Azure
Janvier 2019 – Morro Bay
Il fait nuit et je suis éveillée. Comme toutes les nuits depuis que je suis dans cette chambre d’hôpital. C’est-à-dire depuis onze jours. Ma vie à pris un gros tournent ces derniers mois et je ne pensais pas en arriver là. Vraisemblablement, je ne peux m’en prendre qu’à moi-même, je l’ai voulu. Je n’imaginais simplement pas que j’en ressortirai aussi brisée.
Mais me voilà, dans cette chambre aussi petite qu’un placard à balai, dont l’odeur aseptisée me rappelle de lointains et mauvais souvenirs. Heureusement que le lit est confortable sinon on pourrait vite se croire en prison. Il ne me reste qu’un jour à tenir mais après, où irais-je ?
-Mademoiselle Sullivan, il est temps de vous coucher. Vos voisins se plaignent de la lumière.
L’infirmière, que je n’avais pas entendu entrer, me tire de mes pensées. Qu’est-ce que j’en ai à faire de mes voisins ? Ils ne peuvent pas me foutre la paix ? Je ne viens pas les emmerder moi.
-Mademoiselle, vous avez entendue ?
-Oui j’ai entendu et je n’ai pas sommeil. Vous n’avez qu’à tirer le rideau, je lui sors en ne la regardant pas.
Je n’ai pas parlé depuis des jours, ma voix est grave et sans émotions. Je viens même de remarquer que j’ai la gorge très sèche, il faudrait peut-être que je bois. Je ne vois pas sa réaction mais je devine qu’elle ne sait pas quoi répondre vu mon ton froid. Et tu n’as pas intérêt ma petite, je ne suis pas d’humeur. Avec le manque de sommeil, il ne faut pas s’étonner.
-Très bien…dit-elle en tirant doucement le rideau me séparant de mon voisin de gauche.
Elle disparait aussi vite qu’elle est arrivée. Je me lève pour me rendre à la fenêtre. Je n’arrive pas à dormir. J’essaie mais en vain. J’ai tellement d’informations, de souvenirs mêlés à des sentiments tous plus contradictoires les uns que les autres, que je ne peux trouver le sommeil. J’ai le cerveau en surchauffe. Où est le bouton OFF ? Pourtant, je suis épuisée mais je ne sais pas quoi faire. Alors que mon regard, resté jusque-là figé sur la fontaine qui prône au milieu de l’entrée de l’hôpital, vogue involontairement sur un vieil homme. Il est assis sur un banc, en face de la digue du port. Entre ces mains, il tient un carnet sur lequel il a l’air de dessiner. Il me vient alors une idée. Et si j’écrivais ce qu’il m’est arrivé ? J’y verrais peut-être plus clair ? Sur le coup, ça me parait une bonne idée mais plus j’y réfléchis, plus je trouve ça débile.
Je cherche autour de moi quelque chose à faire. Je regarde l’horloge au mur, où elle affiche l’heure : 00h25. Je soupire d’épuisement.
-Oh et puis zut.
J’attrape un carnet qui traine sur ma table de chevet. Si je n’essaie pas, je ne saurais pas si ça marche. Alors si je dois encore faire une nuit blanche, autant essayer ça passera le temps.