Sophia
C’est en colère que je quitte l’énorme villa pour me perdre à une centaine de mètres de celle-ci, Lana à mes côtés semble désolée de la situation, mais comme je m’en moque, ce connard m’a mis les nerfs à vifs, puis ce Parker qui est incapable de lui tenir tête. Mais je ne peux plus faire machine arrière, si je le fais, je vais finir enterrée dans la forêt. Quand nous arrivons, je découvre une maison de taille moyenne, Lana passe devant moi, ouvre la porte et je découvre un capharnaüm sans nom. Une grande pièce à vivre à peine éclairé, qui se compose d’une cuisine ouverte et d’un salon au fauteuil en cuir beige usée et délavé. Des chaussettes et des vêtements sales trainent sur des chaises laissées à l’abandon, je me tourne vers Lana avec dégoût, elle s’excuse puis m’emmène vers un large couloir où se trouvent plusieurs portes et un escalier, que nous empruntons. Une fois à l’étage, Lana ouvre la première porte à notre droite, une chambre vide, composé d’un lit et d’une armoire, l’odeur du cannabis imprègne les murs jaunis. Je pose mon sac sur la moquette poussiéreuse et me répète en boucle que je fais tout ça pour mon parrain, je ne dois pas le laisser tomber, il a besoin de cet argent.
— Je suis désolée pour Leighton, d’habitude, il est moins agressif.
— Oh, je suis contente de savoir qu’il est méchant qu’avec moi. Je vais servir à quoi ici ?
— Laisse-lui un peu de temps, il va finir par d’accepter. Tu vas être entrainée pour combattre puis quand on aura besoin, tu seras appelée pour faire des échanges d’armes ou protéger des zones.
— Super, je devais simplement espionner des mecs débiles et maintenant, je me retrouve à devoir en tuer.
— Je sais que Parker t'a vendu un tout autre travail, mais ça ne change rien, tu seras payée pareil.
Je hausse les sourcils, bien sûr que ça change tout, j’avance dans la pièce et m’arrête devant la fenêtre le regard fixe, avant, je devais simplement draguer des pervers et leur soutirait des informations et là, je vais devoir me battre, vendre des armes, je suis une artiste moi, une peintre… Mais je dois penser à lui, à mon parrain.
— Je vais essayer de parler à Leighton, peut-être que si c’est moi, il…
— Fait ce que tu veux, mais je crois que ton ami ne va pas changer d’avis, puis je crois qu’il est occupé.
Lana vient à mes côtés et regarde à travers la fenêtre, elle masque sa bouche de sa main,
— Il est con, mais elle a l’air de prendre son pied.
— Je vais vomir !
Lana se retourne alors que je me marre, une chose est sûre, je vais très souvent fermer mes rideaux !
— C'est sa petite amie ?
Lana rit comme si je venais de dire une connerie, je penche la tête sur le côté pour qu’elle m’en dise plus,
— Son plan Q régulier, tu veux dire !
— Je vois le genre.
— Ne le catégorise pas, Leighton n’a pas eu une vie facile.
— Donc il est obligé de se comporter comme un connard ?
— Tu n’es pas du genre à te laisser faire ? je crois que c’est la première fois que je voyais une femme le remettre à sa place.
Je hausse les épaules, je n’ai rien à lui dire, mon père m’a appris à me défendre c’est tout.
— Bon vient, je vais te présenter au reste de la maison.
Je jette un dernier coup d’œil à la fenêtre, et hausse les sourcils. Puis je finis par suivre Lana qui frappe à plusieurs portes, sûrement pour les faire descendre. Quand nous arrivons dans le salon, quelques hommes sont déjà là, ils me dévisagent, et je comprends que je suis la seule femme de cette maison.
— Les gars, je vous présente notre nouvelle recrue, Sophia Nicholas.
Les hommes se regardent un sourire pervers sur leurs visages, je passe ma langue devant mes dents, bien décidée à leur faire perdre leurs idées sexuelles,
— Et elle vient faire quoi ici, nous distraire ?
Je m’approche de l’homme qui a parlé, le crâne rasé, une carrure de bucheron, il sourit comme un abruti,
— Je vais être très clair, s'il en a un qui essaye de me toucher ou de m’approcher, je l’étouffe avec ses propres couilles.
— C’est qu’elle mord !
— Ok les mecs, on se calme ! Sophia va être une femme de terrain et je serais vous, je cesserai vos sous-entendues.
Les hommes cessent de sourire, je recule pour me replacer au côté de Lana,
— Je compte sur vous pour accepter Sophia.
— C’est bon, Lana.
Lana me regarde, un demi sourire sur les lèvres,
— Je vais y aller, si tu as un problème, n’hésite pas.
— Ça devrait aller.
Lana part de la maison et je me retrouve seule, je jette un dernier regard vers les hommes qui se sont déjà dispersés dans toutes les pièces, je finis par remonter dans ma chambre la cœur lourd. Lorsque j’arrive dans la chambre, je m’écroule sur le lit, je prends mon téléphone et compose le numéro de mon parrain, je plaque le cellulaire sur mon oreille et attends une réponse, qui ne se fera pas,
— Salut c’est Andy, laisse un message !
— Coucou Parrain, je voulais te parler, j’ai déjà un coup de blues. Appelle-moi quand tu as le temps.
Je pose le téléphone sur mon oreiller. Je regarde le plafond, j’ai un peu honte de mentir à mon parrain, je lui ai fait croire que j’avais trouvé un travail dans un camp pour adolescent en difficulté, que je les aiderai à retrouver la paix en peignant, je ne sais pas si mon parrain m’a cru, je l’espère.
Mes yeux se ferment, la fatigue me gagne, il commence à se faire tard, la journée a été éprouvante.
Il fait sombre, il fait froid, je suis de retour en enfer. Je suis seule, mes membres me font mal, ma tête est lourde. Mais j’essaye tout de même de me relever, une fois sur mes jambes, une douleur affreuse s’abat dans mon dos, je passe ma main sur la trace qu’ils ont laissée. Une inscription.
Je regarde autour de moi, je ne sais pas où je suis. Les lumières s’éteignent, mon cœur s’accélère, mon souffle est court, quand les lumières se rallument, l’horreur s’abat sur moi. Son corps gît dans le sang, je plaque ma main sur ma bouche. Je reste fixé sur son visage sans vie. Ses yeux bougent, mon corps recule jusqu’à se heurter contre le mur dernièrement, il n’était pas mort…
Je me réveille en hurlant, mon cœur bat à une vitesse folle, mon front est couvert de sueur, je me redresse essayant de me calmer. Je décide de me lever et d’aller prendre l’air, je récupère avant ça un paquet de clope dans la pochette de mon sac de sport.
Chaque nuit, c'est la même chose, je m’endors puis, je me réveille l’âme déchirée. Tous mes cauchemars ne sont que des interprétations de ce que j’ai vécu, à chaque fois, j'espère qu’il soit encore vivant.
Une fois sous le porche, j’allume ma cigarette, je prends une longue taffe, je sens mes nerfs se calmer, si mon père était là, il m’aurait sûrement pris la clope des mains et il l’aurait jeté, me répétant que fumer n’était pas fait pour moi. J’aurais certainement râlé, mais au fond, je savais qu’il avait raison. Mais depuis qu’il est mort, c'est la seule chose qui m’apaise, qui calme mes maux.
— Tu ne dors pas ?
Je me tourne vers l’homme derrière moi, grand et frêle, des cheveux longs lui arrivant aux épaules, une barbe de plusieurs jours lui donnant un air négligé,
— Je me méfie !
— Ils font genre, mais ils ne t’attaqueront pas. Eddy.
— Sophia.
— J’ai retenu ton prénom, ce n’est pas anodin une femme qui menace de nous couper les burnes.
Je ris légèrement,
— Ce n'étaient pas des menaces en l’air.
— Je n’en doute pas. Tu es surprenante.
Je hausse les sourcils, je n’ai rien de surprenant. Je suis souvent catégorisée à cause de mes tatouages, une femme dure et gothique, alors que mes tatouages cachent l’horreur de ma vie, ne sont que la couverture d’un livre obscur. Les gens pensent toujours savoir qui on est juste en regardant notre physique, mais si seulement c’était aussi facile ! Ce qui est surprenant, c'est que j’ai encore un cœur après ce que la vie m’a fait vivre.
— Pourquoi tu es dans ce secteur ?
— Je préfère garder ça pour moi.
Je termine rapidement ma clope, l’écrase dans le cendrier posé sur la rambarde,
— Bonne nuit Eddy.
Je pars le laissant seule, sur ce porche. Finalement, ils ne sont pas tous chelous dans ce gang, mais je dois garder la tête froide et ne pas me laisser avoir par quelques politesses, je suis y sait pour mon parrain et pour l’argent, plus je me ferai petite mieux ce sera, puis la sollicitude, je connais en Italie, j'étais solidaire enfermer dans mon passé et je crois que c’est toujours le cas aujourd’hui…