Ok, je sais que tu ne verras jamais cette lettre, je sais que tu ne te souviendras probablement pas de nous deux, ni de tout ce qu’on a vécu ensemble. En même temps, je te comprends, ça fait trois ans. Trois ans et onze mois. Le nombre de jours, je les ai oublié, j’en suis désolée. Mais ton message, non. Il reste gravé au fond de ma mémoire. Ma réaction aussi, quand je l’ai lu. Tout ça, c’est à l’intérieur. Et tu n’auras jamais vu, jamais entendu, jamais su ce que j’ai ressenti, ce que j’ai fait, ce que j’ai enduré. Non, tu n’auras jamais su, et tu n’auras pas voulu le savoir.

Alors, même si tu ne liras pas ce texte, je l’écris, je pose des mots sur cette feuille, et si tu tombes dessus, libre à toi d’en faire ce que tu veux.

À toi, mon ancien amour, à celui en qui j’ai cru, à celui que j’ai réellement aimé.

Deux ans. Nous deux, ça a duré deux ans. Tu sais, la jeunesse dans toute sa splendeur, quand aucun de nous deux ne soihaitait faire le premier pas. Finalement tu l’as fait. Sans doute tu ne te souviens pas, mais le lendemain on s’était vu, à la fête de l’école. On ne s’est pas adressé la parole, juste quelques regards en coin, des sourires, les joues rouges. Et pourtant, dans mon coeur, ça tambourinait. Et pourtant, j’avais aimé cette sensation, ces sensations ! J’étais spéciale à tes yeux, je le savais.

Et puis, nous deux, ça a évolué, ca continuait, on avançait ensemble. Un an. Et puis, deux ans. Quand j’y repense, c’était merveilleux. Quand j’y repense, je t’aime encore. Probablement que c’est pour ça qu’avec le dernier garçon avec qui je suis sortie, ça n’a pas fonctionné. Parce que tu es encore là. Dans mes pensées. Je me souviens.

Si seulement j’avais su ce qui allait se passer. Si seulement j’avais prévu que tout n’est pas tout rose. Si seulement je m’étais décroché de mes livres à l’eau de rose, où même à des kilomètres l’un de l’autre, ils arrivent à s’aimer éperdument. Parce que, nous, ça n'a pas été le cas.

Est-ce que tu te souviens du jour où je t’ai annoncé que je démenageais ? Dans une autre ville. Dans un autre pays. Dans un autre continent. Le bout du monde. Moi, j’étais heureuse, quoique triste. Toi, tu étais dépité, je le sais. Encore plus quand tu as appris que ça avait été mon choix. Oui, j’ai voulu partir vivre dans un autre pays, découvrir autre chose, profiter de la vie telle qu'elle est, avec les opportunités qui apparaissent, tantôt aux bons moments, tantôt aux mauvais moments.

Tu sais, je m’y plais, ici. J’aime cette nouvelle vie, ces paysages à couper le souffle, découvrire la culture, les expressions, la faune, la flore, les gens. J’aime ça. Les saisons, le langage, les traditions, les plats. C’est magnifique. J’aurais voulu que tu viennes ici, que tu visites mon nouveau pays. J’aurais voulu, vraiment. Mais, tu ne viendras pas.

Au fur et à mesure que les jours défilaient après mon annonce, on se rapprochait, mais on s’éloignait. Tu sais, cette impression qu’il nous reste peu de temps ensemble, alors on profite à fond, on se voit trois fois par semaine en dehors des cours, un peu plus de câlins qu’à l’accoutumée, on s’isole des autres amis pour passer du temps en tête à tête, on se montre à quel point on s’aime. Et en même temps, que ça se finit bientôt, il faut se lâcher, commencer à s’imaginer l’un sans l’autre. C’est ça qu’on vivait, maintenant, je suis capable de mettre des mots sur cette sensation.

Et puis, ton message. En octobre, alors que j’étais à l’école. J’étais heureuse, j’étais avec une de mes amies, on marchait dans les couloirs en attendant que la cloche sonne. Je vois ton message. Je souris et clique dessus. Et puis, mon sourire disparaît peu à peu, au fur et à mesure que les mots défilent devant mes yeux. Un pavé pour me dire que tu me quitte, mais que tu m’aimes encore, c’est juste trop dur à cause de la distance. Je t’en ai voulu. Cela ne faisait que trois mois que j’étais partie, et tu osais me dire qu’on ne se reverrait pas de sitôt, à croire que je pourrais sécher mes cours pour prendre l’avion et venir te voir. Ensuite est venu la culpabilité; c’est ma faute, je suis partie. Et finalement la tristesse. C’est fini. J'en prenais conscience. Mon amie a remarqué mon mal-être, j’ai pleuré. Elle était là pour moi, je le savais.

On ne s’est plus reparlé, tu m’as bloqué partout, je n’ai pas cherché à te joindre. Avec une de mes amies, qui est aussi une des tiennes, on a parlé de toi, il y a un an. Apparemment, tu t’es tapé toutes mes amies. Sympa, hein.

Si tu me demandais aujourd'hui de retourner à l’époque où on sortait ensemble, où j’ai fais mon choix de déménager, je refuserais. Oui, nous deux, c’est terminé. Oui, j’ai beaucoup de mal, encore aujourd'hui, à passer au-dessus de tout ça, à ne pas laisser les souvenirs m’envahir, mais non, je ne reviendrai pas en arrière.

Parce que j’aime ma nouvelle vie, et j’aurais fait tous les efforts du monde pour qu’on se revoie le plus tôt possible. Je t’aurais appelé chaque jour, envoyé des messages dès que je le pouvais, venu pendant les vacances, envoyé des cadeaux et tout ce que tu veux d’autre. J’aurais tout fait pour nous. Tu n’as juste pas eu la patience de m’attendre. Tu n’as juste pas apprécié que je vive ma vie.

Aujourd'hui, il n’y a plus que toi, et puis moi, mais plus de nous deux. Est-ce qu’on sortira ensemble encore plus tard ? Je ne crois pas. Est-ce que je le veux ? Je ne pense pas.

Ces quelques mots m’ont permis de me délivrer un peu de ce poids dans mon cœur, surtout en sachant que tu ne les liras pas. Aujourd'hui, j'avance, sans toi, mais avec moi.

À toi que j’ai par le passé aimé, je veux que tu sache que je me relève de nous deux, que j’ai appris, et que je ferai toujours passer mon bonheur avant celui d’une personne qui dit m’aimer, mais qui me laisse tomber quand je fais un choix.