Loading...
Link copied
Loading...
Loading...
Mark all as read
You have no notification
Original
Fanfiction
Trending tags

Log In

or
@
Hikana
Share the book

CHAPITRE CINQ

JAGGER

Quand je remarque Sun s’éclipser de la foule qui s’est formĂ©e autour de moi, mes yeux suivent ses courbes sous le tissu fin de son pantalon noir. Elle s’arrĂȘte net devant un mec plus costaud qu’elle et lui fait signe d’arrĂȘter d’emmerder l’autre type qui se laisse faire ou bien manque cruellement de caractĂšre.

Mon regard n’arrive pas Ă  suivre les Ă©vĂ©nements ni Ă  comprendre ce qui se passe entre les deux. Je vois seulement le genou de Sun s’élancer Ă  une vitesse folle et partir droit dans les couilles du mec qui vient de la traiter de pute. AprĂšs le coup, le type s’écroule comme une merde sur le sol carrelĂ© et hurle de douleur, jusqu’à ce qu’un autre gars couvre son cri.

— La voleuse de Princeton, comment elle a Ă©clatĂ© les couilles de Lewis, j’aimerais pas prendre ce coup de genou.

Le type a dĂ» avoir trĂšs mal puisqu’il se tortille sur le sol, les yeux bouffis et rouge Ă©carlate.

Heureusement qu’elle ne m’a pas fait ça ce matin, pire encore cette nuit, quand ses fesses Ă©taient trop proches de ma queue. À ce moment, j’ai cru que j’allais perdre le contrĂŽle de mes gestes.

Depuis onze ans sans ĂȘtre auprĂšs d'elle, elle est devenue une vraie femme, avec des formes, et elle sait comment faire plaisir Ă  un homme. Je me demande si elle voit quelqu’un en ce moment Ă  part ce petit con qui l’a trompĂ©e avec Bethany. S’il pense qu’elle Ă©tait un bon coup, alors moi, je dois pas ĂȘtre humain pour dire qu'elle n'arrivait Ă  monter mon sexe alors que Sun a rĂ©ussi juste par un effleurement.

Alors que je mate un peu trop Sun qui trace vers l’issue de secours, sĂ»rement pour rejoindre les escaliers, la voix aiguĂ« de Bethany me ramĂšne brutalement Ă  la rĂ©alitĂ©.

Je tourne les yeux vers elle. Un dégoût me traverse soudainement.

Les mots de mon frĂšre jumeau, Adam, rĂ©sonnent encore dans ma tĂȘte quand je regarde Bethany s'avancer vers moi comme si j'Ă©tais devenu l'homme de sa vie, celui qu'elle aime : « Elle s’est tapĂ© presque tous les mecs de cette fac. Et le copain de Sun aussi, pendant qu’ils Ă©taient encore ensemble. »

La premiĂšre rĂšgle qu’on avait posĂ©e au dĂ©but, elle et moi, c’était simple : pas de tromperie.

Je vois maintenant qu’elle s’en foutait clairement de ma gueule pendant ces deux ans. Alors que moi, mĂȘme quand je n’arrivais pas Ă  bander avec elle, je n’ai jamais merdĂ© avec elle. Putain !

Certaines nanas pensent que je suis ce genre de mec. Le beau parleur. Celui qui baise Ă  droite Ă  gauche qui collectionne les trophĂ©es. Celui qui ramĂšne une fois par jour, une nouvelle meuf dans son lit. J’ai eu des relations, ouais, mais quand ça n’allait plus, ou quand je ne ressentais plus rien, je partais. Mais quand je suis cĂ©libataire, je ne me gĂȘne pas pour avoir des plans d’un soir, si la nana est partante pour se prendre un coup de queue.

Quand j’étais gosse, j’ai vu mes parents se dĂ©chirer tous les jours. Ma mĂšre, elle voyait un autre mec derriĂšre le dos de mon pĂšre. Cette histoire m’a marquĂ©.

Étant le deuxiĂšme, avec vingt minutes de moins que mon frĂšre jumeau Adam, je n’étais pas le chouchou de la famille Sullivan. Pourtant, j’ai quittĂ© ma vie d’avant pour partir avec ma mĂšre Ă  Londres. Pour la surveiller, pour ĂȘtre sĂ»r qu’elle ne fasse pas de conneries aprĂšs la sĂ©paration. Parce que c’était elle, en rĂ©alitĂ©, qui voyait un autre homme. Elle aimait encore mon pĂšre malgrĂ© tout, mais elle Ă©tait perdue, surtout parce qu’il prĂ©fĂ©rait ĂȘtre au travail plutĂŽt que d’ĂȘtre avec sa propre famille. Et puis, il y avait la pression de mes grands-parents. Bien qu'ils soient plus cool et respectables que ma mĂšre, ils n’ont jamais acceptĂ© mon pĂšre comme un membre de leur famille.

— Pourquoi regardais-tu, la voleuse ? me demande Bethany, Ă©nervĂ©e.

— En mĂȘme temps, elle a littĂ©ralement castrĂ© un mec !

Bethany monte sur ses grands chevaux, et je sais que, Ă  cet instant, la jalousie qu’elle ressent brille dans ses pupilles marrons. Ça m’amuse de voir sa jalousie, alors qu’elle me trompe depuis des annĂ©es dans cette putain d’université !

— C’est impressionnant, non ? Si c’était moi, ça n’aurait pas Ă©tĂ© pareil ?

Elle commence sérieusement à me casser les couilles !

— Dis-moi, pourquoi pendant ces deux ans tu n’as jamais voulu que je vienne te voir ? Au lieu de me faire une scùne devant toutes ces filles !

— Je protĂšge ce qu’il m’appartient ! T’es mon petit ami et nous allons bientĂŽt nous fiancĂ©s, non, comme ton grand-pĂšre le voulait ?

Mon grand-pĂšre n’a jamais supportĂ© Bethany. Il a juste eu pitiĂ© de moi le jour oĂč il m’a pris Ă  part pour me dire qu’il ne la sentait pas, et qu’il ne la sentirait jamais. Il savait dĂ©jĂ  oĂč cette relation allait me mener.

D’un seul coup, mon expression change. Plus dure que d’habitude. Bethany le capte direct, baisse les yeux et commence à jouer avec le bas de son t-shirt.

— Je suis sĂ»re que c’est cette Sun qui t’a racontĂ© des conneries parce qu’elle est jalouse de moi, balance-t-elle d’un coup.

Pourquoi me parle-t-elle de Sun ? Je ne l’ai mĂȘme pas mentionnĂ©e une seule fois.

— Tu flippes de quoi, au juste ? Que je dĂ©couvre que t’as couchĂ© avec tous ces mecs de cette fac ? Et que t’aies osĂ© t’envoyer en l’air avec le copain de Sun pendant qu’elle Ă©tait encore avec lui ?

Je pense Ă  Sun. Elle l’aimait vraiment, ce mec. Elle a tirĂ© une de ces tronches quand Adam a balancĂ© devant tout le monde que Bethany avait couchĂ© avec.

— Cette pute, je vais la tuer...

Bethany n’a mĂȘme pas le temps de finir sa phrase. Adam la coupe directe.

— Ce n’est pas Sun qui lui a dit. C’est moi, lĂąche-t-il, pour protĂ©ger Sun.

Soudain, j’interviens. Une Ă©motion me prend de court. Toutes ces annĂ©es passĂ©es avec Sun, sur ce foutu lac gelĂ©, je ne peux pas les balayer comme si de rien n’était. Mais voir Adam avec elle, tellement complice
 ça, je ne peux pas le supporter ! Sun ne l'aimait pas, en tout cas, pas avant son accident avec sa mĂšre, elle Ă©tait toujours collĂ©e Ă  mes baskets pour jouer avec son partenaire prĂ©fĂ©rĂ© au hockey.

— Pourquoi quand j’ai quelque chose, tu as toujours voulu avoir ce que j’avais, Adam ?

— De quoi parles-tu, Jagger ?

Je le prends Ă  part pour que personne n’écoute de ce que j’ai Ă  lui dire.

— Pourquoi aprĂšs l’accident, tu m’as volĂ© la seule amie que j’avais ?

À onze ans, je savais ce que je ressentais pour elle. J’étais loin d’ĂȘtre bĂȘte pour comprendre que sa prĂ©sence Ă©tait la seule source qui arrivait Ă  me rendre heureux quand ma mĂšre et mon pĂšre se disputer.

L’arrivĂ©e d’Adam a fait qu’elle m’a repoussĂ©, devenue trĂšs mĂ©chante et disait Ă  Jack, qu’elle n’était pas Ă  sa maison ou qu’elle dormait. AprĂšs ça, j’ai coupĂ© tous les liens avec mon pĂšre et mon frĂšre que j’avais avec eux. Avec Sun aussi qui m’avait abandonnĂ© Ă  son tour.

— Sun avait besoin de temps, me lance Adam, avant de me dĂ©voiler la vraie raison de son Ă©loignement. Et toi, tu voulais quoi ? Jouer au hockey du matin au soir, alors qu’elle venait de perdre sa maman !

Il m’explique que ma passion pour le hockey la rendait malheureuse. Elle est tombĂ©e en dĂ©pression aprĂšs avoir appris que sa mĂšre ne reviendrait jamais, et moi, j’insistais pour qu’elle continue Ă  jouer avec moi car je me sentais seul sans elle.

J’apprends brutalement de la bouche de mon frĂšre que depuis ce jour-lĂ , elle n’est plus jamais revenue sur une patinoire, ni mĂȘme enfiler des patins Ă  ses pieds. Pour elle, cette passion qu’on partageait, elle est morte avec Agathe Miller, la meilleure Hockeyeuse de l’AmĂ©rique, mais aussi mon modĂšle de toujours.

Les explications d’Adam me donnent une violente claque dans la gueule.

Je rĂ©alise enfin Ă  quel point j’ai Ă©tĂ© Ă©goĂŻste, centrĂ© sur moi-mĂȘme sans jamais prĂȘter attention Ă  Sun. J’ai Ă©tĂ© un putain de connard, tellement plongĂ© dans ma propre douleur d’ĂȘtre toujours l’oubliĂ© de la famille, que je n’ai pas vu la souffrance de Sun. Pendant que je me voyais comme la victime, j’ai laissĂ© Sun sombrer sans lever le moindre doigt pour l’aider.

Je retrouverai mon binîme ou ma rivale que j’ai toujours connue !

Sun n’a jamais aimĂ©, qu’on la dĂ©fie
.

Aprùs les cours et l’entraünement sur la glace, je file aux vestiaires pour me changer.

Dans la foulĂ©e, je chope mon tĂ©lĂ©phone et j’envoie un message Ă  Sun. Hier soir, elle m’a filĂ© son numĂ©ro, au cas oĂč si jamais y avait un souci avec la maison, ou un truc important. Ce soir, les gars de l’équipe ont prĂ©vu une soirĂ©e chez l’un d’entre eux. Pour ma part, j’ai refusĂ©.

Trop de mauvais souvenirs dans mon ancienne fac : l’alcool, les bastons, les emmerdes et les flics.

Je n'ai pas envie de décevoir une nouvelle fois mes grands-parents, si je veux reprendre les affaires des Sullivan un jour.

Ce n'est pas pour rien qu’ils m’ont dĂ©gagĂ© de mon ancienne universitĂ© et envoyĂ© ici, au New Jersey, pour finir l’annĂ©e au calme.

[Si Adam n’est pas parti,

dis-lui que je suis prĂȘt

dans deux minutes. J]

Sa réponse ne tarde pas à venir, le début de son message est plutÎt étonnant, je trouve.

[Je croyais qu’un mec comme

toi, aimait se bourrer la gueule

avec ses potes. C’est Ă©tonnant

venant d’un enfoirĂ© comme toi,

avec tes : cette fille est

bonne putain ! La prochaine

fois, je te castre comme celui

du hall, si tu vas encore dans

mon lit pour bander. S]

Je ne peux rien faire d’autre que rester comme un con devant la fin de son texto. Donc elle ne dormait pas ? Tous les trucs que je lui ai balancĂ©s cette nuit, juste parce que ouais
 je la trouvais canon dans sa nuisette, avec ce corps si parfait que je voulais balader mes mains sur sa peau. Elle a tout entendu ?

Je hausse les Ă©paules. Au moins maintenant, elle sait ce que je pense d’elle. Pas besoin de tourner autour du pot.

Mais bordel
 Un binĂŽme comme avant ? Parce que si je ne bande rien qu’en Ă©tant allongĂ© Ă  cĂŽtĂ© d’elle. Je ne suis mĂȘme pas sĂ»r de l’avoir considĂ©rĂ©e comme une amie, pas aprĂšs onze putains d’annĂ©es sans la revoir.

*

* *

AprĂšs avoir passĂ© deux bonnes heures Ă  me rĂ©pĂ©ter ce que j’allais dire Ă  Sun, j’ai prĂ©fĂ©rĂ© marcher Ă  pied tout le long de la route qui mĂšne Ă  la villa. Je savais que si je rentrais avec Sun en compagnie d'Adam, ça allait m’énerver.

J’arrive enfin Ă  destination et je vois Sun au loin, devant le barbecue, accompagnĂ©e d’une fille allongĂ©e sur le transat. Elles sont toutes les deux en maillot de bain, mouillĂ©es. Andrew sort de la maison avec des plateaux Ă  la main. L’odeur du bois chaud se mĂȘle Ă  celle de la viande cuite et emplie mes narines.

Quand je rentre par la petite porte gravée, non verrouillée, dans le grand portail électrique, un mécanisme se déclenche. Sun, attirée par le bruit, se tourne dans ma direction et croise les bras contre sa poitrine, comme si ma présence la dérangeait.

Son regard se radoucit lorsque je m’approche d'eux, Ă©puisĂ©, et je me laisse tomber sur l’un des transats.

— Bon, Sun, s’écrie sa copine qui s’assoit sur la chaise alors qu’Andrew lui masse ses Ă©paules. Je crois que tu me dois cent dollars !

— Je te dois rien du tout, moi ! MĂȘme pas un centime ! lui rĂ©ponds Sun, Ă©nervĂ©e.

— Ça va, ne fait pas la gueule, Sun !

— Mais je fais pas la gueule ! Il faut que je te rappelle que tu te tapes mon pĂšre
 Mon dieu je veux mĂȘme pas y penser ce que vous faites Ă  deux !

Alors Andrew, il a un faible pour les jeunes filles. C’est bizarre, parce qu’il peut avoir n’importe quelle femme rien qu’en claquant des doigts. En y regardant bien, cette fille a des traits qui me rappellent ceux de la mùre de Sun quand elle avait son ñge. Ça se trouve, ce genre de femmes, c’est vraiment son truc !

— MĂȘme le londonien, il n’est pas choquĂ©.

— Normal, t’as vu sa gueule ? Le genre Ă  sauter sur tout ce qui bouge ou Ă  bander dĂšs qu’il voit une paire de fesses. Ah oui, c’est vrai mon ex Ă©tait pareil, j’avais oubliĂ©.

Sun, si tu savais


— MĂȘme lui, il a fini par larguer Bethany qui a dĂ©truit ton couple. Comme quoi, le karma frappe toujours quand on s’y attend le moins, balance la copine de Sun.

— Ton grand-pĂšre va encore nous rejouer sa scĂšne prĂ©fĂ©rĂ©e de Charlie et la chocolaterie en apprenant cette bonne nouvelle ? me lance Andrew.

Face Ă  la rĂ©flexion d’Andrew, je me marre. Mon grand-pĂšre, c’est le genre de gars dur quand il n’aime pas quelqu’un, mais il sait aussi se montrer affectueux quand il le veut. Je l’imagine dĂ©jĂ  pousser un youpi, sortir de son lit d’un bond et se mettre Ă  danser, rien qu’en apprenant que j’ai enfin larguĂ© Bethany.

Sun tourne les talons vers moi, un sourire moqueur accrochĂ© Ă  son visage d’ange.

— Alors ? Tu l’as enfin compris que t’étais le roi des cocus ? Elle Ă©tait sĂ»rement cocue aussi, remarque.

— Tant mieux si tu me vois comme ça. Je suis peut-ĂȘtre ce genre de mec qui sait, Sun.

Comment this paragraph

Comment

No comment yet