Je ne pensais pas que la Mort puisse être aussi attirante. Non pas que j’ai pu y songer auparavant. Mais maintenant que je suis en mesure de l’observer, je ne peux la quitter des yeux. 

Elle semble m’attirer à elle comme un aimant, si bien que je ne peux détourner mon regard de sa silhouette magnétique. 

Je force mon corps à rester de marbre, à n’esquisser aucun mouvement susceptible de trahir ma présence. Il est primordial que je reste en retrait. Jusqu'au bon moment. 

Tandis que j’observe la Mort et sa mystérieuse amie, une humaine à priori, une explosion me sort de ma reverie et me perce les tympans. 

Par réflexe, je me jette au sol, mon crâne émet un son rauque en heurtant le bitume de l’avenue Saks. Je serre les dents, me maudissant d’avoir recouvert ma tête pour me protéger de l’explosion sans avoir pensé à me protéger du sol. 

Mon coeur s'affole, ma jour me brûle. 

J’attends quelques secondes qui me semblent s’éterniser avant d’oser regarder les alentours : de la cendre tombe comme de la neige autour de moi et dans la rue agitée par des cris de passants s’enfuyants à toute jambe dans des directions opposées. 

C’est pas bon. J’ignore ce qui vient de de passer mais je dois filer d’ici au plus vite. Personne ne doit savoir qui je suis. 

Et surtout, personne n’est censé m’avoir vu espionner ces deux personnes. Je ne peux pas me permettre que ça arrive. 

D’une main, j’aggripe mon sac, me relève et m'apprête à tourner les talons quand une force me retient par l'épaule et m'immobilise. 

- Qui es-tu et que fais-tu ici ? 

Cette voix caverneuse et pleine de ressenties me donne des frissons et me donne l’envie de fuir à toute jambe. 

Je dévisage l’inconnu qui vient de parler et découvre le visage anguleux de la Mort. 

Je m'étais toujours figuré que la Mort devait avoir un crâne à la place du visage, une faucheuse et des milliers de colliers pendus à son cou. Sauf que je découvre le visage d'un homme -de ce que je peux voir, plus âgé que moi- aux cheveux et yeux aussi noirs que le plus sombre des abysses. Je me sens défaillir. Mon coeur est au bord d'un précipice et je suis incapable de parler ou de penser correctement. Je me perds dans la contemplation de cet être divin, dont l'apparence est certe, celle d'un homme mais son aura ne laisse aucune place au doute : il est bien la figure de la Mort. 

Il ouvre la bouche. Mes pensées ne font alors qu'un tour : va-t-il m’accuser d'être à l’origine de cette explosion ? 

Cependant, sa question me déstabilise davantage que s'il m’avait accuser d'une telle horreur : 

- Tu peux me voir ?