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PetitePlume
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Chapitre 5 : Routine et révélations

Les jours passaient et Elijah commençait à trouver ses marques dans la cuisine de La Table Enchantée. Chaque matin, elle enfilait son uniforme avec un peu moins de tremblements. Elle apprenait à reconnaître le rythme des commandes, les habitudes de ses collègues, le son familier de la friteuse, le tintement du minuteur. Il y avait quelque chose de rassurant dans cette répétition, dans ce chaos ordonné.

Mais ce n'était pas la routine qui faisait battre son cœur plus vite. C'était Charlotte.

Elle ne parlait pas beaucoup, mais sa présence était constante, rassurante. Elle était toujours là, jamais loin.

Et puis il y avait ces moments qui paraissaient anodins.

Un frôlement quand elles se croisaient dans le couloir étroit entre la cuisine et la réserve. Les contacts étaient discrets mais fréquents, de plus en plus. Parfois, les mains de Charlotte effleuraient les siennes sans vraie raison. Un plat qu’Elijah passait trop près, une main qui se glissait derrière elle pour ajuster une garniture. À chaque fois, le frisson de la proximité la traversait. C'était furtif, presque invisible pour les autres, mais Elijah le ressentait, chaque fois un peu plus fort.

Et puis, il y avait ces moments où leurs regards se croisaient. Charlotte ne se cachait pas. Elle semblait calme, mais Elijah captait cette intensité dans son regard, comme si elle attendait de savoir si elle aussi ressentait cette étrange tension dans l’air.

Elijah n’osait pas mettre de mots sur ce qu’elle ressentait. Mais parfois, son souffle se bloquait quand Charlotte était trop proche. Elle s’efforçait de rester concentrée, mais son corps, lui, trahissait cette tension nouvelle.

Ce jeudi-là, l’ambiance était un peu différente.

Le petit groupe de l’équipe l’avait peu à peu accueillie. Elijah s’attendait à devoir faire sa place de force, mais au contraire, elle découvrait des collègues à l’humour facile, à la gentillesse simple.

Nolan, qu’ils appelaient tous Nono, était un boute-en-train au rire communicatif. Toujours à taquiner gentiment, toujours un mot pour détendre l’atmosphère.

Yanis, plus discret, souvent en cuisine ou à la plonge, avait une douceur dans le regard qui rassurait Elijah. Il était toujours le premier à proposer de l’aide quand quelqu’un galérait, sans jamais en faire trop.

Et Sabrina, avec son regard perçant et sa répartie vive, veillait au grain comme une grande sœur. Elle observait tout, comprenait vite, et derrière ses petites piques, il y avait un vrai cœur. C’était elle qui, un soir, avait glissé à Elijah :

« Ici, on se protège entre nous. Si quelqu’un te cherche, t’hésite pas à venir me voir. »

Dans cet environnement où elle se croyait invisible, Elijah sentait peu à peu une place se créer. Une famille étrange et bruyante, mais une famille quand même.

Soraya, la manageuse, faisait aussi son apparition. Toujours impeccable, tirée à quatre épingles, elle surveillait tout d’un regard expert. Elle appliquait les protocoles à la lettre, mais Elijah sentait qu’elle savait aussi très bien quand faire semblant de ne pas voir. Soraya l’observait souvent, la jaugeait, comme si elle cherchait à savoir jusqu’où elle pouvait aller. Mais pour l’instant, elle ne disait rien. Elle attendait, peut-être.

Une fois le service terminé, les sourires étaient plus rares. La fatigue laissait place à une sorte de complicité tacite. C’était dehors, sous la lumière tamisée de la rue, que la tension se libérait, dans une conversation à mi-voix.

Elijah s’était arrêtée un instant, hésitante. Charlotte marchait à ses côtés, ses pas calmes résonnant dans la rue déserte. Elle la regardait, ses yeux plus doux que d’habitude. C’était un silence lourd de non-dits qui pesait entre elles.

« Je… je me demande pourquoi… je me sens autant proche de toi », murmura Elijah, sa voix un peu tremblante. Elle n’arrivait pas à expliquer ce qu’elle ressentait, juste qu’il y avait quelque chose de puissant, d’inexplicable dans la présence de Charlotte.

Charlotte, prise au dépourvu, sembla réfléchir un instant avant de répondre. Ses yeux se plongèrent dans ceux d’Elijah, cherchant une réponse qu’elle ne savait pas encore formuler. Ses lèvres s’entrouvrirent, mais aucun mot ne sortit dans l’immédiat. Elle hésita, déconcertée par ses propres émotions.

« Je ne sais pas… », commença-t-elle, « peut-être que c’est cette façon dont tu te donnais dans tout ce que tu faisais. Ça me touchait. Vraiment. »

Le vent fit voleter quelques mèches de cheveux autour de son visage, et Charlotte baissa les yeux, comme si elle avait peur d’être trop vulnérable. « On n’a pas souvent de ces moments dans ce travail… Alors peut-être que ça te paraissait plus fort que ça ne l’était… »

Il y eut un instant de silence, où le monde autour d’elles sembla s’étirer, suspendu dans une sorte de fragilité. Puis Charlotte releva les yeux, et pour la première fois, Elijah perçut une faille dans son regard.
« Tu n’es pas seule ici, tu sais », ajouta-t-elle doucement.

Elijah hocha la tête, touchée, mais aussi un peu déstabilisée par cette sincérité qu’elle n’aurait pas cru trouver ici. Il y avait quelque chose de presque timide dans la manière dont Charlotte parlait, comme si elle se dévoilait un peu plus chaque jour.

C’était le silence qui retomba alors, lourd de non-dits et de découvertes fragiles. Mais c’était un silence qui, cette fois, ne semblait pas peser.

« Tu viens demain, hein ? » demanda Charlotte, rompant enfin ce moment suspendu. Mais dans sa voix, il n’y avait plus ce ton autoritaire. Il y avait juste un intérêt discret, une sorte d’invitation tacite à continuer ce qu’elles avaient commencé.

Elijah, un peu perdue mais profondément touchée par la simplicité de ses paroles, répondit sans hésitation :
« Oui. Je serai là. »

Et elles restèrent là, à quelques pas l’une de l’autre, un léger sourire sur les lèvres, comme deux personnes qui s’étaient trouvées sans vraiment savoir comment ni pourquoi.

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