— Je pensais t’avoir dit de ne pas te faire remarquer. 

Nina se sentait un peu engourdie, et bizarre. Toutefois, la voix d’homme, menaçante au point de lui donner des sueurs froides, la fit lever les yeux. Il s’agissait d’un grand brun bien habillé qui la regardait avec dédain de ses yeux glaçants. 

Qui était-il ? Où était-elle ? Elle ne reconnaissait pas ces lieux. Rêvait-elle ? 

— Mais tu as encore fait des tiennes au banquet du Prince Héritier, continua l’homme d’une voix froide. Pourquoi ? 

Nina voulut prendre la parole. Elle resta aussi muette qu’une carpe. Quelque chose la bloquait. Soudain devant elle apparut un menu déroulant avec trois choix. 

Si Nina avait pu, elle aurait écarquillé les yeux. Mais même ça, elle n’en était pas capable. Elle ne pouvait que trembler. Etait-elle… dans le jeu ? 

Non, c’était impossible ! Inconcevable même ! Son cerveau scientifique cherchait une réponse logique pour la sortir de cette situation ou même l’expliquer. Sans succès. 

— J’attends ta réponse, la hâta l’homme. 

Nina n’avait pas d’autres choix que de gagner du temps. Elle avisa rapidement les réponses. Elle avait plus de chance avec le troisième. Elle le sélectionna. 

— Eh bien… je…

— Eh bien, je…, répéta-t-il lentement. Mais encore ?

Maintenant qu’elle y réfléchissait, Nina se souvenait de ce choix. Les deux derniers la menaient droit vers une mort certaine. Quant aux premiers, il avait la qualité de faire amende honorable. Quelle qu’ait pu être la faute qu’on lui reprochait, demander pardon était encore la meilleure solution. 

— Pardonn…

— Nous n’aurions pas cette discussion s’il suffisait que tu présentes des excuses, la coupa l’homme. A partir de maintenant, tu seras consignée dans ta chambre. Tu as interdiction de sortir, jusqu’à nouvel ordre. Tu en profiteras pour réfléchir à tes erreurs. 

Nina réfléchit encore. Si elle ne se trompait pas…

— Penelope Eckhart. 

Non, elle ne se trompait définitivement pas. Elle était bien dans le jeu, à la place de la vilaine. Cette confirmation la figea sur place. Ce n’était peut-être qu’un rêve mais dans le doute, elle ferait bien de faire très attention où elle mourrait. 

Nina déglutit. 

— Je te retire le nom d’Eckhart, statua l’homme. 

Que devait-elle faire ? Comment pourrait-elle survivre ? Elle était une scientifique et une Quincy, pas un personnage de fiction ou de jeu vidéo ! Cela lui apprendra à vouloir découvrir les dernières activités à la mode.

— Regarde-moi dans les yeux quand je te parle. 

Nina leva la tête et croisa son regard bleu et froid. Ce fut là qu’elle nota la présence d’un nombre au-dessus de sa tête. 

Le pourcentage d’affinité. Nul. Le début du mode difficile. 

— Je vois que tu as perdu la tête. 

Nina se crispa. Elle remercia intérieurement le jeu ou l’instance qui l’empêchait de bouger. Son esprit était la chose la plus importante à ses yeux. Il était inconcevable qu’on l’attaque sur ce point. Elle lui aurait crevé les yeux et l’aurait épinglé sur un mur avec son arc pour cela ! 

Son arc… Avait-elle seulement accès à ses capacités Quincy ici ? Elle garda cette question pour plus tard, quand elle serait “en sécurité” dans la chambre de Penelope Eckhart. 

Nina observa l’homme qu’elle identifia finalement comme étant Derrick Eckhart le fils aîné et héritier du Duc Eckhart. En le voyant sortir, elle reconnut les cheveux roses et le regard méprisant du second fils du Duc, Reynold Eckhart. 

Elle leva les yeux sur son pourcentage d’affinité. 

Elle était dans les ennuis. De gros ennuis. Si elle descendait en dessous de zéro, elle était certaine d’y laisser la vie. Et lui était déjà en négatif (aussi aberrant que cela puisse être !) Ce fut pourquoi elle ne répliqua rien quand il prit la parole, sans surprise en l’insultant. 

— Ca t’apprendra, Imbécile. 

Elle se leva alors et, comme demandé, elle suivit le majordome qui la raccompagna jusqu’à sa chambre. Une façon pour le Duché de s’assurer qu’elle était bien consignée dans sa chambre pour faire amende honorable. 

Quand la porte se referma, Nina soupira de soulagement. Seule enfin. Elle jeta un regard autour d’elle. La chambre était belle, un rien jeune fille. Mais ce n’était pas surprenant. Penelope ne devait pas avoir plus de seize ou dix-sept ans. 

Penelope… Que savait-elle exactement sur elle ? Pouvait-elle un peu se renseigner ? 

Elle chercha l’encart du système et appuya dessus. 

— Cela ne m’avance pas de beaucoup, soupira-t-elle en s’asseyant sur le couvre-lit. Je vais devoir y aller à tâtons. 

Nina observa les lieux encore un instant avant de se souvenir de son premier problème. Elle ferma les yeux et se concentra. Elle retint un autre soupir, de soulagement cette fois. Elle ressentait toutes les énergies spirituelles présentes dans le Duché. Elle n’en reconnut aucune toutefois. Tellement surprise, elle n’avait pas fait attention à celles de Derrick et Reynold Eckhart. Elle veillerait à les enregistrer à leur prochaine rencontre.