gris semblait avoir perdu pied. Décidément, cette rentrée paraissait avoir envie de titiller l'esprit du jeune homme à la chevelure grise.
– Je lui ai proposé de lui faire visiter l'établissement, il s'est senti puissant de me dire que c'est le directeur qui lui a fait ça... Aaah ça m'énerve !
– Pourquoi tu t'es préoccupé de lui toi aussi ? C'est bon, c'est un grand garçon Chim. Il afficha une mine curieuse. Alors, c'est quoi son petit nom ?
– Pourquoi «petit» ? Son nom c'est... Kim. Il marqua un silence. Kim Tae... Hyung ?
La boule de poil remarqua un silence. Cette fois-ci, ses joues s'empourprèrent. Sans savoir pourquoi son cerveau lui envoya des images de son voisin de table écrivant avec soin la correction d'un exercice effectué durant la matinée, il prit une grande inspiration avant de continuer dans sa lancée.
– Enfin bon... Pour dire vrai, j'étais trop occupé à regarder la fenêtre que de l'écouter.
– Alors toi, tu veux aider un camarade de classe, mais tu n'es même pas capable de retenir son nom ? Il soupira.
Jimin frappa son ami avant de lui dire qu'il avait la nécessité de boire, mais que les toilettes lui avaient rapidement retirer son envie. Le jeune orangé sortit que celles à l'étage supérieur étaient plus propres et que la flagrance était bien plus agréable pour aller se mouiller le visage. Remerciant son aîné, il courut cette fois-ci pour ne pas être dévisagé par les autres étudiants qui seront assis confortablement dans leur siège. Celui-ci répondit par un signe de main pour ensuite aller s'asseoir quelque part.
Il revint quelques minutes plus tard, la pense remplie d'eau. Tandis qu'il effectua ses pas, il aperçut son professeur se diriger à l'infirmerie. Il fronça des sourcils tout en pensant que celui-ci n'y allait pas pour une urgente raison. La tête secouée à la négative, il mit le cap vers l'endroit où Hoseok l'attendait.
Plusieurs groupes de filles ici et là passèrent devant l'orangé.
Elles jabotèrent sur le nouveau qui aurait quitté son ancienne université parce que ses parents avaient muté pour un bien meilleur travail. D'autres jeunes rapportèrent que, après une violente dispute de ses parents, la mère aurait pris la ferme décision de partir avec son fils à Seoul. Et que ce n'était pas l'argent qui manquait au couple Kim pour faire céder au directeur d'accepter le blond dans l'université Han.
D'ailleurs, en voyant son ami sortir des toilettes, Hoseok informa de la suite de ces messes basses à Jimin, étonné de la rapidité des rumeurs concernant le blond.
– Il vient à peine d'arriver et tout le monde sait déjà à quoi il ressemble...
– C'est la particularité de cette fac, mon cher. Ici, on remarque assez vite si tu as changé quelque chose à ton style, ou bien si tes notes ont baissé.
– Mais ils n'ont même pas encore découvert son vrai visage. Je viens d'entendre une fille glousser sur sa première interaction avec lui... J'aurais dû fermer mes oreilles et me concentrer sur ma marche. Sortit Jimin dépité.
– Bah bah bah, ce sont les hormones ! C'est normal !
– Les hormones ? Peut-être bien oui. En tout cas, c'est clair que si c'était un suceur de sang comme toi, on n'oserait pas raconter des salades sur lui.
– Roh Jimin, tu forces. Dit l'orangé en le frappant doucement. Tu veux que je plante mes canines dans ton cou, c'est ça ?
– Non ! S'écria-t-il. S'il te plait non... En plus, ça doit faire bien mal... Le sang, les globules rouges... Un liquide si épais peut-il être vraiment délicieux ? Ouh, très peu pour moi.
– Hum, tu as de la chance qu'on est dans le bahut. Bon, si tu restes là, moi, je vais dans l'amphi, le directeur ne va pas tarder à parler.
La boule de poil se leva et actionna les jambes pour suivre son ami l'attendant patiemment. Tandis qu'un groupe d'élèves se pressa pour entrer dans l'immense salle, au coin de l'œil, le plus jeune remarqua une chevelure blonde se déplacer vers un distributeur non loin de lui. La machine effectuant son travail, une bouteille d'eau en sortit en quelques secondes. Il ouvrit et en but un peu de son contenu. Le regard penseur, il croisa les mirettes du gris, qui n'arrivaient pas à décoller les siennes de sa lucarne.
Un froid envahit le corps de l'étudiant. Alors que les élèves se firent de plus en plus nombreux à traverser la porte de l'endroit, tout à coup, Jimin tapota l'épaule d'Hoseok et le fixa d'un œil lugubre.
– Enfin, si tu es capable de le faire là, devant ces personnes, je ne suis pas contre.
L'orangé ignora les paroles de son ami, remarquant le cendré avoir traversé le seuil de la porte de l'amphithéâtre.
Celui-ci avait maintenant donné l'envie de planter ses canines dans son cou.
Jung Hoseok, comme la plupart des êtres vivants dans le monde des mortels, était un vampire. Pour pouvoir se rendre dans son monde de naissance, une sorte de pont reliait le monde des humains à celui des vampires. Lorsqu'une personne entrait dans ce monde, un ciel bleu dépourvu de soleil guida les voyageurs. La légende racontait que les vampires détestaient le soleil, ce monde ne fit pas exception à la règle.
Nombreux étaient les individus enveloppant le monde de la nuit comme le récit d'une légende destinée à faire peur aux enfants.
Une légende terrifiante comme une autre.
Pourtant, ces entités avaient bien des différences sociales entre eux. Ils ne vivaient pas dans l'euphorie la plus complète et on dénombrait le nombre de dhampires qui malheureusement n'avaient pas subi la procédure de transformation à temps d'une centaine de «morts».
Il serait complètement autodestructeur de penser que le monde des vampires et que le monde des humains étaient liés par un même espace-temps.
Le ciel défilait différemment. À titre d'exemple, s'y rendre un lundi équivaut à sortir au plus tôt le lundi de la semaine suivante, ou alors dans un, deux ou peut-être trois mois plus tard.
Les jours terrestres égalaient la longueur des semaines vampiriques. Se munir d'un calendrier et d'une montre pour éviter de se faire happer par le temps étaient primordial.
– Toi, tu fais partie de quel clan déjà ?
– Je suis un bourgeois Chim...
– Silence les deux là-bas. Toisa le directeur.
Ce monde ressortait à peine d'une guerre sans merci. Même si celle-ci fut achevée il y avait de cela des dizaines années, les esprits et les consciences étaient toujours ravagés par les conséquences de cet événement. Lorsqu'une personne ayant perdu un de ses proches durant ce bain de sang en parlait, ses proches la suppliaient d'aller s'exiler pour un temps.
Des terres où tous co-habitaient ensemble, maintenant que celles-ci étaient divisées par clan.
Dans un coin reculé, les bâtards étaient les vampires les plus pauvres du royaume. Parmi ceux qui gagnaient de l'argent, la capacité de s'offrir un repas bien garni signifiait se couper les vivres durant plusieurs semaines. Ils n'étaient pas acceptés par la population vampirique. Les voleurs, les prisonniers, les personnes à qui on avait tout simplement oublié l'existence, se retrouvaient dans ce clan. Leur haleine très mauvaise et leur hygiène quasi inexistante formaient des blagues à connotation très négative au sein d'autres clans. On les traitait presque comme des animaux en cage.
Enfin, il serait juste de constater que la condition des animaux étaient bien meilleurs que la leur.
Avançant dans un sentier où arbres et verdure perpétuaient dans la vision des êtres de la nuit, les bourgeois appartenaient à ce qu'on pourrait considérer comme étant la classe moyenne. Des divisions subsistaient entre eux concernant la répartition des richesses. L'argent étant la principale source de conflit, beaucoup y perdaient la vie. Leur attrait vampirique était les yeux d'un rouge clair, montrant leur envie de mordre une personne et lorsque cette envie était comblée.
Un fait intéressant, beaucoup de bourgeois vivaient dans le monde des humains, comme Hoseok depuis sa plus tendre enfance.
Une forêt vétuste et une morsure de serpent plus tard, le clan des Nobles, aussi appelé les chiens du clan supérieur, se vantait de montrer leurs richesses. Leur occupation favorite, qu'on pourrait qualifier d'enfantine, étaient d'envoyer des piques pour recevoir les honneurs d'autres clans. Surtout aux bourgeois. Nombreux vampires nobles faisaient partie de la classe des bourgeois, avant de se marier. Leur attrait vampirique qu'un grand nombre de bourgeois enviait était que les nobles possédaient des pouvoirs. Ils les mettaient à profit pour impressionner les bâtards qui jour et nuit rampaient à leurs pieds pour obtenir ne serait-ce que de la pitié.
Celui-ci faisait trembler les bâtards qui redoutaient d'avoir l'idée saugrenue de venir les importuner.
D'une beauté sans pareille et possédant de magnifiques ailes noires, les déchus avaient la merveilleuse, mais également l'horrible capacité de transformer les humains en dhampires, qui deviendront des vampires par la suite. Le destin les adorant au point de vouloir se matérialiser pour devenir un suceur de sang, leur avait donné la possibilité de connaitre leurs âmes-sœurs au toucher. Leurs yeux rouge sang séduisants soumirent les autres clans à leurs volontés.
Et on ne peut pas dire que certains nobles oubliaient presque leur dignité pour cela.
C'étaient de grands manipulateurs...
Tous ?
Et enfin, après avoir traversé un somptueux jardin composé de roses noires enivrantes, à première vue, on pourrait penser que ce clan correspondrait en tous points avec des vampires issus de livres pour enfant.
La couronne fièrement posée sur la tête, mais qui portait une once de malheur dans leur façon de se comporter.
~Les Kim espérait qu'un jour, une personne dont la folie coulait dans ses veines, puisse les libérer de cet arbre généalogique de disgrâce. ~