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16 - Épilogue
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Pythonisse

Prologue

La jeune vendeuse me tendit le sac cartonné en me remerciant d’un ton mielleux. Un large sourire fendait son visage maquillé à outrance ; avec moi, elle venait de faire son chiffre du mois.

— Votre petite copine va encore plus vous aimer ! me complimenta-t-elle avec un regard complice.

— J’espère bien ! répliquai-je pour donner le change.

Mes achats en main, je quittai la boutique puis le centre-ville afin de me rapprocher du parc. Je le traversai d’un pas serein pour rejoindre mon appartement.

Dans la modeste résidence arborée, j’avais eu la chance d’obtenir un beau logement refait à neuf. Il comportait deux chambres – la seconde étant souvent utilisée par ma grande sœur – une salle de bain acceptable, une cuisine ouverte sur un vaste salon, et je pouvais même profiter d’un balcon spacieux, à partir duquel j’avais une magnifique vue sur le parc. Le calme environnant avait été décisif dans le choix de ce lieu.

En entrant, j’allumai la télévision pour ne pas rester dans un silence qui me rappellerait ma solitude puis me dirigeai vers ma chambre. En face du lit, l’immense miroir montant sur toute la hauteur du mur et qui courait sur trois bons mètres de large avait été la seule vraie « folie » que je m’étais autorisée ici.

Impatient de mirer mes dernières trouvailles, je posai le petit sac sur ma couette avec une délicatesse que je pensais parfois à la limite du fanatisme, en sortis le papier de soie fermé par un autocollant à l’effigie de la marque puis étalai mes articles tout autour.

Une dizaine de culottes en dentelle venaient de rejoindre ma collection déjà bien garnie. Ces nouvelles pièces me comblaient de joie ; elles se déclinaient en tant de couleurs différentes que j’en avais eu le tournis dans le magasin. Les plus claires demeuraient mes préférées ; passe-partout, je pouvais me permettre de les porter tous les jours sans restriction. Les autres, plus bariolées, étaient réservées aux événements plus festifs.

Un sourire ténu s’installa sur mon visage ; j’avais hâte de les revêtir !

Je pris le temps de les disposer de manière convenable, se chevauchant avec grâce, puis attrapai mon portable. Après quelques portraits tests, je publiai une nouvelle photo sur Instagram, accompagnée d’une légende reflétant mon bonheur.

À peine le cliché mis en ligne, quelques likes arrivèrent, suivis de petits mots qui flattèrent mon ego, appauvri ces derniers jours. Après avoir passé plusieurs années à parcourir des comptes semblables et à envier les commentaires agréables qu’ils récoltaient, j’avais eu le courage d’ouvrir le mien il y a plus d’un an.

La communauté des adeptes des panties 1 n’était, en apparence, pas très étendue et pourtant, à bien y regarder, nous étions nombreux. Je ne réunissais pas un nombre démentiel d’abonnés, mais assez pour que je reçoive des mots qui me motivaient au quotidien.

Je pris le temps de plier les dessous et de les ranger avec minutie, triés par couleur et par marque. J’admirai mes étagères remplies durant de longues minutes, fier, puis repartis dans mon salon. Ma soirée fut calme, ponctuée de conversations en compagnie de quelques personnes qui suivaient mon compte. Je dardais parfois la télévision d’un œil distrait et finis par me coucher assez tôt.

Le lendemain, je me rendis au travail en portant l’une des culottes achetées la veille, bien dissimulée sous mon pantalon de toile noir. Dans mon entreprise, le costume était de rigueur. Nous avions souvent des rendez-vous avec des clients, nous devions donc être apprêtés en toute circonstance. De manière générale, je prenais soin de paraître « convenable » et « bien élevé » et le bureau était l’endroit parfait pour ça. Pourtant, aujourd’hui, pour la première fois, j’étais en retard.

Quand il avait fallu m’habiller et choisir mes sous-vêtements, ce matin, la tâche s’était révélée être une véritable épreuve de survie. Le résultat se trouvait là, pile sur l’aiguille de ma montre qui avait dépassé de quinze minutes mon horaire habituel.

En conséquence, lorsque j’entrai dans le hall de l’immeuble, j’accélérai la cadence pour ne pas accentuer ma faute. De par ma nouvelle position, je ne pouvais pas me permettre de me pointer après les autres. En poussant la porte de mon étage, je trottinais presque.

— Bonjour Ethan ! me lança Anna d’un ton joyeux en faisant voler quelques mèches de sa chevelure flamboyante. J’ai fini les dossiers que tu m’as demandés hier ! Luc et Beryl sont en déplacement pour rencontrer un client.

Ses yeux noirs sondèrent les miens à la recherche d’une explication pour mon retard, mais je détournai les miens vers les papiers qu’elle me tendait. J’attrapai la liasse à la hâte et la remerciai, continuant de me diriger vers mon espace de travail d’un pas rapide.

Quand j’avais obtenu ma promotion en tant que chef de service, on m’avait appris qu’elle s’accompagnait d’un bureau personnel avec murs vitrés et porte décorée de mon nom, loin de mes subordonnés qui avaient la chance d’avoir des bureaux collés les uns aux autres. Ce côté-là me déplaisait un brin. Je n’étais pas des plus sociables, mais j’aimais passer du temps avec mon équipe. Et me retrouver cloisonné seul pour travailler me démotivait parfois.

Tandis que j’entrais dans mon carré solitaire, Anna, mon bras droit, me héla de loin.

— Au fait ! Un colis a été livré pour toi ! Je l’ai mis sur ton bureau !

Je hochai la tête, les yeux déjà fixés sur les documents. Encore un client qui quémandait un rabais. Ne faisant pas attention au désordre constant qui envahissait mon plan de travail, je poussai mon pot à crayons et déposai les feuilles sur un endroit libre. Je lus durant plusieurs minutes, annotant la charte afin de trouver un moyen de réduire ses dépenses sans trop nous impacter. Je hélai ensuite Anna pour qu’elle les lui transmette et quand elle referma la porte, mes yeux tombèrent sur le colis dont l’existence se rappela à moi.

Je le plaçai devant moi puis l’inspectai. D’une forme rectangulaire, il était long comme mon bras et à peine plus large. Intrigué par cette forme peu conventionnelle, je le soupesai. Il était léger, très léger. Piqué par la curiosité, je saisis mon coupe-papier et découpai le gros scotch marron qui le scellait, précautionneux de ne rien abîmer.

À l’intérieur, mes yeux tombèrent sur une petite enveloppe blanche sur laquelle mon prénom était inscrit. Troublé, je l’ouvris et lus.

« Bonjour Ethan. Voudrais-tu bien la porter pour moi et m’envoyer une photo ? J’ai essayé de tenir compte de tes goûts et des miens en la choisissant. »

Un numéro de téléphone suivait le message. Les sourcils foncés, je déposai la lettre plus loin et plongeai la main dans le contenant cartonné, rempli de kraft rouge. Lorsque quelque chose me piqua, je relevai le bras d’un geste vif. Examinant mon doigt, j’y vis une goutte de sang se former sur son extrémité.

Je portai donc mon index à ma bouche et suçai le liquide, poussant le papier de soie du bout d’un stylo afin de ne pas me faire mal à nouveau.

Avec étonnement, je découvris qu’une rose était posée sur une bourse en velours d’un pourpre profond à peine plus grande que ma main. J’ôtai la fleur, la déplaçant sur ma pile de « dossiers en cours ». Je l’observai un brin. Elle ne semblait pas avoir souffert durant le voyage et ses pétales, d’un rouge carmin délicat, étaient en parfait état.

Je pris le petit sac en tissu et tirai sur les rubans qui la scellaient. Je me demandai qui avait pu envoyer un cadeau si original. Ce n’était pas rare que des clients ou leurs secrétaires nous adressent des présents après la signature des contrats, ou avant, pour nous graisser la patte. Le plus souvent, nous écopions d’une bouteille de vin rouge de qualité moyenne, mais les plantes, c’était nouveau !

Je ris en imaginant la pauvre femme qui avait dû préparer cette boîte, priant pour que le bout de nature arrive à destination sans encombre. Pourtant, mon air joyeux se fana en un éclair et mon cœur tambourina dans ma poitrine. Mes yeux s’exorbitèrent d’horreur devant le tanga aux couleurs criardes que je venais d’extraire du sac.

Il y eut une seconde où plus rien ne m’atteignit ; les bruits des alentours disparurent, remplacés par des bourdonnements erratiques, la lumière ne filtra plus que pour éclairer l’habit et mon souffle se saccada sous le coup d’une panique que je ne connaissais que trop bien. Quand je fus en mesure de récupérer mes facultés, je refermai le tout à la hâte, le visage brûlant de honte et de peur.

Je jetai des regards affolés dans les bureaux adjacents, tandis qu’une question martelait mon esprit terrifié : « c’était quoi, ça ? »

1NDA : « Panties » est le terme le plus utilisé dans la communauté afin de décrire l’ensemble des sous-vêtements portés par les hommes adeptes de ce kink, mais il ne se limite pas aux « culottes ».

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