Loading...
Report sent
1 - Prologue
2 - 1 - Rêve palpable
3 - 2 - The cutie stalker
4 - 3 - Rencontre gênante
5 - 4 - Plaisir fantomatique
6 - 5 - Fantôme avec opacité augmentée
7 - 6 - Palpabilité approuvée
8 - 7 - Le silence de la nuit
9 - 8 - Mal de dos et présentations
10 - 9 - Quand y en a pour deux, y en a pour trois
11 - 10 - Second round et doutes
12 - 11 - Ghosté
13 - 12 - Les deux coqs se battent pour la même basse-cours
14 - 13 - Vérité et mur de son
15 - 14 - Au rythme de la musique
16 - Épilogue
Loading...
Loading...
You have no notification
Mark all as read
@
Pythonisse

1 - Rêve palpable

Tout avait commencé il y a un mois. Je m’étais réveillé en pleine nuit, le ventre taché de ma semence et l’esprit encore dans mes songes. Une fois les battements de mon cœur calmés et mon cerveau totalement éveillé, j’avais essayé de me souvenir précisément de ce qu’il s’était passé, mais l’ensemble était resté flou, confus. J’avais vu les yeux noisette d’un homme qui voulait me dévorer, senti ses mains qui parcouraient mon corps, apprécié les caresses sur les parties les plus sensibles de mon anatomie.

Cette nuit-là, j’avais eu du mal à me rendormir et j’avais réfléchi un long moment. Du haut de mes vingt-quatre ans, je ne cumulais pas énormément d’expérience, sentimentalement et physiquement parlant. J’avais eu quelques petits amis, parfois des histoires sérieuses de quelques semaines qui s’étaient arrêtées parce que je m’ennuyais, parfois des relations fugaces d’à peine plusieurs jours.

Ce n’était pas quelque chose qui m’inquiétait. J’avais le temps pour trouver le grand amour. Où qu’il se cache, j’allais bien finir par le croiser. D’ailleurs, ne disait-on pas que l’amour se montrait seulement quand on le ne cherchait pas ?

Le lendemain, au travail, quand j’avais croisé ce jeune homme, j’avais eu du mal à ne pas réagir. J’avais dû redoubler d’efforts pour paraître naturel, sourire, être enjoué afin qu’il ne voie pas le trouble qui m’habitait. Lui avait été égal à lui-même ; poli, pressé et canon.

J’avais tenté de me convaincre que c’était seulement mon cerveau qui avait associé plusieurs idées et que mon célibat qui durait un peu devait y être pour quelque chose. Mais ça recommença le lendemain, puis le sur-lendemain. En un mois, j’avais passé plus de nuits à rêver de lui qu’à véritablement dormir. La fatigue commençait d’ailleurs à s’accumuler dans mon corps ; j’étais souvent courbaturé au niveau du dos, j’avais du mal à garder des chemins de pensées droits… Ces rêves érotiques m’épuisaient physiquement et mentalement.

Le pire dans tous ça, c’était que ces rêves faisaient ressortir une part de moi que je n’assumais pas totalement. C’était aussi une raison secondaire récurrente de mes séparations rapides ; j’aimais le sexe brutal. Le but n’était pas tant d’avoir mal que de ressentir la satisfaction d’être souillé, utilisé part mon partenaire comme un simple objet. Mes ex, avec leur « délicate et romantique » façon de me faire l’amour, m’ennuyaient grandement. Pour le dire vite, je me faisais chier au lit. Alors, rêver constamment d’un gars sexy qui me ravageait à chaque fois que je le croisais, était autant frustrant qu’excitant.

Ce soir, je devais rejoindre Matt, mon meilleur ami. Nous avions prévu une soirée beuverie. Aux alentours de vingt-deux heures, je fermai la boutique, fis le compte de la caisse, enlevai mon uniforme pour passer une tenue pas connotée « je sors du taf et j’avais la flemme de me changer », éteignis toutes les lumières ainsi que l’enseigne à l’extérieur et sortis finalement par la petite ruelle adjacente.

Engoncé dans son imposante doudoune orange, Il m’attendait en fumant une cigarette. Nous ne nous rendîmes pas loin. Le bar où nous avions l’habitude d’aller ne se trouvait qu’à une dizaine de minutes de marche et en y arrivant, nous nous installâmes à notre table habituelle. Le serveur nous servit son « comme d’habitude, messieurs ? » normalement réservé aux piliers de bar et nous acquiesçâmes, un peu gênés par le fait de savoir que nous venions assez souvent pour qu’il se souvienne de nous ainsi que de nos commandes.

Le temps qu’il aille préparer nos boissons, je me demandai si je devais partager mes incertitudes à mon ami. Le fait de rêver constamment de ce mec devait bien être la preuve d’un quelconque trouble, non ?

— Sinon, quoi de neuf ? me demanda-t-il soudainement.

Je pris sa question pour un signe du destin et me lançai.

— Eh ben… J’ai un souci.

Il m’interrogea du regard, m’invitant à poursuivre. Je cherchai la bonne façon de lui expliquer ça. Je réfléchis si longtemps sous son regard inquisiteur, que le serveur eut le temps de revenir et de nous déposer nos commandes que je payai. Au final, il valait peut-être mieux être honnête et direct. Au moins, la problématique serait posée et il pourrait me confirmer que j’avais un problème. Alors, je me lançai, sans filet de sécurité, conforté par l’amitié que nous partagions depuis l’école maternelle.

— Ça fait un mois que je rêve presque tous les soirs que je me fais baiser par un de mes clients de l’épicerie.

La gorgée qu’il avait en bouche en fut expulsée par un rire qu’il ne put contenir et arriva en plein sur mon pull. J’eus un mouvement de recul violent tandis qu’il se marrait.

— Mec ! T’es sérieux ?

Tandis qu’il riait à s’en tordre le ventre, j’ôtai mon vêtement chaud et tamponnai la base de mon cou qui avait, elle aussi, été victime de l’attaque surprise. Je puai le rhum, c’était dégueulasse. Quand il fut calmé de son fou-rire qui m’avait un peu vexé, il prit une longue inspiration et me regarda sérieusement.

— Tu peux me donner un peu plus de détails ?

Un sourire malicieux, digne des meilleurs méchants du MCU, traversa mon visage.

— Sur la façon dont je me fais baiser ? Avec plaisir ! Alors…

— Nan ! me coupa-t-il tandis que je riais à mon tour. Je voulais dire en général.

Je pris une gorgée de cocktail, mettant mes idées en ordre. Matt avait été le premier au courant de mon homosexualité et il m’avait toujours soutenu. Il était ce genre de personne qui se fichait bien de ce que faisaient les autres de leur vie, du moment que ce n’était pas répréhensible. De plus, il m’avait aidé à entrer dans le milieu gay, en m’accompagnant à des rassemblements et en hésitant pas à se faire passer pour mon copain quand j’en avais eu besoin. Il était un soutien que je chérissais et j’essayais d’être un aussi bon ami pour lui qu’il l’était pour moi.

Physiquement, il aurait facilement pu être mon type de mec. Il était plus grand que moi, mieux battit aussi, avec son amour du sport que je n’avais jamais compris. Si j’ajoutais à ça ses yeux bleus, ses cheveux blonds, ainsi que sa belle gueule, oui, il aurait pu rentrer dans mes cases. Pourtant, lui étant hétéro et notre amitié se renforçant depuis la maternelle, nous étions restés sur un plan d’amitié assez poussée, devenue presque un lien fraternel au fil du temps. Nous n’avions pratiquement aucun secret pour l’autre. Pratiquement aucun.

— En fait, y a pas grand-chose à dire. Il se passe rien de particulier avec lui. C’est juste un client qui passe régulièrement. Bon, il est sexy, certes et c’est clairement mon type. Mais genre… il se passe rien entre nous ! Au mieux, on s’effleure vaguement les mains quand je lui donne son sac, mais sinon, c’est le néant. Je connais même pas son prénom.

— C’est vrai que c’est bizarre, admit-il.

— Tu vois ! Et… Je sais pas. Du coup, je sais pas comment réagir quand il est là. Je rougis, je bafouille. À tous les coups, je suis cramé à dix mille kilomètres et il est trop gentil pour dire quoi que ce soit ou changer d’épicerie.

— Ou p’tet que ça lui plaît ?

Je ris, levant les yeux au ciel pour souligner la bêtise de sa remarque.

— Oui ! Et c’est d’ailleurs exactement pour ça qu’il ne tente rien ! Mais le problème c’est pas ça. Ça commence à devenir… vraiment bizarre. Genre, presque tous les soirs je rêve de lui… C’est flippant.

— T’es p’tet juste en manque et ton cerveau il compense avec ce qu’il peut ?

Je haussai les épaules, incertain, avant de prendre une nouvelle gorgée de mon verre. Est-ce que j’avais vraiment un problème ? Et si c’était le cas, est-ce que mon problème était d’ordre mental ou sexuel ?

— En tout cas, ça va pas te faire de mal vu que ce sont des rêves, ajouta-t-il en réfléchissant. Autant continuer à prendre ton pied, t’es coupable de rien.

— C’est vrai, acquiesçai-je. Mais je me sens mal par rapport à lui, tu vois ? Le pauvre, il a rien demandé et il me sert de sextoy mental depuis un mois. Si ça se trouve, il est même pas gay en plus. Et moi je fantasme à mort. J’te jure que quand je le vois, j’arrive pas à penser à autre chose.

Il rit, se moquant légèrement avant de me rassurer. Durant le temps que je passais avec lui, j’eus pourtant du mal à rester dans une ambiance festive. Je n’avais ni envie de rentrer chez moi, ni de m’endormir. Nous avons donc continué à boire, mélangeant des alcools divers à des biscuits apéro aux goûts douteux. Au milieu de la nuit, le bar dut malheureusement fermer et je me retrouvai, le pull puant le rhum, dans la brise fraîche de l’extérieur.

Habitant un peu plus loin que chez moi, Matt me raccompagna et nous arrivâmes rapidement devant mon petit immeuble. Il me demanda de le tenir au courant de mes « dysfonctionnements » et je lui envoyai un doigt d’honneur qui nous fit rire tous les deux. Après un signe de la main approximatif, je gravis lamentablement les deux étages qui me séparaient de mon petit appartement en râlant à chaque marche grimpée où je faillis tomber.

Je finis par atteindre mon étage, agrippé à la rambarde. Sur le palier, compte tenu de mon état d’ébriété avancé, je dus redoubler d’efforts afin de réussir à entrer la clé dans la serrure, ce qui me prit de longues et pénibles minutes qui me permirent de me rendre compte que j’essayais d’entrer chez mon voisin. Me décalant d’une porte, je m’accroupis et réussi enfin à ouvrir la porte.

Enfin chez moi, je claquai le battant en entrant, laissai tomber mon sac et mon pull aux relents alcoolisés par terre, puis envoyai mes chaussures au loin. N’ayant pas la force d’en faire plus, j’allai directement m’effondrer sur mon lit en grognant d’inconfort.

Les yeux rivés sur le plafond, je tentai sans résultat de fixer mon regard sur un point précis. Ma tête tournait beaucoup. La journée de demain allait être un enfer. Au programme : maux de ventre, gueule de bois et incapacité à supporter le soleil ainsi que le bruit, un véritable bonheur m’attendait…

Un bras étendu sur les yeux, perdu dans mes réflexions, je ne sentis pas immédiatement mon t-shirt se soulever. Un toucher froid s’étendit sur mon ventre. Je frissonnai un peu puis remis le tissu en place, me plaignant du manque de chauffage dans cette « résidence de merde ». Pourtant, quand la sensation de froid revint sur mon flanc, je réagis.

Tout d’abord, j’essayai de déterminer ce qu’il se passait tout en restant immobile. J’avais l’impression qu’une main se baladait sur ma taille, en explorant la fine courbe. Je ris, me moquant de mon état de manque évident. Mais quand je ressentis une légère griffure à la place des caresses, mon rire amusé mourut dans ma gorge. Intrigué, je baissai la tête et ce que je vis en face de moi me glaça d’effroi.

Je restai interdit une longue seconde, scrutant ce qui n’aurait pas dû se trouver là. C’était le gars de l’épicerie ! Enfin… Le gars de l’épicerie dont l’opacité aurait été modifiée, car je voyais clairement à travers lui. Littéralement parlant, il était à moitié transparent.

Je devais rêver éveillé, il n’y avait pas d’autre explication ! À part une maladie mentale invasive et terrifiante. Pourtant, il était bien là. Juste là, devant moi ! Je le reconnaissais, il n’y avait pas de doute possible.

La tête baissée, il s’était agenouillé à côté de moi sur le matelas qui ne semblait pas être déformé par son poids. Lorsque je vis sa main dessiner la courbe de ma hanche sur mon jean, ma jambe eut un spasme de réflexe. Merde. Lentement, il releva les yeux vers moi et quand nos regards se croisèrent, un cri de frayeur inhumain s’extirpa de ma bouche. Je me redressai à moitié et lui lançai mon poing au visage. Toute ma force le traversa et s’écrasa contre le mur à sa gauche. Je hurlai, sentant mes articulations craquer sous la force du coup.

La douleur fut intense dans mes phalanges et je portai ma main blessée à mon buste, reculant d’un bond, ce qui me fit tomber de mon lit. J’atterris le dos contre le sol et les jambes encore en l’air, en grognant. Quand sa tête dépassa du lit pour me regarder, je lui mis un énorme coup de pied en pleine tête. Cette fois, je ne le traversai pas. Il accusa mon coup et disparut là où je ne pus plus le voir.

Bizarrement, ces quelques intenses secondes m’avaient fait dessoûler. Dans une suite de gestes moins précis qu’espéré, je me relevai et lançai un regard circulaire à mon studio, cherchant le moindre signe d’une présence quelconque, d’une supercherie ou de n’importe quoi qui prouverait que je n’étais pas fou. Mais il n’y avait rien. Il n’y avait personne. Après quelques secondes de surveillance accrue de mon petit chez-moi, je me laissai tomber en tailleur sur mon parquet, la main toujours tremblante d’une douleur qui augmentait à chaque seconde.

Ok, donc clairement, j’étais fou. Je ne savais pas si c’était l’alcool ou seulement des hallucinations, mais je n’allais vraiment pas bien. Je remis toute ma vie en question ; devais-je retourner chez ma mère ? Demander à me faire interner ? Pouvais-je m’en sortir seul ?

Durant l’heure qui suivit, je fis les cent pas dans mon petit espace. Pendant un moment, je pensais même à aller au travail pour acheter un paquet de cigarettes et me remettre à fumer. Mais la flemme m’en dissuada. Alors pour m’occuper, je soignai ma main dont les articulations gonflées prenaient une teinte un peu plus bleutée que ma peau.

Comment this paragraph

Comment

No comment