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Theinspiredsun
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Panique au 3e étage

La voiture ralentit.

Les lumières de la ville défilent un peu moins vite. Le néon rose d'un salon de manucure, le vieux GS25 au coin de la rue, un café minuscule que je croyais disparu.

Et là, dans ma gorge, un truc se coince.

Ce quartier.

Je le connais par cœur.

Chaque trottoir. Chaque lampadaire. Chaque panneau criblé d'autocollants.

C'est mon ancien quartier. Celui où j'ai grandi.

Où j'ai eu mes règles pour la première fois. Où j'ai volé mon premier rouge à lèvres.

Où j'ai cru, pendant un moment, que l'amour pouvait durer plus qu'une saison.

— Attends, je murmure. C'est... Eunpyeong-gu ?

Haejin tourne la tête, surprise.

— Hein ? Ouais. Pourquoi ?

Je fixe la rue par la fenêtre. Mes doigts se crispent.

— Mes parents habitent encore là. Et... Taeyang aussi.

Silence dans la voiture.

Même la playlist se fait discrète, comme si elle avait senti que l'ambiance venait de chuter d'un étage.

Somin se retourne vers moi, sourire en coin.

— Babe. Détends-toi. Tu crois vraiment que Seo Taeyang va traîner dans un karaoké ?Lui, c'est genre whisky à 300 balles le verre, lumière tamisée et serveuses qui l'appellent "oppa" pour un pourboire.

— Grave, renchérit Haejin. Et même s'il était là... on s'en fout. Ce soir, c'est NO BOYS, JUST NOISE.

Je les regarde.

Et je respire un peu mieux.

Elles ont raison.

C'est pas lui. Pas ici. Pas maintenant.

Ce quartier, il m'a brisé.

Mais ce soir, je reviens en conquérante.

Et putain, qu'est-ce que ça fait du bien.

Je sors de la voiture.

L'air est chaud, un peu collant. Typique des fins de journée à Séoul.

Haejin referme sa portière d'un coup de hanche.

— Le karaoké est à deux rues, annonce-t-elle. Et apparemment y'a des cocktails à 3000 wons si tu chantes faux.Donc toi, Minrae, t'es sauvée.

— Va mourir, je souffle en marchant à côté d'elles.

On rit. On avance.

Mais mes pas ralentissent.

Mon regard glisse sur les façades, les murs griffés par le temps, les lampes jaunies au-dessus des portes.

Et là, à gauche, un virage. Une ruelle.

Je m'arrête net.

Cette ruelle.

Elle est toujours là. Pareille.

Même les poubelles semblent pas avoir bougé.

Flash.💥

15 ans. Printemps. Nuit tombée.

Je cours.

Les bras pleins de chips, de boissons, de bonbons volés à la va-vite dans l'épicerie du coin.

— COURS ! hurle Taeyang derrière moi.

Je ris, le souffle court, le cœur qui tape comme un tambourin sous ecstasy.

On tourne dans cette ruelle.

On se jette au sol, entre deux poubelles, planqués comme des gosses en cavale.

Personne nous suit.

Mais on est morts de rire. Littéralement.

Je balance un paquet de chips dans sa tête.

— Pourquoi on a fait ça ?! On est riches comme des porcs !

— Parce que c'est drôle, il crie en m'éclatant un Choco Pie dans la bouche.

Je m'étouffe en rigolant.

On se bat avec des emballages. On s'effondre au sol.

Essoufflés. Heureux.

Ses cheveux en bataille. Ma jupe de lycée un peu remontée sur mes genoux.

Il tourne la tête vers moi.

— T'as un truc, là.

Il tend la main. Essuie doucement le coin de mes lèvres.

Ses doigts traînent un peu plus longtemps que nécessaire.

Et là...

Il se penche.

Et m'embrasse.

Pas comme un ado. Pas comme un "premier amour".

Non.

Flash back off.💥

— YAH ! Minrae !

CLAP CLAP

Je sursaute.

Somin agite la main devant mon visage, sourcils levés.

— Tu vas te téléporter dans une autre vie ou tu viens chanter comme une diva en carton ?

Haejin penche la tête.

— Tu pensais à quoi là ? C'était intense.

Je secoue la tête, un petit rire nerveux dans la gorge.

— À rien. Vraiment. À rien d'important.

Je range le flashback dans une boîte.

Je la referme.

Et je reprends la route vers le karaoké.

On arrive devant le bâtiment. Un vieux karaoké à trois étages, vitres fumées, enseigne LED rose qui clignote comme si elle allait rendre l'âme.

Haejin pousse la porte en première.

— J'ai réservé, balance-t-elle à l'accueil. Nom : Kang. Trois reines, zéro honte vocale.

Le réceptionniste hoche la tête, habitué. Il nous tend une clé.

— Salle 307. Troisième étage. Commande par tablette. Micro sans fil.

On grimpe l'escalier, les néons changeant de couleur à chaque marche.

Rose, bleu, violet, rouge.

Comme un strip club pour chanteurs en manque.

On entre dans la salle.

Canapés en cuir noir. Mur à paillettes. Écran géant.

Ambiance lumière tamisée et néons violets.

Un miroir immense sur un pan de mur, histoire de voir ta propre déchéance vocale en 4K.

Je m'installe dans un coin du canapé, claque mes talons au sol, balance mon sac.

— Okay, j'prends la bouffe. J'ai pas mangé depuis ce matin, je grogne.

Somin attrape la tablette. Elle fait glisser les menus à toute vitesse.

— Poulet frit, frites, tteokbokki, gimbap, cocktails colorés et milkshakes arc-en-ciel ?

— TOUT.

— Amen.

Elle valide.

Haejin attrape déjà un micro et fait mine de tester l'écho :

— AAAAAAH AAH AHHH mon ex est un connard AAHHHH

— Ça marche, Haejin, calme-toi. Elle se croit sur Inkigayo.

On explose de rire.

Je prends l'autre tablette pour chercher des chansons.

Je fais défiler les titres.

Je sais même pas ce que je veux chanter. Peut-être rien. Peut-être tout.

Mais une chose est sûre :

Ce soir, j'oublie.

L'écran du karaoké clignote en bleu néon.

La chanson est choisie.

Le micro est tendu.

Et moi... je suis debout.

Haejin saute sur ses pieds à côté de moi.

— LET'S GOOOOO ! Balance ton flow, queen !

Somin est déjà pliée en deux, en train d'applaudir comme si elle assistait à une finale de Music Bank.

Et dès les premières notes, je prends une grande inspiration.

"Love Scenario" d'iKON.

Classique. Émotionnel. Catchy.

Je connais chaque parole.

Chaque souffle.

Chaque montée.

Et je commence.

Ma voix s'élève, claire, un peu rauque, mais droite.

Les paroles sortent comme si je les avais écrites moi-même.

— Saranghandaneun mal-eun... Sajin sog-e... chueokdoen gieok...

Haejin tape des mains en rythme.

Somin lève les bras comme dans un concert.

— YAAAAAS MINRAE SEDUCTION MODE ACTIVATED !

Mais moi, je suis ailleurs.

Le micro dans la main, les yeux mi-clos, je suis pas dans un karaoké à Gangnam.

Je suis sur scène.

Je suis dans un drama.

Je suis dans ma revanche.

Chaque mot, je le crache avec style.

Je balance ma main en l'air.

Je tourne sur moi-même.

Je pointe du doigt Somin qui crie "AHHHH J'SUIS LA FAN NUMÉRO 1".

Haejin tente une choré improvisée à côté de moi, elle rate tous les pas, mais elle s'en fout.

On s'en fout toutes.

— Igeotboda deo jal sal su it-eo... Urin geuleon unmyeong-ina...

J'fais une fausse révérence.

Je tombe à genoux.

Je mime une scène de drama de rupture.

Somin hurle :

— ELLE FAIT UN K-DRAMA EN DIRECT, BORDEL !

Et on explose de rire.

Le dernier couplet, je le chante comme si l'amour m'avait tuée hier et que je ressuscitais en plein karaoké.

— Geu ttaen moleul su isseoss-eo... Woori-ui... love scenario...

BOUM. FIN.

J'arrache une révérence comme une diva.

Haejin se jette sur moi pour un câlin.

Somin me tend un verre comme si j'avais gagné un Daesang.

Et là, je souris pour de vrai.

Large. Fier. Vivante.

Ça fait presque une heure qu'on hurle à s'en casser les cordes vocales.

Haejin s'égosille sur du MAMAMOO.

Somin a chanté IU en mode drama queen.

Et moi ?

J'ai tout donné sur iKON et même du Sunmi.

J'ai dansé, hurlé, mimé une rupture, fait tomber un coussin au sol, failli m'étouffer de rire.

La pièce sent la clope froide, les snacks épicés et le déodorant de survie.

On est littéralement en post-concert mode.

Je m'effondre sur la banquette, la frange collée au front, les joues rouges, la gorge sèche.

— J'vais mourir, je souffle.

— J'te préviens, si tu meurs, je poste TOUTES les vidéos, dit Haejin en tenant son téléphone.

— Allez, vas-y, meurs glamour, ajoute Somin, hilare.

Je les regarde en soufflant comme un bœuf.

— J'vais juste pisser, ok ? Restez vivantes pendant cinq minutes.

Je quitte la pièce en traînant les pieds.

L'ascenseur est tout petit, couvert de stickers de groupes de K-pop et de pubs pour des shots de gingembre censés "booster la virilité".

Je descends d'un étage, le panneau indique : "TOILETTES - UNISEXE".🚻

Je fronce les sourcils.

Pas de séparation hommes/femmes ? Sérieusement ?

Je souffle, blasée.

— C'est quoi ce genre d'endroit ? Un karaoké ou un bar à concepts sociaux ?

Mais j'entre quand même.

L'ambiance est calme, presque trop. Lumière tamisée, murs noirs, néons roses au-dessus des lavabos.

Je me dirige vers une cabine libre, referme la porte, m'installe.

— Bordel... j'avais oublié ce que c'était que de respirer.

Je ferme les yeux une seconde.

Mes oreilles bourdonnent encore du vacarme.

Mes cuisses collent au tissu de mon short.

Et mes cheveux sont une déclaration d'indépendance capillaire.

Et... je fais ce que j'ai à faire.

Un petit moment de répit.

Silence. Pause. Vide.

Je sors de la cabine.

Je me lave les mains.

Je souffle.

Ok. Respiration maîtrisée.

Ma frange est de nouveau vivante.

J'ai pas pissé sur mes chaussures.

La soirée est sauvée.

J'ouvre la porte doucement.

Très doucement.

Et là.

Le destin, ce bâtard, me pisse littéralement dessus.

Parce que je les entends.

Des voix.

— T'as vu sa tête quand elle a renversé son shot ?

— Il était vert, le mec, j'te jure !

Des rires.

Graves. Masculins. Arrogants.

Et une voix, UNE VOIX.

Cette voix.

Ce rire.

Ce putain de rire.

Je lève les yeux. Lentement. Comme dans un film d'horreur.

Et là.

BOOM.

Seo. Taeyang.

Veste en cuir sur les épaules.

T-shirt blanc. Chaîne en argent.

Yeux plissés de rire.

Bouche entrouverte.

Tatouages qui dépassent de ses manches.

Et ce petit rictus de connard qui pense que le monde est son terrain de jeu.

Derrière lui ?

Rion, Minseok, Jaehyuk.

Tous bien coiffés, bien fringués, beaux comme le péché.

Et moi ?

Moi je suis figée, la main sur la poignée, l'air d'une meuf qui vient de voir sa sex tape passer sur écran géant.

INTÉRIEUR : PANIIIIIIIIQUE.

Pensée flashback :

"Babe. Détends-toi. Tu crois vraiment que Seo Taeyang va traîner dans un karaoké ?

Lui, c'est genre whisky à 300 balles le verre, lumière tamisée et serveuses qui l'appellent "oppa" pour un pourboire."

— Somin, 22h01. RIP ta crédibilité.

Je me tourne sur moi-même.

180 degrés.

Sprint.

Je me jette littéralement dans la cabine la plus proche et referme la porte aussi sec.

BOOM.

Silence.

Mon cœur bat à 320 BPM.

Ma respiration fait des vagues.

Mes mains tremblent.

Je check mes poches.

Gauche ?

Rien.

Droite ?

Vide.

— Bordel, bordel, bordel...

Où est mon téléphone ?

OÙ EST MON TÉLÉPHONE ?!

Et là... je comprends.

— PUTAIN DE MERDE DE BORDEL DE CON DE TÉLÉPHONE !!!

Je l'ai laissé dans la salle.

Avec les filles.

Avec Somin.

Avec la responsable officielle de "jamais je me trompe".

Je me retiens de hurler.

Mais à l'intérieur, je suis déjà en train de rediger son avis de décès.

— Je vais la tuer, je murmure. Je vais la tuer, je vais la découper, je vais me faire un collier avec ses dents.

Et c'est là que j'entends...

Des pas.

Ils entrent.

Et moi, planquée dans ma cabine, sans téléphone, sans plan, sans dignité...

Je retiens ma respiration.

Et je prie pour que mon karma ait été réinitialisé depuis mon dernier doigt d'honneur au destin.

Je suis là.

Assise sur la cuvette.

Genoux serrés. Mains dans les cheveux.

Coeur en détresse. Dignité en fuite.

Les mecs rient dans la pièce d'à côté.

Normal.

Comme si c'était leur salon.

— File-moi ton briquet, Minseok.

— T'as pas encore arrêté ? Balance Jaehyuk.

CLIC.

CLAC.

Odeur de cigarette.

Je reste figée.

C'est quoi cet endroit ?

Pourquoi y'a PAS de toilettes non mixtes ?

Pourquoi ils fument comme dans un bar clandestin à Pyongyang ?

Et pourquoi mon karma est une garce sans pitié ?

Ils parlent.

Ils rigolent.

Ils tapent des doigts sur les lavabos.

Et moi, je suis LÀ.

Planquée.

Terrifiée.

Sans plan B.

Sans téléphone.

Sans issue.

Je cale ma tête dans mes mains.

— Putain mais partez, partez, partez... partez BORDEL.

Et là.

CLAC.

La porte de MA cabine s'ouvre.

J'AI PAS FERMÉ !?

— Non non non non non non non non—

Je lève la tête, yeux écarquillés.

Je vois pas tout de suite qui c'est.

Juste une silhouette.

De dos.

En train de rigoler.

Tête tournée vers les lavabos.

Et là... je meurs pour la troisième fois de la journée.

C'est lui.

C'est lui.

SEO. TAEYANG.

Il entre, encore en train de parler.

— Attends, attends, j'ai pas fini l'histoire ! Le mec a vraiment dit "tu vas me respecter j'suis fils de député" pendant qu'il gerbait sur sa Rolex !

Ses potes explosent de rire dehors.

Et lui ?

Il referme la porte derrière lui.

Automatiquement.

Il se tourne.

Et il me voit.

...

Silence.

Silence nucléaire.

Moi ?

Assise sur les toilettes.

Yeux grands ouverts.

Cheveux décoiffés.

Trop de lumière.

Pas assez de dignité.

Lui ?

Debout.

Frappé en plein cœur par le WTF cosmique.

Il cligne des yeux.

Et moi ?

Je le supplie.

Avec mes yeux.

Avec toute l'énergie de mon âme.

TA GUEULE.

NE DIS. RIEN.

NI UN MOT. NI UNE PHRASE. NI UN SOURIRE.

Parce que là, je suis à deux doigts de m'évanouir, de me désintégrer ou de l'étrangler avec le rouleau de papier toilette.

Il ne dit rien.

Pas encore.

Mais ses yeux ?

Ils parlent déjà trop.

NOTE D'AUTEUR – by @theinspiredsun

Ce chapitre, c'est littéralement la preuve que l'univers (ou moi 😂) adore mettre Minrae dans la merde.

Littéralement.

Entre le trauma du quartier, les flashbacks à déclenchement aléatoire, et maintenant la rencontre la plus gênante du siècle dans une CABINE DE TOILETTES...

Je pense qu'on peut officiellement dire que la dignité de Minrae est partie en vacances. (Héhéhé)

Mais dites-vous bien une chose :

C'est à partir de là que tout bascule.

Parce que maintenant, Taeyang sait.

Et vous pensez qu'il va gentiment lui dire "pardon pour l'embarras" ?

Haha.

Non.

Pas lui.

Prochaine étape ?

Le silence qui hurle, le regard qui crame, et les vieilles blessures qui remontent en pleine gueule.

Mais pour l'instant, on respire tous ensemble...

Parce que Minrae, elle, elle peut plus.

— Soleil ☀️

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