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LilaMystery
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Prologue

Les sirènes de police s’estompent doucement alors que la ville s’endort. Couché sur le toit d’un immeuble de Beacon Hill, un jeune homme observe à travers ses jumelles les derniers agents franchir la grande porte vitrée de la Galerie aux Bijoux. Ils se saluent avant de partir chacun de leur côté, bredouilles. Le garçon sourit. Tout se déroule comme prévu. Le soir de la pleine lune, la police viendra déposer milles dollars sur le toit de l’hôtel La Luna. Il n’aura plus qu’à aller récupérer l’argent et leur laisser la perle. Rien de plus simple.

On ne peut pourtant pas lui reprocher de n’avoir laissé aucune chance aux autorités. Après tout, il leur suffirait juste de comprendre le véritable sens de son dernier message. Mais, visiblement, aucun policier de Boston n’est assez intelligent pour apprécier la subtilité de l’énigme du voleur. Enfin, il ne va pas s’en plaindre. Bien que voir tout ce beau monde se démener pour l’attraper soit assez divertissant, c’est seulement parce qu’il a besoin d’argent qu’il joue cette comédie. Il était loin de s’imaginer que cette histoire le mènerait jusqu’à subtiliser la pièce maîtresse d’une bijouterie aussi sécurisée, le tout devant une myriade de visiteurs venus exprès pour le voir à l’œuvre.

Depuis que Monsieur Davis, le propriétaire de la Galerie aux Bijoux, l’avait publiquement défié de s’emparer de sa dernière acquisition, la cote du voleur avait grimpé en flèche. L’affaire avait été relatée dans tous les médias de la ville et largement diffusée sur les réseaux sociaux. Un coup marketing rondement mené de la part du PDG de la petite galerie qui avait réussi à doubler son chiffre d’affaires en attirant le nombre grandissant des admirateurs de l’As de Pique.

Car oui, le voleur possède désormais un fan club. Cette découverte a d’abord terrifié le garçon qui s’est demandé ce qui ne tournait pas rond dans la tête de ces gens. Et puis, l’idée a fini par lui plaire. Être le magicien masqué, comme disent les médias, n’est pas si mal. Enfin, ses talents de prestidigitateur et son sens du spectacle sont connus et reconnus.

Déposant ses jumelles, le jeune homme tourne son attention sur la petite boite à bijoux posée devant lui. Cette semaine, quand tout Boston s’est demandé s’il allait relever le défi de Monsieur Davis, lui-même s’est longuement posé la question. Il a hésité jusqu’à la dernière minute. S’attaquer à une cible d’une telle valeur n’était clairement pas dans ses plans et aurait pu s’avérer très dangereux pour lui. Mais, au final, il n’a pas pu résister à un tel défi.

À l’intérieur du petit écrin violet, Gold Lily luit d’un éclat doré. Le voleur n’en revient toujours pas. Cela a été si simple. Les couloirs étroits de la galerie ont grandement limité les actions des policiers et, loin de le handicaper, le nombre important de visiteurs n’a fait que jouer en sa faveur. Son public l’a même acclamé quand il est apparu sans prévenir. Alors c’est ça, la célébrité ? Il pourrait facilement y prendre goût…

Une étrange mélancolie s’empare du jeune homme alors qu’il observe avec intérêt la perle briller entre ses doigts. Une fois l’argent en main, il ne devrait plus avoir besoin de voler quoi que ce soit. Ce vol était donc son dernier, le clou du spectacle. Applaudissements et rideaux. Dans un soupir, le garçon se met à contempler le ciel étoilé. C’est une belle nuit sans nuage, idéale pour admirer les astres.

— Un temps parfait pour voler, sourit-il soudain.

Il range soigneusement Gold Lily dans la poche de son pantalon et bondit sur ses deux jambes. Puis il prend le temps d’étudier la direction du vent pour calculer son itinéraire et s’assure que tout fonctionne. Il n’oublie rien. Alors, sans un regard en arrière, il court à tout allure vers le coin nord-est du toit et se jette torse en avant dans le vide. Sa main se referme sur le petit levier d’activation ancré dans la bretelle de son sac et, quelques secondes plus tard, il se retrouve à planer au-dessus des buildings bostoniens. Cela ne fait pas longtemps que le jeune homme a réussi à mettre au point ce petit deltaplane déployable mais il ne peut déjà plus s’en passer. Certes, il faut encore qu’il trouve un moyen de le dissimuler correctement dans sa tenue de scène mais, en attendant, il n’y a rien de plus grisant qu’un petit tour dans les airs en pleine nuit.

Le garçon sourit à pleine dents, enivré par le parfum de la douce lune et le calme apaisant qui règne dans la ville endormie. Il aime cette sensation de liberté, de force et d'espoir que l'astre provoque en lui. Sa lumière brumeuse, son aspect mystique... Y a-t-il spectacle plus grandiose que celui de l’univers ? Les vêtements sombres du voleur se fondent à merveille dans la nuit, lui permettant de passer inaperçu. Et c’est dans le quartier de Charlestown, tout au nord de la ville, qu’il termine sa course en toute tranquillité. Il se pose sur une maison au toit légèrement incliné et observe avec délectation son deltaplane se rétracter sans problème dans son sac. Puis, comme son corps fourmille de l’excitation et l’adrénaline provoquées par ses deux vols de la soirée, le garçon décide de s’asseoir un peu, le temps de redescendre sur terre.

Après un long moment de méditation, il ouvre les yeux et une lumière attire son attention. Il doit être dans les alentours de trois heures du matin et pourtant une pièce est encore allumée au 39 Lynde Street. En sortant ses jumelles, le voleur perçoit des marques sur la façade du bâtiment à l’endroit où devait jadis se trouver un insigne. La différence d’usure sur le mur permet de déchiffrer le contour de quelques lettres : « Bur…au dét…ive… J…on ».

— Un détective privé ? déduit-il après réflexion avec un rictus rieur.

Pour lui, cette sorte d’enquêteurs n’est pas très utile. Ils agissent après coup. Ils nous racontent ce qu’il s’est passé une fois qu’il est trop tard et assouvissent les bas besoins de voyeurisme de gens qui feraient mieux d’apprendre à faire confiance à leurs proches. Détournant bien vite le regard, le voleur s’apprête à descendre du toit quand son attention est de nouveau attirée en direction du bureau du détective. Une des fenêtres s’est ouverte pour laisser apparaître une fille.

Les longs cheveux châtains de la jeune femme virevoltent légèrement au contact du vent frais alors qu’elle s’appuie sur le rebord de la fenêtre pour observer le ciel. Elle porte une tasse de café à ses lèvres puis ses yeux se perdent à l’horizon avec tristesse. Pourquoi est-elle encore debout à une heure si tardive où Boston dort ? Et surtout, que fait-elle dans le bureau d’un détective ?

Curieux, le garçon tente de régler ses jumelles sur la nouvelle venue quand celle-ci tourne le regard dans sa direction. Le voleur s’aplatit aussitôt contre le toit pour ne pas se faire repérer. Quand il se relève quelques secondes plus tard, il trouve la fenêtre fermée, volets rabattus. Sans se poser plus de question, il range une nouvelle fois ses jumelles et entreprend de regagner la terre ferme. Puis, son sac sur le dos et la capuche de son sweat rabattue sur le visage, il décide de rentrer à pied, non sans apprécier le calme autour de lui.


Dans la ville de New-York, les rues sont bien plus animées. Plusieurs couche-tard vont et viennent, alternant virées dans les bars, sorties en boites et errances dans les parcs. Deux jeunes femmes légèrement éméchées sortent d’un des nombreux dance clubs qui font résonner le quartier de Brooklyn de musiques en tout genre. Riant à gorges déployées, elles avancent en se soutenant mutuellement jusqu’à atterrir sur un banc. Soupirant de contentement, elles profitent de la douce brise pour se rafraîchir et ne remarquent même pas l’homme assis à l’autre bout. Ce dernier les jauge un instant puis, apparemment agacé par leur présence, se lève. Il visse son fedora sur son crâne, allume une cigarette et c’est dans cette nuit des plus banales qu’il se met à arpenter les rues de la ville.

Une bonne quinzaine de minutes plus tard, sa deuxième cigarette terminée, l’homme entre finalement dans un cybercafé. Dans la petite salle au papier-peint défraichi, une dizaine de clients occupent les habitacles. Chacun les yeux rivés sur son poste. Analysant rapidement chaque personne, l’homme traverse la pièce pour s’installer dans un habitacle libre, près d’un jeune visiblement absorbé par un jeu d’échec en ligne. En s’asseyant, il dépose son chapeau pour découvrir des cheveux courts grisonnants, puis se met à parcourir des journaux en ligne pour lire les dernières actualités.

À côté de lui, l’adolescent finit par se rendre compte de l’heure tardive et éteindre son poste. Il enfile son sac en bandoulière sur son épaule et part à la hâte, sans un regard envers le quinquagénaire. L’homme le regarde disparaitre, s’assurant par la même occasion que personne dans la salle ne l’observe. Puis il tend discrètement le bras sous la chaise de l’adolescent pour y ramasser un bout de papier. Il le déplie avec discrétion et le parcourt rapidement.

C’est un croquis grossièrement gribouillé d’un homme barbu portant une couronne et se tenant à droite d’une grande tour parsemée de lierres. Face à ce dessin enfantin, l’homme esquisse un sourire avant de rouler le papier en boule et de le jeter dans la poubelle à ses pieds. Il glisse alors sa main dans la poche de sa veste et en sort son portable. À l’écran figure une étrange suite de lettres, de chiffres et de symboles.

Avec une patience extrême, il se met à taper un à un tous les caractères sur le vieux clavier d’ordinateur. Cela lui prend plusieurs minutes au bout desquelles il prend le temps d’observer le résultat : 

ZTq1iKqemXrS7DAfiBC3lDz1wkI/7CHci8etd9lQF/p4NH1+9gy8FL6A8HOjwzzm

 Puis, avec une pointe d’impatience, l’homme sélectionne le tout pour le copier et le coller dans une boite de décryptage qu’il trouve sur le net. Le croquis de l’adolescent en mémoire, il tape le mot de passe et voit alors le message décrypté s’afficher sous ses yeux. Il ne faut que deux secondes à l’homme pour le lire, suite à quoi il referme immédiatement la page et efface toute trace de son historique. L’air désormais grave, il éteint son poste, replace son chapeau et sort du cybercafé.

Il marche d’un pas machinal sur plusieurs mètres avant de sortir son briquet et brûler la feuille contenant le message encrypté. Puis il s’allume une nouvelle cigarette et prend la direction de son hôtel.

*

Note de l’autrice :

J’ai délibérément laissé le message crypté. À vous de deviner le mot de passe pour le décrypter !

Tout ce que vous avez à faire est de retaper le message sur le site encrypt.toolpie.com puis de rentrer le mot de passe en lettres minuscules...

*

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