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Horliana
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Chapitre 6

Lorsque j'ouvre les yeux, la lumière diffuse de l'aube filtre à travers la fenêtre. Contre toute attente, je me suis endormi, sans même m'en apercevoir. Je me redresse lentement, les muscles endoloris par la position inconfortable que j'ai tenu toute la nuit. Il me faut quelques minutes pour sortir du brouillard de mes rêves et me rappeler où je me trouve. En face de moi, seule la tignasse en bataille de Finlay dépasse de l'épais duvet dans lequel il s'est enroulé. Le côté de sa chambre est déjà décoré et apporte une pointe de vie dans cet espace qui me paraissait si austère. Les murs blancs sont désormais couverts de posters représentant divers rappeurs, des vêtements s'entassent déjà sur sa chaise de bureau et les restes d'un repas traînent au pied de son lit. Je me lève dans une grimace douloureuse. Je porte encore mes vêtements de la veille et n'ai même pas pris la peine d'enlever mes chaussures. Aussi discrètement que possible, pour ne pas réveiller mon colocataire hyperactif, j'ouvre ma valise et m'empare de quelques affaires de toilettes pour aller prendre une douche.

Les couloirs de la résidence sont encore endormis et je parviens jusqu'au sanitaire sans croiser âme qui vive. Je me défais rapidement de mes habits et me glisse sous le jet qui n'est pas aussi brûlant que je le souhaiterais. L'eau, bien que tiède, parvient à alléger la tension de mes muscles et noie une partie de mes angoisses. Je profite de cette brève accalmie où le tumulte de mes pensées se tait enfin. Je sais qu'il reprendra de plus belle dans pas longtemps. Les mains appuyées contre le carrelage blanc, je savoure le roulis de l'eau et le silence qui règne dans ma tête. Je ne sais pas pendant combien de temps je savoure la caresse de la pluie sur ma peau, mais lorsque celle-ci devient glacée, je coupe le jet et le tintamarre reprends. Un bref regard sur le dessin que j'ai encré au-dessus de mon cœur, me rappelle ce que je fais ici et fait voler en éclat mon éphémère tranquillité. Si je veux mettre la main sur le tueur de ma sœur, je n'ai pas de temps à perdre.

J'enroule une serviette autour de ma taille et traverse le couloir en sens inverse sans me formaliser des quelques étudiants et étudiantes qui commencent à émerger hors de leur chambre. Certains regards s'attardent sur ma silhouette à demi-nue, mais je les ignore. Lorsque je franchis de nouveau le seuil de ma chambre, Finlay est réveillé. Ses yeux verts sont encore embués de sommeil, mais il affiche un large sourire lorsqu'il m'aperçoit. Comment c'est possible d'être perpétuellement de bonne humeur ?

— Hey Ewan ! Tu as bien dormi ? Même si c'est pas le lit le plus confortable du monde, je m'attendais clairement à pire. J'espère que j'ai pas ronflé, ou que j'ai pas de choses bizarres dans mon sommeil. T'as pris une douche ? Elles sont comment ? L'eau est chaude ?

Je presse mes doigts contre mes tempes pour tenter d'endiguer la migraine que sa logorrhée est sur le point de me provoquer. Finlay a vraiment l'air adorable, mais s'il s'obstine à me bombarder de mots et de questions, je ne suis pas certain de réussir à le supporter bien longtemps.

— Au fait, les dernières années proposent une visite du campus aujourd'hui. C'est sur le thème légendes et mystères, on devrait carrément y faire un tour, continue-t-il en prenant à peine le temps de respirer. Ils parleront peut-être du meurtre qu'il y a eu l'année dernière, il paraît que c'était carrément flippant.

— Finlay, ferme-là, je tonne.

L'entendre parler une nouvelle fois du meurtre de Fiona comme si c'était une simple histoire pour faire peur aux étudiants a fait voler en éclat mes dernières parcelles de patience. Je passe devant mon colocataire la mâchoire serrée. J'ouvre et farfouille dans ma valise pour trouver des vêtements propres à mettre et j'enfile le tout sans me soucier de cacher ma nudité. Je n'ai jamais été pudique. Quand je me retourne, enfin dans une tenue décente, Finlay n'a pas bougé. Le visage bas, il observe ses doigts qu'il triture nerveusement. D'une seule enjambée, je le rejoins au pied de son lit et me racle la gorge. J'aimerais m'excuser pour mon comportement rustre, mais il va devoir comprendre rapidement que certaines limites sont à ne pas dépasser.

— Je suis désolé, lâche-t-il à voix basse.

Bordel, avec sa voix encore fluette et son air coupable, il ressemble à un gamin qui aurait fait une énorme bêtise.

— Non, c'est moi, je.... il faut que tu le saches.

Je m'assois au bord de son lit et plonge la tête entre mes mains. Je n'ai pas envie de parler du meurtre de Fiona, mais je ne pourrais pas supporter les allusions à sa mort plus longtemps et Finlay doit savoir pour éviter mes coups de sang.

— La fille qui a été assassinée l'année dernière, c'était ma jumelle.

Les mots sont âcres sur ma langue et même après trois mois, c'est comme apprendre la nouvelle pour la première fois : mon cœur se serre, mes yeux me brûlent et mes poings se serrent.

— Je... Oh bordel, je suis vraiment le roi des crétins.

Il se tape le front et s'avance déjà vers moi dans ce qui semble être l'esquisse d'une étreinte. Je me redresse d'un seul coup. Les câlins, la pitié, j'en ai déjà trop bouffé.

— Tu savais pas, mais, si tu pouvais éviter de trop en parler, ce serait bien.

— Évidemment, je me sens con, moi je suis là à te raconter ça comme si c'était une histoire de fantôme et en fait je parle de ta sœur, de ta jumelle en plus. T'aurais pas dû me crier dessus, je méritais carrément ton poing dans la gueule.

— Je t'avoue que si tu continues à répéter ça, je suis pas sûr de me retenir, je lâche en tentant un demi-sourire, mais je n'arrive à lui offrir qu'un rictus probablement plus flippant que réconfortant.

Mes mots sont suivis par un long silence. Finlay évite mon regard et contemple sa couette au motif de superhéros. De mon côté, je suis coincé au bord de son lit. Je passe et repasse ma main dans mes cheveux que je n'ai pas encore attachés. J'écarte une mèche brune de devant mes yeux et lâche un long soupir avant de tourner de nouveau mon visage vers le blondinet.

— Je veux bien aller à ta visite, j'ai besoin d'en apprendre un peu plus sur ce qui se passe ici et ça pourrait p't-être m'aider.

Finlay jaillit de son lit.

— Oh c'est génial ! Tu vas voir on va s'éclater, en plus on va sûrement rencontrer d'autres étudiants de première année et on va apprendre pleins de trucs hyper intéressants. En plus, ce sera sûrement l'occasion d'apprendre à se connaître. Je vais me préparer tout de suite, le rendez-vous est donné à dix heures. Allez je file à la douche.

Cette fois mes lèvres s'étirent vraiment face à l'enthousiasme visiblement contagieux du jeune homme qui a déjà quitté la chambre avec un énorme sac sous le bras. Quand la porte claque derrière lui, l'ampleur de ce qui m'attend me tombe sur les épaules. J'ai passé des heures à éplucher les conversations que j'ai eues avec Fiona durant l'année passée à la recherche d'un indice quelconque sur son éventuel assassin, mais elle ne parlait que des belles choses : ses amis, ses cours, quelques-unes de ses sorties... Pas un seul mot sur un éventuel petit ami ou tout autres éléments qui pouvaient montrer qu'elle avait peur. Quant à la police, malgré les deux mois que j'ai passés à les harceler, la réponse était toujours la même : l'enquête suit son cours, on vous donnera plus d'informations lorsque nous en aurons. Mais rien ! Juste leur foutu silence et la disparition de Ronan. J'ai eu beau passer des coups de fil, remué ciel et terre pour mettre la main dessus, je n'ai affronté que des réponses vagues et des portes fermées. Alors je savais que je devais prendre les choses en main. Sur place, ce sera bien plus simple de trouver des informations, d'en apprendre plus sur le quotidien de ma jumelle. Au fond de moi, je sais qu'elle me cachait quelque chose, un truc suffisamment grave pour qu'elle ait choisi de le passer sous silence.

— On va déjeuner ?

La voix haut perchée de Finlay me sort de mes pensées. Planté dans l'embrasure de la porte, il a troqué son pyjama aux personnages de dessins animés contre un baggy beige et un t-shirt bien trop large pour sa carrure fluette. On dirait un gamin qui essaye de jouer les gangsters. Comme toujours, son sourire illumine tout son visage aux traits encore enfantin.

— Ouais, je grommelle, faisons ça. 

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