đ A M A L I A đ
â Ne me dĂ©shonorez pas devant cette famille.
Nous sommes invités à un mariage d'une famille trÚs respectée dans notre milieu. Mon pÚre et mon frÚre les connaissent, mais c'est une premiÚre pour moi. Je ne les ai jamais rencontrés. Ce ne sont pas des Italiens, mais des libanais.
Leur origine m'est Ă©trangĂšre, tout comme ces personnes elles-mĂȘmes. C'est la premiĂšre fois que mon pĂšre m'autorise Ă assister Ă une cĂ©rĂ©monie en dehors de notre cercle.
Habituellement, mon pĂšre s'y rend seul, il arrive mĂȘme que mon frĂšre ne soit pas invitĂ©, par crainte qu'il ne fasse une gaffe. Mon grand frĂšre, souvent maladroit, a le don de parler Ă tort et Ă travers. C'est pourquoi mon pĂšre insiste pour que nous soyons irrĂ©prochables devant eux.
â Aucun faux pas, je ne veux entendre ni critique ni commentaire. Je parle surtout pour toi, Massimo, c'est clairâŻ? Ils n'hĂ©siteront pas Ă te faire payer tes erreurs mĂȘme si tu es mon fils, et crois-moi, je ne risquerai pas mon alliance pour tes bĂȘtises.
â Ouais, je sais, rĂ©pond mon frĂšre, Ă moitiĂ© sĂ©rieux face Ă cet avertissement.
â C'est "SĂŹ, Capo."
Mon pĂšre est le Capofamiglia (chef de notre famille), tandis que son frĂšre aĂźnĂ©, mon oncle, est le Capo dei Capi (chef des chefs). Mon pĂšre, mĂȘme s'il gĂšre uniquement les affaires de notre famille, il respecte toujours l'autoritĂ© de son frĂšre, qui supervise les grandes dĂ©cisions. Leur relation est fondĂ©e sur la loyautĂ© et le respect mutuel, ce qui renforce notre position dans le milieu.
Mon oncle souhaite que mon pĂšre le remplace s'il venait Ă mourir, mais je me demande si cela arrivera un jour. Mon pĂšre a toujours convoitĂ© ce titre, mais il n'a pas eu la chance de naĂźtre le premier, ce qui l'a empĂȘchĂ© d'y prĂ©tendre jusque-lĂ .
â SĂŹ, Capo, rĂ©pĂšte-t-il, toujours avec un air un peu dĂ©sinvolte.
Il l'ignore et son attention vient vers moi.
â Je sais que je peux compter sur toi. Tu es plus discrĂšte et mieux Ă©levĂ©e que ce bon Ă rien.
Il ne mùche pas ses mots. Massimo a déjà mis notre famille en danger à plusieurs reprises et heureusement, pÚre a constamment réussi à réparer ses erreurs.
Il dĂ©pose un baiser sur le sommet de ma tĂȘte. MalgrĂ© son rĂŽle de Capo, il a toujours Ă©tĂ© trĂšs proche et affectueux avec moi. Cependant, devant ses hommes ou ses associĂ©s, il arbore l'attitude stricte et distante qu'on attend de lui.
Nous sommes arrivés, notre chauffeur m'ouvre la porte et me tend la main pour que je descende sans trébucher, comme cela m'est arrivé plus jeune. Ce jour-là , j'ai voulu sortir seule de la voiture et me suis étalée par terre, devant des personnes importantes. Mon pÚre m'a réprimandée sévÚrement ce soir-là , et depuis, j'attends toujours qu'on me tende la main pour sortir.
Je pose un pied au sol, puis l'autre, relùche la main du chauffeur et regarde autour de moi. C'est bondé comme d'habitude.
Le Bellagio, l'un des hÎtels-casinos les plus prestigieux et luxueux de Las Vegas, est sous le contrÎle absolu de ma famille. DerriÚre moi, le spectacle des fontaines dansantes, illuminées de mille feux, m'éblouit. J'ai toujours trouvé cet endroit magnifique. Ils ont vraiment choisi le lieu idéal.
â Amalia ? m'interpelle mon pĂšre m'attendant.
Je glisse mon bras sous le sien et nous avançons ensemble, tandis que Massimo nous devance de quelques pas. AprÚs quelques instants, nous passons par une entrée privée et pénétrons dans le hall. La façade, inspirée de l'architecture italienne classique, rappelle l'élégance d'un palais européen. Les lustres en verre, appelés Fiori di Como, suspendus au plafond, créent une ambiance à la fois luxueuse et glamour.
Nous traversons le somptueux hall pour atteindre la salle de bal. Bien que la cérémonie se déroule également dans le jardin, nous choisissons de nous rendre directement à notre table. Le serveur nous guide vers notre place réservée.
Mon pÚre est malade depuis quelques années et a besoin de rester assis. Le simple fait de venir ici est un véritable effort pour lui. Il sort rarement maintenant. Pour le travail, il reçoit chez nous et ne se déplace que lorsqu'il n'a vraiment pas le choix.
En entrant dans la salle, la décoration me frappe immédiatement. Les lustres en cristal fixé au plafond brillent comme des étoiles, tandis que des arrangements floraux somptueux, composés de roses blanches, de lys orientaux et d'orchidées, ornent chaque table. Des bougies scintillantes dans des photophores en verre taillé ajoutent une touche finale à cette atmosphÚre opulente.
Les invitĂ©s, Ă©lĂ©gamment vĂȘtus, animent la salle de leurs discussions et de leurs rires. Je remarque rapidement que la majoritĂ© d'entre eux sont des membres de la famille des mariĂ©s, car je ne reconnais aucun visage.
Installée, je contemple chaque invité lorsqu'une silhouette attire mon attention. Irina, ma seule amie ici, me fait un signe de la main, un peu trop agitée. Sa mÚre lui fait immédiatement baisser le bras.
Je lui rends son salut, mais le mien est plus discret, contrairement Ă son enthousiasme. Ă cĂŽtĂ© d'elle, son frĂšre, Miro qui est aussi un ami, mais que je considĂšre plutĂŽt comme un frĂšre, me fait un signe de tĂȘte pour me saluer. Je lui souris simplement.
Mon regard divague Ă nouveau, l'ambiance est Ă la fois festive et empreinte d'un certain mystĂšre, comme si tout le monde attendait avec impatience un moment magique.
Sur notre table magnifiquement dĂ©corĂ©e trĂŽne un objet ressemblant Ă un dispositif pour fumer. En jetant un coup d'Ćil aux autres tables, je remarque que chaque invitĂ© dispose du mĂȘme objet en son centre. De nombreux hommes et femmes s'en servent activement.
â PapĂ , qu'est-ce que c'est ?
Il pose son regard sur ce qui capte mon attention.
â C'est un narguilĂ©, rĂ©pond-il. Il fait partie de leur culture, un symbole de convivialitĂ© et de partage. Mais ne t'avise pas de l'utiliser.
Il me lance un regard ferme, sans équivoque, pour bien faire passer le message.
Je ne connaissais pas ça. Je suis habituée aux cigarettes classiques, au cigare que mon pÚre fume, ou encore aux cigarettes électroniques que Massimo utilise.
Soudain, les lumiÚres s'estompent. La musique calme laisse place à un autre style, toujours arabe, enfin je crois, mais beaucoup plus bruyant et énergique. Cela captive immédiatement l'attention de tout le monde, en particulier les invités libanais, dont les visages rayonnaient de joie.
Certains se lĂšvent prĂšs de leurs tables, frappant des mains et agitant leurs bras au rythme de la mĂ©lodie. La piĂšce se remplit de musique vibrante et rythmĂ©e, accompagnĂ©e de percussions de tambours. Un groupe de danseurs fait son entrĂ©e, vĂȘtus de costumes traditionnels, exĂ©cutant des pas parfaitement synchronisĂ©s avec la musique. Certains d'entre eux tiennent des cordes blanches qu'ils font tournoyer dans l'air.
Les mariĂ©s font leur apparition, main dans la main, sous un arc de fleurs Ă©clatant. La mariĂ©e porte une robe sirĂšne qui Ă©pouse parfaitement son corps, moulant son buste, sa taille et ses hanches avant de s'Ă©vaser gracieusement Ă partir des genoux, formant la silhouette caractĂ©ristique de la sirĂšne. MĂȘme de loin, on reconnaĂźt la haute couture de la matiĂšre.
Le mariĂ©, quant Ă lui, arbore un costume trois piĂšces noir, avec une touche orientale en or qui part de son col et remonte jusqu'Ă ses Ă©paules, probablement un dĂ©tail personnalisĂ©. Ils sont vraiment magnifiques et font rĂȘver.
Puis, ils se placÚrent au centre de la piste, entourés de tambourins qu'ils frappent au rythme de la mélodie, ce qui rend l'atmosphÚre encore plus énergique. Les mariés, main dans la main, s'avancent sur la piste en dansant, bougeant leurs bras et leurs mains au rythme de la musique.
Mes yeux captivés par ce spectacle incroyable, quelque chose que je n'ai jamais vu de ma vie.
AprÚs quelques pas de danse, le couple se dirige lentement vers l'estrade, des pétales de roses rouges furent lùchés dans les airs. Ils s'assoient leurs trÎnes richement décorés de tissus somptueux et d'ornements dorés. Mais les danseurs poursuivent leur performance.
Je me penche vers mon pĂšre.
â C'est quelle danse ?
Je parle fort pour qu'il m'entende. Il ne tourne pas la tĂȘte vers moi, lui aussi intĂ©ressĂ© par cette danse.
â C'est la deuxiĂšme fois que j'assiste à ça. On m'a expliquĂ© qu'il s'agit du dabkĂ©, une danse traditionnelle du Moyen-Orient, particuliĂšrement rĂ©pandue chez les Libanais, Palestiniens et Syriens.
Avant que je ne puisse lui répondre, le DJ m'interrompt en lançant une phrase en arabe.
Les danseurs sont alignés au centre de la piste, formant une ligne impeccable, mais tous leurs regards sont fixés sur une personne qui vient d'entrer, faisant retenir le souffle à toute la salle, moi y compris.
Un homme grand, vĂȘtu d'un costume trois piĂšces luxueux et Ă©lĂ©gant. Ses cheveux bruns, lĂ©gĂšrement bouclĂ©s, sont Ă la fois naturels et soignĂ©s. Il a un beau visage, mais son air inexpressive, laissant transparaĂźtre aucune Ă©motion. Je parie que c'est un mafieux et non un danseur lambda.
Qui est-il ?
La tĂȘte haute, il avance calmement mais fermement, avec une assurance et une prestance Ă©videntes. Ses yeux noirs se tournĂšrent vers les mariĂ©s et il leur fait simplement un geste de tĂȘte avant de se placer en premiĂšre ligne et de saisir la main du danseur Ă cĂŽtĂ© de lui. Dans sa main droite, il tient aussi une corde blanche.
Je me penche Ă nouveau vers mon pĂšre pour lui poser une question, mais il m'a vue venir et prend la parole en premier :
â C'est le frĂšre de la mariĂ©e.
J'ai eu raison, c'est un vĂ©ritable mafieux. La musique s'arrĂȘte pour laisser place Ă une autre mĂ©lodie. Il lĂšve la main, presque de maniĂšre cĂ©rĂ©monielle, et les premiĂšres notes de flĂ»te rĂ©sonnent dans la salle.
D'un geste précis, il frappe légÚrement le sol du talon, un premier pas qui déclenche une vague d'enthousiasme parmi les danseurs et les spectateurs. Avec une grùce maßtrisée, il lance la danse en frappant ses pieds avec force, créant un rythme à la fois puissant et fluide. Ses bras s'élÚvent en parfaite synchronisation avec la musique, guidant le reste du groupe. Les tambours résonnent avec une intensité presque hypnotique, et les danseurs, parfaitement alignés, bougent ensemble dans une harmonie impressionnante.
Les invitĂ©s Ă©clatent en applaudissements et en cris de joie. Impossible de dĂ©tourner les yeux. Chaque saut, chaque frappe du pied, me donne des frissons. Comment font-ils pour ĂȘtre si synchronisĂ©s ?
Le leader... il ne danse pas, il commande la scÚne et tout le monde le suit avec une énergie magnétique.
J'ai quasiment envie de frapper dans mes mains, c'est tellement contagieux.
â C'est incroyable, non ?
Je hoche la tĂȘte, rĂ©pondant Ă mon pĂšre sans quitter des yeux les danseurs, mais surtout lui. Il passe non loin de notre table et nos regards se croisent pendant quelques secondes, ce qui me fait rater un battement de cĆur.
Il a un regard perçant, ses yeux en amande, lĂ©gĂšrement tombants, semblent pĂ©nĂ©trer sans effort et captivent chaque fibre de mon ĂȘtre, dĂ©gageant une chaleur mystĂ©rieuse. Tout ceci en Ă peine quelques secondes, qui m'ont paru durer plus d'une minute.
Il continue de danser un peu avant de céder sa place à une femme trÚs souriante, visiblement excitée de prendre le relais. Elle danse aussi bien que lui, malgré sa robe élégante et ses talons hauts.
â Elle fait aussi partie de la famille ?
â Oui, c'est la petite sĆur. Elle adore danser, tout comme l'une de leurs cousines.
Mon pÚre doit vraiment bien connaßtre cette famille. Il ne m'en a jamais parlé directement, mais rien qu'en écoutant la façon dont il parle d'eux, on perçoit une grande familiarité. D'aprÚs ce que je comprends, savoir danser fait absolument partie de leur culture.
Je sens mon frĂšre se pencher vers moi.
â On dirait des sauterelles. Leur musique me casse la tĂȘte, se plaint-il.
Je roule des yeux, agacĂ©e. Il ne peut jamais s'empĂȘcher de critiquer.
â Moi, j'aime bien, je lui rĂ©ponds.
â T'aimes bien les sauterelles ? s'exclame-t-il.
â Massimo, va prendre l'air, lui ordonne notre pĂšre d'un ton glacial.
PÚre murmure quelque chose à notre garde pendant que mon frÚre se lÚve pour partir. C'est le garde personnel de mon pÚre, un homme impitoyable. Si mon pÚre a exigé qu'il suive Massimo, c'est pour lui donner une leçon, je le sais, ce n'est pas la premiÚre fois. Je vois mon frÚre grimacer en remarquant que Giorgio marche derriÚre lui. Courage à lui.
Je me recentre sur l'ambiance, si diffĂ©rente de tout ce Ă quoi je suis habituĂ©e. Je n'ai jamais vĂ©cu un mariage aussi animĂ©, aussi passionnĂ©. C'est tout l'opposĂ© des mariages italiens, oĂč tout est calme. D'habitude, je m'ennuie et ressens rapidement l'envie de partir plus tĂŽt, mais ici, je me surprends Ă vouloir rester jusqu'Ă la fin. J'ai mĂȘme tapĂ© dans mes mains Ă un moment donnĂ©, avant de m'arrĂȘter brusquement lorsque mon frĂšre m'a lancĂ© un regard froid.
Les danseurs ont quitté la salle quelques minutes plus tard, aprÚs que tous les invités ont eu l'occasion de danser sur la piste en leur compagnie. Une légÚre déception me gagne, j'aurais voulu que ça continue encore.
à la place, plusieurs danseuses orientales entrent sur la piste et commencent leur show. Je connais cette danse, je l'ai déjà vue à la télévision, contrairement au dabke. Certaines s'approchent des hommes, se dandinant sensuellement en recevant des billets en retour. Je vois leurs yeux brillants d'admiration devant tant de beauté et de grùce.
Les Hommes, pensé-je.
Mon pĂšre discute avec un parrain qui s'est assis Ă la place de mon frĂšre. Encore le commerce, il n'y a jamais un moment oĂč il se repose vraiment et profite de ce rĂ©pit.
Je prends mon téléphone en attendant et je remarque des messages d'Irina.
Irina : T'as vu comme le frÚre de la mariée est canon ?!
Moi : Je te l'accorde, il est charmant. Mais franchement, ce que j'ai trouvé magnifique, c'est la danse et l'ambiance de ce mariage.
Irina : Ah oui, c'est la premiĂšre fois que tu assistes Ă un de leurs mariages...
Irina : Au fait, pourquoi ton frĂšre est parti de la table ?
Moi : Il est juste sorti prendre l'air.
Inutile de lui donner des détails, mon frÚre nous a assez embarrassés devant toutes les familles de notre entourage ces derniers temps.
Je lÚve les yeux et mon regard se pose sur une danseuse qui s'approche du frÚre de la mariée. Je vois ce dernier dire quelque chose à son garde, et lorsque la femme arrive presque à sa hauteur, le garde se place devant elle et la fait dégager d'un geste de la main.
Son regard est nonchalant, malgrĂ© le fait que ce soit le mariage de sa sĆur. Je me rends compte que j'ai dĂ» le fixer trop longtemps, puisque son regard croise Ă nouveau le mien. Un coup de chaleur monte jusqu'Ă mes joues de honte et je dĂ©tourne immĂ©diatement les yeux. Il faut vraiment que je cesse de le contempler, sinon il va commencer Ă se poser des questions et puis c'est tout simplement inappropriĂ©.
Au mĂȘme moment, on nous apporte une variĂ©tĂ© de plats libanais. Le premier plat, que je pense ĂȘtre le plat principal, s'avĂšre en rĂ©alitĂ© ĂȘtre une entrĂ©e. Je me demande alors comment je vais pouvoir goĂ»ter Ă tous ces plats appĂ©tissants qui donnent si envie.
D'ordinaire, je ne suis pas une grande mangeuse, mais les plats sont si copieux et délicieux que je veux tout essayer. Malgré tout, je me retiens, de peur de donner une mauvaise impression et que les autres pensent que je suis une gloutonne qui ne mange jamais.
Je me mets à déguster et chaque plat est aussi succulent que je l'ai imaginé. J'ai particuliÚrement adoré cette purée de pois chiches que l'on savoure avec du pain libanais.
Une envie de remettre mon rouge Ă lĂšvres me traverse.
â Je vais aux toilettes, je prĂ©viens mon pĂšre.
â Dis Ă Giorgio de t'accompagner.
Mon pĂšre refuse catĂ©goriquement que je reste seuleâŻ; il faut toujours qu'un garde m'accompagne et me surveille. Giorgio, son garde, est revenu il y a seulement quelques minutes, mais sans mon frĂšre.
En me levant, Giorgio me suit automatiquement, sans que je n'aie besoin de lui dire quoi que ce soit. Je quitte la salle et me rends directement aux toilettes. Une fois arrivée, j'entre tandis que Giorgio reste à l'extérieur.
Je peux enfin respirer un bon coup, j'en ai assez de rester droite comme un piquet devant tout le monde, juste pour donner une bonne impression.
Je pose mon sac sur le bord du lavabo en granit beige, puis je sors mon rouge à lÚvres du sac. Je saisis un mouchoir pour retirer celui que je porte déjà estompé par le repas. AprÚs l'avoir jeté, je me penche vers le miroir pour l'appliquer avec minutie.
En m'observant à travers le miroir, une chasse d'eau se déclenche et quelques secondes plus tard, une femme sort d'une cabine. Elle porte une longue robe en satin doré, avec une fente sur la jupe qui souligne magnifiquement sa silhouette généreuse et élégante.
Oh.
Mais c'est elle, la sĆur de la mariĂ©e. Je m'interromps dans mon geste pour la contempler. Elle balance ses cheveux ombrĂ©s clairs derriĂšre son dos, et nos regards se croisent. Elle me sourit, dĂ©voilant ses magnifiques yeux couleur ambre, si prenants que je ne peux m'empĂȘcher de les fixer. Ils ressemblent Ă ceux de son frĂšre, mais alors que son regard Ă lui est insaisissable, le sien est profondĂ©ment envoĂ»tant.
Elle place ses mains devant le robinet automatique, l'eau s'active et elle commence Ă les rincer.
â La couleur est jolie, dit-elle soudain.
Je lÚve à nouveau mes yeux vers elle, un peu déconcertée. Je ne saisis pas tout de suite ce qu'elle veut dire.
â CommentâŻ?
â Ton rouge Ă lĂšvres, prĂ©cise-t-elle.
â Ah... merci, rĂ©ponds-je timidement.
AprÚs avoir séché ses mains et sur le point de partir.
â Tu danses incroyablement bien, je lĂąche brusquement et ne sachant pas pourquoi.
Je n'ai pas l'habitude de parler à des inconnus. En réalité, je ne parle presque jamais avec qui que ce soit, en dehors de ma famille ou d'Irina et Miro par téléphone.
Elle me sourit avec éclat, comme si c'était la premiÚre fois qu'on lui faisait un compliment sur sa danse, ce qui me paraßt improbable.
â Shukran, me rĂ©pond-elle.
â HeinâŻ?
â Oh, tu n'es pas libanaiseâŻ?
Je perçois un léger accent.
â Non, non... Je suis Amalia... Di Angelo, rajoutĂ©-je.
â EnchantĂ©e. Moi, c'est Yara Kanaan, se prĂ©sente-t-elle Ă son tour.
Elle a un joli prénom.
â Mais attends... s'exclame-t-elle, son visage exprimant de l'Ă©tonnement. Tu dois ĂȘtre la fille de Vincenzo, non ?
â Oui, c'est bien ça.
Elle prend ma main et la serre fort entre ses deux mains.
â C'est un grand ami de baba. Je suis contente d'enfin te rencontrerâŻ! dit-elle avec enthousiasme. Dommage qu'on n'ait jamais eu l'occasion de se croiser avant.
Je lui adresse un sourire mélancolique en réponse à sa derniÚre remarque. Je n'aurais jamais cru qu'un jour quelqu'un souhaiterait me rencontrer, étant donné que si peu de personnes connaissent mon identité.
â Tu sais, les pĂšres de notre milieu n'apprĂ©cient pas vraiment que leurs filles sortent ou frĂ©quentent des lieux publics remplis d'inconnus. C'est une question de sĂ©curitĂ©, je rĂ©ponds d'une voix posĂ©e.
Elle croise les bras, l'air pensive, puis passe lentement sa langue sur sa lÚvre supérieure. C'est à ce moment que je remarque un éclat discret. C'est un piercing à la langue ?
â Je dirais plutĂŽt qu'il voulait prĂ©server une beautĂ© digne d'une dĂ©esse.
Le rouge me monte aussitĂŽt aux joues. C'est la premiĂšre fois qu'on me fait une telle remarque, et encore plus venant d'une femme.
â Merci, dis-je, presque trop timidement.
â Trop mignonne, rĂ©plique-t-elle avec un sourire taquin en pinçant doucement ma joue. Bon, je te laisse. Ă la prochaine !
Elle traverse les toilettes jusqu'Ă la porte et disparaĂźt derriĂšre celle-ci.
Euh... Elle vient de me pincer la joue comme si j'Ă©tais une enfantâŻ? Je me sens tellement embarrassĂ©e. Quand elle a appris que je suis la fille de Vincenzo, je ne m'attendais pas du tout Ă une rĂ©action comme celle-ci. Elle doit vraiment bien connaĂźtre mon pĂšre, ou peut-ĂȘtre mĂȘme toute sa famille en sait beaucoup sur lui.
J'apprĂ©cie sa personnalitĂ©, mĂȘme si on n'a Ă©changĂ© que quelques minutes. Yara dĂ©borde d'Ă©nergie et de bonnes ondes. J'aurais aimĂ© ĂȘtre comme elle, capable de parler avec des inconnus sans aucune retenue, sans craindre d'ĂȘtre jugĂ©e pour ma façon d'ĂȘtre. Mais je fais partie d'une famille trop complexe pour pouvoir simplement ĂȘtre moi-mĂȘme.
Je finis d'appliquer mon rouge à lÚvres et je rejoins mon pÚre à la table. En sortant, Giorgio m'a regardée longtemps avant que je ne le rassure en lui disant qu'il n'y a rien.
â T'en as mis du temps, remarque mon pĂšre.
Je m'assois sur ma chaise, mais Ă peine mes fesses touchent la surface moelleuse que je me relĂšve lorsque mon pĂšre tousse longuement dans son mouchoir en soie.
â Tu vas bien ?
â On va rentrer, prononce-t-il avec difficultĂ©.
Ses toux poursuivent. Quand ça arrive, il doit se coucher et se reposer. J'attends qu'il se lĂšve de la chaise pour glisser mon bras autour du sien. Il essaie de ne pas trop laisser transparaĂźtre sa faiblesse devant les autres parrains. C'est ainsi, il faut toujours afficher sa force, mĂȘme quand on est souffrant. Je trouve ça ridicule, parce que ça le fatigue encore plus lorsqu'il tente de dissimuler sa maladie, alors que nous voyons qu'il ne va pas bien.
Nous contournons la table et faisons quelques pas vers la sortie.
â Vincenzo, vous partez dĂ©jĂ ?
Nous tournons tous les deux la tĂȘte vers cette voix grave. Un homme, qui doit avoir l'Ăąge de mon pĂšre, voire un peu plus jeune, se tient lĂ , accompagnĂ© de cet homme dont les yeux ambrĂ©s continuent de m'hypnotiser.
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Coucou mes biches â€ïž
Comme je vous l'ai dit l'écriture n'est pas finie pour moi.
Voici la new era :
Dark Romance Mafia
By Mona Ch.
Vous en pensez quoi ? Ă quoi vous vous attendez ?
N'hésitez pas à m'ajouter sur insta : MonaCh_Wattp
đ©·đ©·