Maman, regarde comme c'est beau !
Oh oui, Irina, c’est magnifique ! C'est un coquillage. Est-ce qu'il est vide ?
Oui, je ne vois rien dedans.
Attends, on va frapper à la porte. Toc toc, il y a quelqu'un ?
Ben maman, qu'est-ce que tu fais ?
Regarde, Irina !
Oh, qu'est-ce que c'est ?
Un Bernard l'ermite, ma chérie. Si tu veux garder ce trésor, tu dois lui trouver une autre coquille plus grosse.
Ziiiiiittttt ! Ziiiiiittttt ! Ziiiiiittttt !
Aïe !
Qu'est-ce que c'était ? Oh, saloperie de poisson électrique. Ce souvenir me revient souvent dans mes rêves. Au moins, ce poisson m'a réveillée avant la fin, c'est une bonne chose. Je déteste ce qui s'est passé par la suite. Le poisson n'a réveillé que moi, il a dû me confondre avec son repas. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive. Je devrais peut-être trouver des algues pour me cacher quand je dors.
Bon, j'aimerais commencer à remonter doucement. Je n'ai pas envie de réveiller les autres pour les prévenir, mais d'un autre côté, c'est plus sûr de remonter à plusieurs. Pff, ce n'est pas grave, je me ferai sermonner, j'ai l'habitude. Je vais juste leur envoyer une image mentale, ils la verront à leur réveil.
(Tr) - Irina, tu comptais vraiment remonter à la surface seule ?
Argh, tout sauf lui ! Pourquoi c'est lui qui a vu mes pensées ? Il va forcément réveiller ses frères, il va forcément le réveiller LUI. La remontée s’annonce pénible.
(Ir) - Oh Tristan, je ne t'ai pas réveillée quand même ? J'allais pas remonter de suite, j'attendais que quelqu'un se réveille, tu me connais ! Je ne ferai pas ça, voyons.
(Tr) - Ha ha ha ha ! C'est justement parce que je te connais que je t'arrête, avant que tu te mettes encore dans des situations incongrues.
(Ir) - Pff, ben non, t’inquiète pas ! Je vais attendre Gloria.
(Tr) - Ouais, c’est ça… Idriss, Weiss, debout les gars, vous aviez besoin de remonter, c'est le moment !
(We) - Putain, Tristan, tu fais chier ! Irina a qu'à se démerder ou attendre.
(Tr) - Je ne te demande pas ton avis. C'est une reproductrice, on ne peut pas la laisser prendre des risques inutiles.
(Id) - Je comprends, Tristan, mais Weiss a raison sur ce coup-là ! C'est pénible, elle aurait pu attendre le matin.
(Ir) - Désolée, je ne voulais pas vous déranger. Pff, Tristan, vous auriez pu me rejoindre plus tard.
(Tr) - Allez, assez parlé, on y va ! On prendra tout notre temps, ça évitera les accidents.
Nous avons commencé la remontée, palier par palier, dans un silence pesant. Enfin, nous commençons à apercevoir la lumière du soleil. La surface est encore loin.
(Ir) - Les gars, je commence à avoir faim, pas vous ?
(We) - Tu vas nous faire chier jusqu'au bout ! Chasser ici, c'est galère, alors tais-toi et nage ! me lança Weiss avec agacement.
(Tr) - Tu pourrais être plus aimable. On monte encore de deux-trois paliers pour faire une pause.
Pourquoi est-il devenu aussi agressif avec moi, au moment où j'avais le plus besoin de lui ? Je ne comprends pas. Il fut un temps où on s’entendait à merveille, il était si agréable et protecteur envers moi. Qu'ai-je fait de mal ?
Je suivais tranquillement un poisson-lanterne qui utilisait sa luminance pour trouver une proie quand deux jeunes sirènes sans cervelle sont venues près de moi.
(Ch) - Alors, le bébé, on s'émerveille pour un poisson ?
(We) - Chloé, tu n'as que quelques centaines de lunes de plus. Si elle est un bébé, toi tu es une petite sirène, haha ! Voyant Gloria et Tania s'éloigner, je me propulse dans les bras de Weiss.
(Ir) - Pourquoi m'embêtent-elles tout le temps ?
(We) - Parce que tu es… jolie, elles sont jalouses.
(We) - Tu devrais mieux contrôler tes pensées, on n'a pas besoin de les voir !
(Id) - Tu n'as qu'à être plus aimable avec elle, elle ne serait pas si nostalgique.
Argh, saloperie de télépathie, c'est bien pour ça que je préfère rester seule, au moins je n'ai pas besoin de la contrôler.
(Id) - Petit déjeuner à tribord, concentrez-vous ! Irina, ton chant, nous, on attrape.
(Ir) - Sur lequel ? Il y en a tellement !
(Tr) - Celui que tu veux, évite juste les femelles, je pense qu'elles partent pour frayer. Et reste hors du banc.
(Ir) - OK.
Oh, c’est tellement rare maintenant de voir de si grands bancs de poissons. Je dois m'approcher plus. Lequel choisir ? Un adulte, il doit être assez gros pour ramener les restes à la colonie, mais ils sont si beaux... Oh, en voilà un vieux, il est à bout de force, il n'ira pas jusqu'à la fin du voyage, mais il est entouré. Tant pis, je rentre dans le banc.
Aïe, ouch.
AaaaaaaAAAAaaaaaaa !
Aïe !
(We) - IRINA, putain, qu'est-ce que tu fous, bordel ? Après, on me demande pourquoi je suis si dure avec elle, mais putain, elle n'en loupe pas une !
J'ai mal, les thons me bousculent, me frappent dans tous les sens, mais ce n'est pas grave, j'ai réussi, je l'ai assommé et j'ai même réussi à m’agripper à lui. Plus qu'à attendre que la tempête passe.
(Ir) - AÏE !
Je ne m'y attendais pas, je ne l'ai pas vu ! On n'est pas les seuls à chasser cette douleur. Pourquoi y a-t-il autant de sang ? C'est insupportable.
(We) - NON, IRINA !
C'est étrange, j'ai cru entendre Weiss crier, et le voir plonger dans le banc. C'est flou, je dois rêver. Pourquoi Weiss ferait ça ?
Hum, ce parfum si particulier, cette chaleur qui me réchauffe le corps, la lumière m’empêchant d’ouvrir mes paupières, le dos contre un sol chaud et dur, des vagues me frôlent la queue. Je ne suis plus dans l'eau, c’est une certitude. Je me suis échouée ? Argh, j'ai mal. Qu'est-ce qu'il s'est passé déjà ? Ah oui, on était en train de chasser pour le petit déjeuner et quelque chose m'a heurtée en plein dans la nageoire. Ouch, je sens encore ma queue ! C'est douloureux, mais je peux la bouger.
(Tr) - Ça y est, t’émerges ? Il était temps !
En m'asseyant, j'ouvre doucement les paupières. La lumière me fait cligner des yeux. Je ne suis pas seule, les gars sont là.
(Ir) - Le thon, vous l'avez eu ?
(We) - Mais t'es conne, toi ! T'as failli mourir et le seul truc qui te vient à l'esprit, c'est de bouffer !?
(Ir) - Heu, mais non, c'est pas ça. Ça fait longtemps qu'on n'a pas pu manger correctement, vous devez être affamés.
(Id) - Oui, t'inquiète pas, on a eu le thon et même un espadon en prime.
(Ir) - Hein, quoi ?
(Tr) - Haha, Weiss est devenu fou quand il a vu l'espadon t'embrocher. On n'a pas eu le temps de réagir qu’il avait déjà plongé dans le banc. Je n’aurais pas voulu être à la place de ce pauvre poisson.
(Id) - Ouuuuuiiii ! Il t'a sorti du banc, te serrant dans ses bras, comme un amant, il t'a portée avec ses écailles et t'a remontée à la surface. Et tu sais qu’il n'a pas voulu que l'on se relaie pour te remonter !
(We) - Idriss, enlève ce sourire niais de ton visage et ce ton mielleux. Pas la peine de vous faire des films, si vous aviez dû la remonter, on y serait encore !
Pourquoi je me sens gênée ? Mon cœur, pourquoi est-ce qu'il s’emballe ? J'ai chaud.
(gifle) - CLAP, allez, reprends-toi ! Ce n'est pas le moment de divaguer.
(Ir) - Merci, Weiss, merci.
Mais c'est quoi cette voix ? Pourquoi lui ai-je parlé avec une voix si mielleuse ?
(We) - Hum, la prochaine fois, je te laisse clamser.
(Tr) - Tiens, Irina, tu as bien mérité de manger un morceau.
(Ir) - Merci, désolée, je ne voulais pas vous causer de soucis. Je ne voulais juste pas en sacrifier un au hasard.
(Tr) - Oui, je sais, je commence à te connaître et je respecte ta façon de penser, mais réfléchis avant d'agir. Ta queue est bientôt cicatrisée, on va pouvoir replonger. Rester sur les côtes est dangereux.
(Ir) - On peut rester encore un peu ?
(Tr) - Je préférerais pas, c'est trop dan...
(We) - C'est bon, j'ai fait le tour de l'îlot, il n'y a l'air d'avoir personne.
(Id) - Oh, tu soutiens la demoiselle en détresse !
(We) - Ta gueule, je veux juste qu'elle soit capable de nager toute seule. Ce n'est pas toi qui vas la porter après.
(Id) - Mouais, si tu le dis.
C'est beau ici. Je suppose que cet îlot n'est pas très vieux. Mais assez pour que la végétation commence à s'y installer. Je ne sais pas si cette nature restera longtemps épargnée par ces fichus humains. Quel gâchis ! Ce merveilleux paysage volcanique que nous offre mère Nature disparaîtra avant que j'atteigne un âge avancé.
Cette plage de roches noires, mates et brillantes où se meurent les vagues de cet océan bleu turquoise, la surface scintillant comme une nuit d'étoiles, est à couper le souffle. Ça fait tellement longtemps que je n'ai pas vu le ciel, j'avais oublié cette plénitude ! En basculant un peu plus ma tête, j'aperçois le haut d’un palmier en fleurs, puis la crête de l’île trônant majestueusement au milieu du paysage.
(We) - On peut y aller, ta plaie s’est refermée.
(Ir) - Tes yeux...
(We) - Quoi ?
(Ir) - Ils sont comme cet océan, ils ont la même couleur, les mêmes reflets brillants. C'est magnifique.
(We) - Tu me fais quoi là ? Le soleil te cogne sur la tête, toi.
(Tr) – Ah enfin, on retourne près du groupe. Mémorisez le chemin. Tant que cet îlot est désert, on pourra en profiter. Idriss, est-ce qu'à partir d'ici, tu sens la présence du groupe ?
(Id) - Oui, on n'est pas si loin, je dirais 50 km au nord.
(Tr) - Tant mieux, tu nous guides.
Partir me déchire le cœur. J'espère pouvoir revenir ici rapidement. Nager à reculons n'est pas simple, mais je veux graver cette image dans ma tête.
(Id) - La colonie est en dessous, on peut entamer la descente.
J'ai vraiment pas envie de retourner dans l'obscurité. J'espère qu'un jour je pourrai aller vivre à la surface, profiter de ce monde et de cette merveille que nous offre la nature.
(We) - Bateau ! On plonge !
Argh, ce qu'il m'agace, cet humain !
(Tr) - Irina, où vas-tu ?
(Ir) - Vu la taille, c'est encore ces saloperies de pêcheurs. Je veux juste libérer ce qu'ils ont pris.
(We) - Mais t'es pas bien, c'est suicidaire, ma parole. Tu tiens tant que ça à mourir ?
(Ir) - Mais vous êtes là ! Du coup, c'est moins risqué. Pense à ce qu'ils vont faire et...
(Tr) - Tu ne lâcheras pas l'affaire ?
(Ir) - Non, je ne peux pas, désolée.
(Tr) - Très bien, on plonge un peu plus pour ne pas être visibles, surtout toi avec ta queue, tu nageras dans l'ombre de Weiss avec sa queue noire, ça devrait le faire.
Tout en plongeant, nous nous approchons du bateau. J'aperçois un filet. Je m'en doutais, ces fichus humains.
(Tr) - Le bateau avance, il va falloir faire attention. Irina, tu vas sous le filet, on risque moins de te voir, pas comme ça. Weiss, tu penses que tu peux couper le filet ?
(We) - Quelle question !
C'est vrai qu'il possède une force incroyable. Le filet a l'air usé, ça sera plus facile. Tous ces poissons, pourquoi en prendre autant alors qu’il en reste si peu ? Et pour en rejeter la moitié, les laissant blessés et à moitié morts, ils ne respectent rien.
Effectivement, grâce à ses muscles saillants, il ne lui fallut pas longtemps pour en venir à bout. Il m'impressionne.
(Ir) - Oh non, elle est coincée.
(Ir) - Weiss, tu peux venir ici ? Il y a une tortue coincée dans les mailles, elle ne peut pas se libérer.
Avec délicatesse, il ne lui aura fallu que quatre coups de dents pour extraire la tortue. Je l'attrape, c'est une jeune, vu sa taille. Sa nageoire est blessée par le filet qui lui a entaillé une nageoire.
Aah, s'arracher une écaille est toujours aussi peu agréable, mais ça lui permettra de guérir plus vite.
(Ir) - Au revoir, petite tortue, prends soin de toi et évite ces saloperies de bateaux.
Mieux vaut s'éloigner rapidement. Quand les humains vont voir l'état de leur filet, ils risquent de ne pas apprécier.
(Tr) - On ne s'arrête pas au premier palier, on prendra une plus longue pause au deuxième. Les humains ne pourront pas nous y suivre.
(Ir) - Merci d'avoir accepté de les libérer, cette sortie était fantastique.
(Id) - Ça fait du bien de voir tes magnifiques yeux pétiller.
(We) - Oh ben c'est sûr, c'était fantastique. T'as failli mourir, on s'est exposés pour sauver des poissons. C'est clair que c'est la sortie idéale. Tu m'exasperes quand tu t'y mets.
(Ir) - Pff, tu vois que le mauvais. Ça t'a pas fait du bien de te réchauffer au soleil, de découvrir cet îlot ? Puis "failli mourir" est un grand mot quand même.
Weiss s'est arrêté net de nager, s'est retourné et a foncé sur moi, me plaquant contre une paroi rocheuse. Argh, ça fait mal !
(We) - Un bien grand mot ? Cet espadon t'a transpercée. C'est débattu, tu avais un énorme trou. Je ne t'ai pas soignée avec une ou deux écailles, j'en ai utilisé une vingtaine !
Je voyais la colère lui monter au visage. Son regard si beau habituellement est devenu si noir, il me fait peur.
(We) - Tu as perdu tellement de sang que ça a ameuté des requins. Heureusement qu'il y avait encore des thons pour leur repas.
(Ir) - C'est bon, j'ai compris que tu me détestes. Pourquoi ne m'as-tu pas laissée ? Au moins, tu serais tranquille.
(We) - Est-ce qu'au moins tu penses à ce que ressentent les autres quand tu parles ? T'es vraiment conne, ma parole. Entre te détester et te voir mourir, il y a une différence...
(Id) - WEISS, calme-toi, je crois qu'elle a compris.
(We) - Pour information, je ne te déteste pas.
(Tr) - Weiss, attends-nous ! Ne descends pas trop vite. Quel tête de mule, celui-là !
Quoi ? Qu'a-t-il voulu dire ? Il ne me déteste pas ? Alors pourquoi il est comme ça ?
Nous avons peiné à le rattraper. Enfin, rattraper est un grand mot. Il nous attendait plutôt, assis sur un rebord rocheux, le regard perdu. Ses cheveux noirs courts flottaient dans l'eau. Je m'approche doucement, je veux m'excuser. Je l'ai mis en colère et je ne sais pas pourquoi, ça me déplaît. Je m'assois à côté de lui, il est si proche. Me concentrant sur une image que je veux lui envoyer, oui, je sais, ses yeux brillants et cette plage.
Surpris, il sursaute, me faisant face, son visage à quelques centimètres du mien, des magnifiques petites perles coulant sur ses joues.
(Ir) - Tu pleures ?
(We) - Qu'est-ce que ça peut te foutre ? Qu'est-ce que tu me veux encore ?
Son agressivité me fait tourner la tête, je ne peux soutenir son regard dénué d'expression.
(Ir) - Je voulais m'excuser. Je... je... heu... Je t'ai fait du mal et j'aime pas ça. Je ne sais pas ce que je t'ai vraiment fait, dis-le-moi, j'aimerais heu... qu'on redevienne comme avant.
(We) - Lâche-moi, OK ? Idriss ? Tristan, vous êtes où ? Je ne vous vois pas ?...
(We) - Putain, où est-ce qu'ils sont ?
(We) - Idriss, où êtes-vous ?
(Id) - On a continué à descendre. Prends ton temps, descends pas trop vite, Irina ne pourra pas te suivre sinon.
(We) - Pourquoi vous avez fait ça ?
(We) - Putain de connard !
Je n'ai pas entendu le reste de la conversation. Idriss a dû répondre à Weiss, mais vu sa réaction, je ne préfère pas lui demander ce qu'il lui a dit.
(We) - On y va... Tu viens, t'attends quoi ?
Je sens que je vais le regretter, mais je dois savoir.
(Ir) - Je ne bougerai pas tant que tu ne me diras pas ce que je t'ai fait !
(We) - Humpf, très bien, reste là !
Il est sérieux là ? Il va vraiment me laisser là ? Et c'était quoi ce ton moqueur ? Je fais quoi, je descends, j'attends ? Après tout, j'étais prête à remonter seule, alors bon. Puis si je le suis, en plus de ne pas savoir ce que j'ai fait, le voyage sera des plus désagréables. J'ai sommeil, alors quitte à attendre, autant faire une sieste, mais ce coup-là, je dois cacher ma queue. Je pense que c'est bon, les algues du rocher ne devraient pas trop bouger, juste 15 min.
(We) - Ça y est, t'es réveillée ?
(Ir) - Weiss, mais qu'est-ce que tu fais là ?
(We) - Oh, tu crois vraiment que je peux retourner auprès du groupe en te laissant derrière ? Si je l'avais fait, Tristan aurait sans doute trouvé une sanction peu agréable. Allez, bouge, on y va.
(Ir) - Hum, j'ai toujours pas changé d'avis, je te suivrai que quand tu m'auras dit ce que je t'ai fait !
Sa nageoire dorsale s'est hérissée d'un coup sec, sa bouche s’entrouvrant, laissant découvrir ses canines. Son feulement me fait tressaillir. À ma grande surprise, il ne me fait pas peur, il m'intrigue. Qu'est-ce que j'ai fait pour qu'il refuse de me le dire ?
D'un coup de nageoire, je m'approche de lui, beaucoup plus que ce que je voulais. Mes cheveux se mêlant aux siens, je n'ai jamais été aussi proche de son visage. À mon grand étonnement, ce n'est pas de la colère que je vois dans ses yeux, non, c'est de la peur.
(Ir) - Mais qu'est-ce que je t'ai fait, bordel ?
Chuchotais-je, le regard perdu dans le sien, le défiant s'il ne répondait pas.
Je ne sais pas combien de temps on est restés comme ça, figés l'un devant l'autre, aucun de nous deux voulant lâcher prise. D'un coup de nageoire, il s'éloigna d’une bonne longueur, me regardant.
(We) - T'es devenue une putain de reproductrice, voilà ce que tu as fait. Maintenant, la ferme et nage.
Quoi ? Mais ça n'a pas de sens, il m'en veut pour un état dont je ne suis pas responsable.
(Ir) - Idiot ! Parce que tu crois que j'ai choisi de l'être ? En fait, ce n'est pas moi la responsable de notre entente, c'est TOI. Tu m'as tourné le dos quand j'avais le plus besoin de toi !
Tout en pleurant, je le dépasse, descendant vers la colonie.
Le reste de la descente s'est fait en silence. Ah, voici la colonie ! Une image de moi m'est apparue mentalement. C'était aujourd'hui, j'étais sur la plage, ma queue argentée reflétant le soleil, la tête basculée en arrière, laissant tomber mes cheveux gris sur les galets noirs, mon regard bleu-vert brillant plongé dans le sien, un sourire aux lèvres.
(We) - Désolé.
Je n'ai pas eu le temps de répondre qu'il avait déjà disparu dans l'obscurité. Il est vrai qu'à cette profondeur, on n'y voit rien. Pourquoi m’a-t-il envoyé cette image ? De quoi s'est-il excusé ?