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1 - Prologue
2 - 1 - Rêve palpable
3 - 2 - The cutie stalker
4 - 3 - Rencontre gênante
5 - 4 - Plaisir fantomatique
6 - 5 - Fantôme avec opacité augmentée
7 - 6 - Palpabilité approuvée
8 - 7 - Le silence de la nuit
9 - 8 - Mal de dos et présentations
10 - 9 - Quand y en a pour deux, y en a pour trois
11 - 10 - Second round et doutes
12 - 11 - Ghosté
13 - 12 - Les deux coqs se battent pour la même basse-cours
14 - 13 - Vérité et mur de son
15 - 14 - Au rythme de la musique
16 - Épilogue
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Pythonisse

5 - Fantôme avec opacité augmentée

Je me réveillai avec la désagréable sensation d’avoir le ventre humide. Dans un grognement ensommeillé, je roulai sur le côté et soulevai ma couverture pour découvrir que j’avais une nouvelle fois taché mes draps. Une grimace de dégoût passa sur mon visage et je me levai immédiatement afin de défaire mon lit pour lancer une machine. Je passai aussi sous la douche, une froide. Je me sentais épuisé. J’avais mal partout, mes muscles râlaient autant que moi et chaque geste les tirait douloureusement. Depuis que j’avais commencé à rêver de lui, mes songes étaient si intenses que mon sommeil n’était plus du tout réparateur. J’accumulais la fatigue et commençais à en ressentir les effets néfastes, comme le manque d’attention et la difficulté de concentration.

Afin de m’aider à me réveiller, je bus un café noir, sans sucre qui me fit grimacer. De base, je n’aimais pas beaucoup le café, j’en avais à la maison seulement pour quand ma mère et mes sœurs passaient me voir, mais ce matin, j’en avais besoin. Repassant devant le miroir pour vérifier que mon visage ne s’était pas transformé en un Picasso valant un bon million d’euros, je remarquai une tache sur mon cou. Intrigué, je m’approchai de la glace et tournai la tête ; j’étais rouge ?

À la hâte, je soulevai le col de mon t-shirt pour découvrir avec horreur que presque l’entièreté de mon cou et de mes épaules était constellée de petites taches rouges. J’ôtai mon haut avec empressement et observai mon reflet avec une moue d’incompréhension. J’avais aussi des marques dans le dos et sur le côté droit ma taille.

Ma première pensée me pointa la douleur que j’avais ressentie dans mon rêve, mais je pouffai de rire. Comment une douleur dans un rêve, même érotique, pouvait se matérialiser dans la réalité ? C’était stupide ! J’avais seulement dû me gratter dans la nuit ! Oui, voilà, me gratter et laisser une marque qui ressemblait comme deux gouttes d’eau à un suçon… Ou alors, c’était des boutons de chaleur ! Ça se pouvait ! Même début octobre ! Un rire gêné emplit ma salle de bain tandis que je me rhabillai, évitant soigneusement de me mirer à nouveau.

Je préférai oublier ça. De toute façon, ça ne faisait que corroborer ce que je pensais ; je tournais fou ! Je pris mes affaires et partis pour le travail, tentant de penser à tout sauf à cette stupide rougeur sur mon cou, « que j’avais oublié de cacher », pensai-je, une fois devant la boutique. Alors que je me trouvais un peu perdu, plaquant ma main sur mon cou pour dissimuler la rougeur la plus visible, Célia me héla de loin. Je sursautai et allai à sa rencontre.

— Salut Andy ! Comment ça va ?

— Salut ! Dis-moi, t’es une fille, t’as du fond de teint ?

Elle fronça les sourcils d’incompréhension avant de faire la tronche.

— Ça veut dire quoi ça ? Que parce que j’ai un vagin, je suis dans l’obligation de me maquiller ? Tu sais qu’il y a de plus en plus de gars qui se maquillent ? C’est comme ça que tu traites les femmes ?

Je reculai d’un pas devant tant d’agressivité.

— Quoi ? Non ! C’est pas ce que je voulais dire ! bégayai-je. Est-ce que tu as du fond de teint sur toi ?

Elle plissa les yeux, suspicieuse.

— Non, j’en mets pas. Pourquoi ?

Je fis la moue avant d’ôter la main de mon cou. Je vis alors le visage de ma collègue changer et afficher un sourire carnassier.

— Je vois. Monsieur Andy a fait des cochonneries et maintenant il se retrouve marqué et tout con, se moqua-t-elle alors que j’évitai son regard. T’inquiète bichon, on va te trouver quelque chose.

En quatrième vitesse, nous ouvrîmes le magasin et je laissai Célia me choisir un fond de teint dans la gamme de ceux que nous proposions. Tandis que je m’occupai du fond de caisse, elle m’appliqua un pansement.

— Voilà, ça fera l’affaire. On va pas te faire acheter un fond de teint que tu réutiliseras jamais ! rit-elle. Ce serait du gâchis !

J’acquiesçai et scannai la boîte qu’elle m’avait tendue pour la payer, pleurant intérieurement, puis j’allai vite la ranger dans mon casier et chercher les journaux du jour qui nous avait été distribué. À côté de la caisse, je les plaçai dans le présentoir avant de m’attarder sur le titre de la Une : « J’ai passé la nuit avec le fantôme de mon petit-ami qui est encore vivant ! ». Je le relus plusieurs fois, perplexe.

Finalement, je ne tins que quelques secondes avant d’empoigner le journal, de l’ouvrir à la page de l’article et de le parcourir en diagonale. La jeune femme expliquait son expérience singulière d’avoir eu des relations sexuelles avec l’esprit de son petit ami, alors en voyage depuis plus de trois mois à l’étranger. Le journal l’ayant contacté aussi, l’homme confirmait la version de sa chère et tendre, expliquant qu’il s’était senti sortir de son corps lors de son sommeil et était mystérieusement apparu dans la chambre de celle-ci. Les deux décrivaient leur expérience comme une sorte d’osmose charnelle très plaisante et affirmait avoir recours à cette « faculté » assez régulièrement depuis qu’ils avaient compris que tout ça n’était pas qu’un rêve.

Un scientifique, qui avait pu faire quelques expérimentations sur ce phénomène chez plusieurs autres personnes « atteintes » corroborait leur version, affirmant que l’être humain était à l’aube d’un changement notable dans sa relation avec le monde des esprits.

Je refermai violemment le journal et portai la main à mon cou avant d’être pris d’un rire dément. Non. Tout ceci n’était qu’une vaste blague. Comment un esprit pouvait avoir des relations sexuelles avec un humain ou même être palpable par ledit humain ? Le propre des fantômes n’était pas justement le fait qu’il pouvait traverser les murs ? Mon sang se glaça lorsque je relevai ma main blessée. Je l’avais traversé moi aussi.

Mon cœur se mit à battre la chamade. Non. Ça ne pouvait pas être vrai. Ça ne pouvait pas être l’explication à tout ce que je vivais depuis un mois. Sinon… ça voulait dire que… que je couchais presque tous les jours avec un inconnu !

Je reposai le journal avec le sentiment de ne plus savoir où j’en étais. Célia, qui n’avait rien vu de mon trouble, car occupée à ranger des produits, revint vers moi et se stoppa.

— Ça va Andy ? T’es tout pâle.

Je la regardai sans trop savoir quoi répondre, puis dans un geste incompréhensible, je me retournai, attrapai un paquet de cigarettes, un briquet et fonçai dans la ruelle. Je sortis une clope, l’allumai et aspirai profondément la fumée. Mon cerveau tournait à plein régime. Si je prenais cette information comme vraie, alors tout s’expliquait ; ma blessure, les suçons, le fait que depuis un mois je tachais plus mon lit que lorsque que j’avais arrêté les couches étant enfant… Soudain, mon portable sonna. Je vis le nom de Matt sur mon écran et décrochai dans la seconde.

— Mec, t’as entendu ce qu’ils disent à la télé ? me demanda-t-il, un sourire dans la voix.

Je soupirai, gémissant presque. À n’en pas douter qu’il avait entendu parler de cette histoire d’esprits.

— T’y crois, toi ? Genre, sortir de son corps pour aller fourrer sa bite dans quelqu’un ? C’est sérieux cette merde ?

Je l’entendis rire.

— Est-ce que ça expliquerait pas ton « dysfonctionnement » ?

Durant quelques minutes, je lui racontai tout ce qu’il avait manqué, la blessure, les suçons, les « preuves » sur mon matelas et sa réponse fut sans équivoque.

— Mec, faut que tu le choppes.

— ET COMMENT JE FAIS ÇA ?! hurlai-je. J’attends qu’il passe à l’épicerie et je lui dis « hey, mon gars, c’est toi qui viens presque toutes les nuits chez moi pour me baiser ou je suis vraiment en train de devenir fou ? Ça vous fera dix balles s’il vous plaît. » Nan mais… Oh quelle merde ! C’est la pire idée !

— Alors quoi ? reprit-il en riant. Tu veux pas comprendre ce qui t’arrive ?

— Je veux ! Mais… Je connais même pas son prénom !

— Je m’appelle Gabriel, dit une voix à côté de moi.

Surpris, je sursautai et fus incapable de parler durant les longues secondes où mon cerveau dut faire le point afin de réunir toutes les informations qui m’assaillaient. Le gars ! Il était là ! Il avait dit quoi ? Gabriel ?

— Andy ? m’appela Matt.

— J’te rappelle, lui dis-je avant de raccrocher sans quitter le gars des yeux.

— Désolé, c’est ta collègue qui m’a dit où te trouver. Je voulais pas… enfin… On peut parler ?

Quelque part dans ma boîte crânienne, une bombe nucléaire explosa et rasa tout sur son passage. Il se passait quoi là exactement ? Comme je ne répondis pas, il parla en premier.

— Écoute… Je sais pas trop comment te dire ça mais… en reprenant tes propres mots : oui, c’est moi qui viens presque toutes les nuits chez toi pour te baiser et non, t’es pas en train de devenir fou.

Le flot d’informations fut trop intense pour moi et je sentis mon visage rougir exagérément alors que des fines larmes coulaient sur mes joues. Alors, j’étais pas fou, hein ?

— Je suis désolé ! s’empressa-t-il de dire. J’étais pas conscient que c’était la réalité ! Je pensais juste que je rêvais de toi ! Je…

Je lui tournai le dos, voulant cacher mes larmes. C’était quoi cette merde ? Comment c’était possible ?

— Je suis désolé pour ta main, tenta-t-il. Mais hier soir, t’étais vraiment sexy.

Mon visage se calcina seul et je sortis une autre cigarette. Les mains tremblantes, j’eus du mal à faire fonctionner le briquet. Je lui tournai toujours le dos, incapable de lui faire face. Trop de choses se passaient dans mes pensées pour que je puisse y ajouter une conversation à suivre en plus.

— Andy ?

Le fait qu’il prononce mon prénom me fit me retourner un peu.

— Je sais, c’est bizarre comme situation et je suis pas… comment dire… pas vraiment fier de ce que j’ai fait avec toi. Pas que c’était pas bien ! J’ai trouvé ça super cool ! Mais plutôt… Comme je pensais rêver… j’avais pas beaucoup de retenue.

Réussissant enfin à allumer mon bâton de nicotine, je me retournai pour lui répondre quand la porte arrière du magasin s’ouvrit.

— Andy ! J’ai besoin de toi ! m’appela Célia.

Je laissai tomber ma clope au sol, l’écrasai avec mon pied et tout en avançant vers ma collègue je dis :

— Je finis à vingt heures. Attends-moi ici. On parlera.

— D’accord, accepta-t-il en hochant la tête.

Sur cette discussion des plus étranges, j’entrai dans la boutique, laissant Gabriel seul dans la ruelle.

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