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Lilwenn
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Mardi :

Cher journal.

J'ai toujours détesté les gens qui commençaient comme ça, mais je n'ai pas d'autres idées alors tant pis. Ce sera “Cher journal”.

Voilà deux jours, trois heures et quatres… non, cinq minutes que nous savons ce qu'il va se passer dans une semaine jour pour jour. L'astéroïde EF-031 s'abattra sur la Terre, provoquant ainsi la deuxième grande extinction – après celle des dinosaures.

Tu connais les humains aussi bien que moi. Fin du monde = diarrhées mondiales apparemment, puisque nous sommes déjà en pénurie de PQ. De pates aussi. Peut-être que l'astéroïde est fan de cuisine italienne, qui sait?

Évidemment on pourrait se demander pourquoi j'écris ce journal, puisqu'il n'y aura bientôt plus personne pour le lire. C'est très simple, je n'ai rien d'autre à faire. Rien d'intelligent en tous cas.

Alors j'écris. Pour passer le temps. Et pour ne rien dire surtout. Dehors c'est la panique absolue, tout le monde crie, court, certains pleurent… Comme si ça allait changer quelque chose.

Ils sont ridicules. Au lieu de profiter de leurs derniers instants poyr accomplir leurs rêves (évidemment si quelqu'un rêve de prendre une années sabatique pour faire le tour du monde c'est compliqué ) ou bien pour faire quelque chose d'utile comme, je sais pas moi, écrire un journal que personne ne lira jamais!

Ok, j'avoue, c'est ma manière à moi de décompresser. Mettre des mots sur moi, sur mes pensées… Critiquer les autres aussi, c'est vachement relaxant!

Derrière ma fenêtre, il y a un bébé. Il pleure. Je crois que ses parents l'ont abandonné. C'est un peu tard maintenant. Ils auraient pu le faire plus tôt.

Il y a aussi une fille qui fait de la trotinette en chantant la reine des neiges. Elle au moins elle a compris le sens de la vie. Elle s'amuse au lieu de paniquer. Pas comme cette femme, de l'autre côté, qui ne fait que crier des prières depuis tout à l'heure. Madame le jugement divin est arrivé. Mais ne vous inquiétez pas, si vous étiez une bonne croyante c'est un allez simple pour le paradis. Cool non?

Le bébé devant la fenêtre me fait vraiment de la peine. Et surtout il me fait mal aux oreilles à pleurer sans cesse. Enfin bref, il faut bien faire quelque chose non?

J'ai cédé. Je l'ai pris avec moi. Dans son berceau il était écrit “ce bébé s'appelle Simon, prenez en soin.” J'avoue qu'au début je n'ai pas compris. Moi dans mon lit je met rarement de post-it avec écrit “cet homme s'appelle Ben et il ronfle”. Mais ensuite seulement j'ai trouvé la raison d'être de cet information.

Non seulement les parents avaient abandonné leur enfant,mais en plus ils refusaient au futur père le choix du prénom? Ah, ça non! Ce bébé s'appellera Adam, et puis c'est tout. J'ai choisi ça sur un coup de tête? Oui. Je le regretterai bientôt? Surement.

Mais pour l'instant je suis très fier de moi. Il a arreté de pleurer, c'est déja un premier pas pour mes oreilles.

Je m'appelle Ben, et dans 7 jours je vais me faire écraser par un gros caillou.

Mercredi :

Je crois que je vais mourir.

C'est une meilleure introduction que “cher journal” ça non?

Bon, c'est vrai, vous vous en doutiez. Comme je l'ai déjà écrit hier, il y a un gros caillou qui va tous nous écraser. Je radote, peut-être que le temps passe plus vite pour que ma mort paraisse normale. Je suis déjà vieux.

Mais là ce n'est pas EF qui va me tuer. C'est Adam. Ce gamin n'est pas normal j'en suis sûr. Il a surement des gênes croisés avec un chat. Il dort, il mange,il pleure. Peut-être que c'est sa manière à lui de gérer le stress,mais moi ça ne m'aide pas du tout.

Par contre je crois que j'ai compris pourquoi les gens achètent du PQ avant la fin du monde. Ce gamin est insuportable. Vraiment.

Aujourd'hui les rues sont calmes. Après trois jours de panique je crois que les gens se sont résignés. La voisine d'en face prit toujours, mais désormais c'est barricadée chez elle qu'elle le fait. La petite fille en trotinette n'est plus là elle non-plus. Ses parents lui ont surement expliqué que le cœur n'était pas à la fête.

Aujourd'hui j'ai décidé de prendre des nouvelles de ma famille. Personne n'a répondu. Connaissant mon grand-père Jonas, il s'est surement enfermé dans sa cave, sans électricité ni WiFi. Et il y aura emmené tout le quartier en pestant sur le fait qu'il "avait bien dit que la ville avait urgemment besoin d'un bunker publique". Ma grand-mère, elle se tait en général. Elle n'ose pas lui dire quand il a tort.

Mon frère n'a plus le téléphone non-plus. Il doit être parti pour un road trip à vélo pour voir les plus grands endroits de France qu'il n'a pas encore vu.

J'aurais pu avoir plus de chance avec mes parents, mais je n'ai pas osé les appeller. J'ai peur qu'ils me demandent de les rejoindre, et j'ai mieux à faire que d'aller jouer à la belotte. Car oui, même en ce moment mon père doit être en train de jouer à la belotte. Il ne fait que ça.

Enfin non, je n'ai pas mieux à faire. Quoique. Tout est mieux à faire qu'une belotte avec mes parents.

De dépit j'ai appelé Pauline, mon ex. Je voulais des conseils pour m'occuper d'Adam, vu qu'elle a eu deux enfants avec Kevin, son nouveau petit-ami. Elle a répondu elle. Pour me dire que la dernière des choses qu'elle voulait faire avant de mourir c'était me parler.

Puisque on garde en général le meilleur pour la fin, je suppose que c'est une gentille attention, mais ça ne m'aide pas à élever un enfant.

Surtout que je ne voudrais pas qu'il devienne un racaille des rues. En même temps il y a peu de chances qu'il survive jusqu'à ses un ans, alors je ne m'inquiète pas trop.

Le temps est dégagé. Un dernier au revoir du soleil je suppose.

Je m'appelle Ben, et je dois survivre à l'apocalypse avec un enfant inconnu sur les bras.

Jeudi :

Cher Journal.

Je reviens finalement à cette formule classique qui n'est pour tout te dire pas si mauvaise. Elle permet d'éviter de prendre conscience de l'imminence de sa fin comme je l'ai fait hier.

Je n'avais jamais vu la ville aussi silencieuse et… plate. Il n'y a vraiment rien à dire. Seuls les oiseaux, inconscients, continuent de chanter. C'est très déplacé.

J'ai acheté des haricots verts. Frais. De tout manière il n'y a plus ni conserves ni pates en super marchés. Je suis même étonné qu'on puisse encore acheter. Dans les films de fin du monde en général il n'y a plus personne et on peut se servir. Là, la caissière m'a dit comme d'habitude “ça feras 10 euros, vous payez comment?”

Mais pour une fois, elle a même rajouté avec un soupir que le ravitaillement était le lendemain, et qu'il était temps.

Les conducteurs de camion ont le sens du civisme. Moi je n'aurais pas pris le volant.

En revenant j'ai croisé Pauline. Elle ne m'a même pas adressé un regard. J'aimerais bien me réconcilier avec elle avant la fin. Mais il ne reste que cinq jours, on est mal barrés. Surtout qu'elle refuse de me parler, alors je n'ai aucune chance.

J'ai aussi acheté une boite de lait en poudre pour Adam. J'espère qu'il l'acceptera, je n'ai pas trouvé le rayon “lait maternel”. En même temps je n'ai jamais eu d'enfant moi. Enfin si, un, mais Pauline est partie avec et l'a déclaré comme celui de Kevin. Alors qu'il a mes yeux le petit!

Enfait je ne suis pas sûr que ce soit une bénédiction que je lui ai faite. J'ai les yeux marrons les plus banals du monde. Ce qui ne m'empêche pas d'être d'une beauté à couper le souffle… j'espère.

Après ces quelques courses, la journée ne fut pas très productive. J'ai trainé, essayé de regarder un film mais il n'y avait rien d'autre sur les chaines que “c'est la fin du monde au secours on va tous mourir”. Et Bob l'éponge sur Gully, mais j'avoue que j'ai jamais vraiment accroché.

Sans jugement évidemment.

J'hésite entre me réfugier au sous sol et creuser un tunnel pour aller le plus profond possible sur Terre, et sauter du toit pour abreger cette attente interminable.

Au final je pense que je vais juste rester dans ma maison. Ni au dessus, ni en dessous. Au milieu, comme le gars parfaitement moyen que je suis. C'est pas fun mais c'est le plus raisonnable. Et moi, je suis raisonnable.

Ce sera ma phrase finale ? Je m'appelle Ben et je suis raisonnable? Non. Je préfererais un truc qui claque, un truc stylé pour la postérité.

Quelle postérité? Je ne sais pas. Imaginez que des archéologues d'une autre éspèce ne découvre se carnet dans le futur. Ils pourront dire Ben était un gars cool, et pas Ben était un gars moyen.

Ça passe bien ça.

Je m'appelle Ben, et dans cinq jour je vais mourir de manière cool. (J'espère)

Vendredi :

Très Cher Journal.

On est proches maintenant, je pense que je peuxt'appeler comme ça non? En tout cas, comme tu n'est pas très causant, je me permet.

Aujourd'hui il y a eu une coupure d'éléctricité. Une histoire de collision de EF-031 avec un satellite qui a fait disjoncter des capteurs, qui ont eux même fait disjoncter le batiment EDF à côté.

On mourra peut-être de catastrophe nucléaire avant que EF ne tombe au final.

Ducoup, comme ils s'ennuyaient, les gens sont sortis dans la rue. Ils ont papoté, raconté leur vie, évoqué leurs rêves pour le futur… à ce moment ils ont compris que ça ne s'accompliraient jamais et ils ont pleuré. Puis ils ont partagé un apéro. J'aurais bien aimé venir, mais je ne me voyais pas trop me pointer en mode "Salut tout le monde, le vin appelle, j'accoure!"

La voisine d’en face non-plus n’a pas partagé ce moment de joie. Je crois qu’elle prie encore. En tout cas hier soir elle a planté une croix de bois dans son jardin, et a demandé à ce que personne ne la dérange d’ici sa mort.

Alors personne ne lui a proposé d’apéro.

On sait désormais que l’astéroïde est tout près. Il tombera aux états-unis. Nous, nous n’en verrons même pas la couleur. Par contre le choc va engendrer une vague de catastrophesnaturelles du type tsunamis, séismes, éveils de volcans…

En bref on va tous y passer. C’est pas super super cool.

Je crois que la caissière se faisait des idées. Aujourd'hui le supermarché est fermé parce qu’ils n’ont pas été ravitaillés.

Il y a déjà des vitres cassés et des personnes qui se sont servies. Je crois que la caissière elle même n’est pas partie les mains vides.

J’aurais bien aimé ne pas finir ma vie seul. Enfin, je ne suis pas seul, il y a Adam, mais ce n’est pas comme de la compagnie. Lui, il me permet d’occuper une partie de mon temps à me réveiller la nuit, changer des couches, le nourrir…

Je ne comprends vraiment pas les gens quiveulent des enfants. Ni ceux qui les abandonnent après d’ailleurs, parce que je crois que je suis drogué à Adam. Je ne peux pas me passer de lui. Et lui ne pourrait pas se passer de moi, alors je considère qu’on est quittes.

Je commence à me rendre compte que la fin approche. Ça me parait… irréel. Dans seulement quatre jours je vais mourir. Finit. À tout jamais.

Je n’ai pas peur de souffrir. Je me demande plutôt ce que ça fait ce… rien. Ne plus rien sentir, ni ressentir, ni penser. Ne pas exister. Ça doit être très bizarre.

Au moins maintenant, nous saurons tous et toutes ce qu’il y a après la mort. Ce sera ma conclusion aujourd'hui. Je n’ai pas le cœur à trouver mieux.

Je m’appelle Ben et la fin du monde me rend philosophe. Super.

Samedi:

Très cher Journal.

Cher ami plutôt. Tu es mon seul confident désormais. Tout mon entourage m'a laché.

Aujourd'hui je n'ai pas vraiment envie d'écrire. Je ne l'aurais plus jamais je pense. Trois jours, c'est à la fois si long et si court… On peut faire tant de choses et si peu à la fois…

En trois jours, je peux me recueillir sur la tombe de mes ancètres. Mais pas de tous car leurs cimetières sont éparpillés partout en France.

En trois jours je peux aller m'excuser auprès de ceux à qui j'ai fait du mal. Mais je ne peux pas réparer mes erreurs.

En trois jours je peux aussi tenter de survivre. Mais je n'y arriverais pas alors à quoi bon?

Je m'appelle Ben et aujourd'hui, j'ai l'impression que plus rien ne compte. Et que plus rien ne comptera jamais.

Dimanche :

TCJ.

Je n'ai plus le courage de l'écrire en entier, la force me manque. Dans seulement deux jours je suis morts.

Les gens dehors sont tous très détachés. Ils rient, profitent des derniers instants qu'il leur reste à vivre.

Je crois que je suis le chemin inverse. J'ai d'abord été loin de tout ça et maintenant…

Je panique. J'ai peur. J'ai envie de crier, de pleurer.

Que faire?

Je ne sais pas si j'ai la force d'écrire ce journal aujourd'hui. Et pourtant il le faut. C'est la seule chose qui me permet d'externaliser mes émotions en silence. De crier sans que personne ne l'entende.

Dans le vide.

Le vide de la mort.

J'y reviens toujours. Je n'en peux plus. Je ne veux plus rien faire. Ni me battre pour le dernier paquet de petits pois du monde, ni m'occuper de moi-même.

Les seules choses que je fait sont écrire et m'occuper d'Adam. Il est mon rayon de soleil. Aujourd'hui il a fait son premier sourire, et moi j'ai pleuré pour la toute dernière fois.

Je me suis promis d'être fort pour lui. Je dois être un père qui tient la route. Alors je joue avec lui. J'ai trouvé dans mes affaires au grenier de veiux jouets d'enfants. Je les lui ai donné. Il n'arrive même pas encore à les attraper.

Les gens dehors font du bruit. Moi j'ai besoin de calme pour réfléchir. Pour me reposer sur ma vie, et me remémorer les bons et les mauvais moments.

Dans deux jours je vais mourir.

Je me le dit au moins une fois par heures. Le pire c'est de ne pas savoir a quelle heure exactement. Aurais-je le temps d'écrire une page de ce journal mardi prochain? Ou bien la fin adviendra-t-elle dans la nuit, avant mon réveil?

C'est fou comme le stress peut changer des gens. Je n'avais jamais été comme ça avant.

Je m'appelle Ben,et je ne sais plus qui je suis.

Lundi (midi):

Plus qu'un jour. Adam va bien. Il commence à pleurer beaucoup, je pense que sa première dent approche. Ou bien il sent que sa dernière heure sera là avant.

Pauline s'est excusée de m'avoir trompé. Je crois qu'elle est prise d'une soudaine crise existentielle quant à l'existence du paradis, et qu'elle veut la dernière place.

Au fond moi je m'en fiche.

Je veux juste que tout ça se finisse. J'en ai marre d'avoir peur, d'avoir faim, d'avoir froid. En été. Il ne reste qu'un peu moins de 24h avant le bouquet final.

Je m'appelle Ben, et j'ai hâte.

Lundi (soir) :

Je m'appelle Ben, et cette nuit je vais mourir. Il est tard. J'ai veillé pour ne pas me réveiller avant la fin. Ce sera peut-être quand même demain, je ne sais pas encore. Quoi qu'il arrive, au revoir. Et Adam, pardonne moi de ne pas avoir été un bon père. J'ai fait du mieux que je pouvais avec les competences limitées que j'av

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5 Comments

21 days
ooooh, l'idée du bébé !
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21 days
J'adore qu'il décide de s'occuper d'un bébé abandonné. J'ai trouvé que c'était une super idée, et aussi très réaliste car je pense que si une telle chose arrivait, certains parents n'hésiteraient pas à partir en abandonnant leurs enfants à eux-même.
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20 days
Malheureusement je pense aussi...
Merci en tout cas!
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22 days
J'ai bien aimé le fil rouge avec le bébé et le manque de sens à ce que fait le personnage principal. C'est un très bon texte, avec beaucoup de bonnes idées. J'aime beaucoup comment les gens deviennent un peu plus humains à mesure que l'apocalypse se rapproche dans ton histoire, alors qu'on a souvent l'opposé dans les autres propositions qu'on a eu. C'est un très chouette texte, le défi est réussi !
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22 days
Merci!
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